Guerre en Ukraine : l’AIEA tire la sonnette d’alarme, à la centrale de Zaporijjia, on s'approche « dangereusement d'un accident nucléaire »

La centrale nucléaire de Zaporijjia, occupée depuis mars 2022 par la Russie dans le sud de l'Ukraine, a subi une série d'attaques de drones à partir du 7 avril. Moscou et Kiev se rejettent mutuellement la responsabilité. Le risque d'un accident nucléaire grandit dangereusement a alerté ce mardi l'Agence internationale de l'énergie atomique.
Le site de Zaporijjia est occupé depuis mars 2022 par la Russie.
Le site de Zaporijjia est occupé depuis mars 2022 par la Russie. (Crédits : ALEXANDER ERMOCHENKO)

On ne sait à qui attribuer la responsabilité des attaques de drones subies depuis le 7 avril par la centrale nucléaire de Zaporijjia, occupée par les Russes depuis mars 2022, mais la menace est bien réelle. Selon Rafael Grossi, patron de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), « nous nous approchons dangereusement d'un accident nucléaire ».

Interrogé lundi par les journalistes sur l'origine de ces récentes attaques, en marge d'une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU consacrée à la situation de la centrale, le directeur général a déjà assuré « qu''il est tout simplement impossible d'identifier le pays responsable ». Parce que les attaques ont été menées par des drones qui peuvent faire des détours et que les drones en question « peuvent être obtenus pratiquement n'importe où ». « Alors les preuves scientifiques ne sont pas là pour nous permettre de dire de façon indiscutable que cela vient de là ou de là », a-t-il insisté.

« Une phase cruciale du conflit »

Mercredi dernier, à l'ouverture d'une réunion à Vienne des 35 membres du Conseil des gouverneurs, convoquée en urgence à l'appel de la Russie et de l'Ukraine, Rafael Grossi avait déjà dit que ces attaques nous avaient « fait entrer dans une phase cruciale du conflit ». Il s'agissait des « premières depuis novembre 2022 à cibler directement la centrale ».

A la sortie de la réunion, qui a duré trois heures et demi, l'ambassadeur russe auprès de l'AIEA Mikhaïl Oulyanov s'est dit « satisfait par la discussion », espérant qu'elle incitera les Ukrainiens « à cesser ces actions dangereuses, quasi quotidiennes ». L'Ukraine a de son côté fustigé « une campagne de désinformation » de Moscou, accusée de simuler des frappes pour « discréditer » Kiev, selon un communiqué de la mission permanente à Vienne.

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Devant le Conseil, l'Union européenne a estimé que ces développements « très inquiétants » venaient « rappeler les risques que font peser l'occupation illégale par la Russie » du site. Moscou « doit immédiatement, sans condition et complètement retirer toutes ses forces et l'équipement militaire », a insisté l'UE. « C'est la seule solution pour minimiser le risque d'un accident nucléaire. » Depuis l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, le Conseil des gouverneurs a adopté quatre résolutions condamnant les actions de la Russie contre les installations nucléaires ukrainiennes.

Des « attaques irréfléchies » qui « doivent cesser »

D'où qu'elles viennent, ces « attaques irréfléchies doivent cesser immédiatement », a de nouveau plaidé Rafael Grosso lors de réunion du Conseil de sécurité de l'ONU dédiée à cette question.

« Bien qu'heureusement elles n'aient pas provoqué d'incident radiologique cette fois-ci, elles ont largement augmenté le risque à la centrale de Zaporijjia, où la sûreté nucléaire est déjà compromise », a ajouté le directeur général de l'instance onusienne, qui dispose d'experts sur place. Elles constituent également un « dangereux précédent, en ayant atteint avec succès la structure de confinement d'un réacteur ».

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« Deux années de guerre pèsent lourdement sur la sûreté de la centrale nucléaire de Zaporijjia. Chacun des sept piliers de l'AIEA sur la sécurité et de la sûreté nucléaires ont été compromis. Nous ne pouvons pas rester sans rien faire en attendant qu'un dernier poids fasse pencher la balance en équilibre instable », a plaidé le responsable de l'AIEA  appelant à ce qu'un « coup de dé ne décide pas de ce qui se passera demain ». Même si les six réacteurs de la centrale sont à l'arrêt, « les dangers potentiels d'un accident nucléaire majeur restent bien réels ».

Avec les Américains, l'Ukraine modernise la centrale de Khmelnitskiï

Par ailleurs, en raison de l'occupation russe de la centrale, l'Ukraine a commencé à construire deux réacteurs, de fabrication américaine, dans une centrale nucléaire de l'ouest. Jeudi, des travailleurs de la centrale de Khmelnitskiï ont coulé le premier mètre cube de béton des réacteurs, qui utiliseront une technologie et un combustible américains, acte symbolique accompli près de drapeaux ukrainien et américain flottant au vent.

Pour des raisons de sécurité, Energoatom avait demandé aux journalistes d'attendre samedi pour rendre public ce lancement. La cérémonie s'est produite quelques heures après qu'une frappe russe a détruit une centrale énergétique près de Kiev.

« C'est notre réponse aux terroristes, c'est notre réponse aux envahisseurs », a affirmé le ministre Guerman Galouchtchenko, ministre de l'Energie. « Aujourd'hui, nous parlons du futur, de la stabilité » a-t-il dit, parlant du développement de la centrale de Khmelnitskiï comme du plus important projet de modernisation en Ukraine depuis la Seconde guerre mondiale.

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Pour rappel, l'Ukraine tire près de la moitié de son énergie du nucléaire. Les réacteurs qu'elle utilise actuellement sont de conception soviétique, mais elle les a convertis au combustible américain. La centrale de Khmelnitskiï possède déjà deux réacteurs en activité, et deux autres sont partiellement construits avec une conception soviétique. Ceux dont la construction a débuté cette semaine, les réacteurs 5 et 6, utilisent la technologie du réacteur AP1000, de l'entreprise américaine Westinghouse. Les unités auront chacune une capacité de plus de 1.100 mégawatts.

Avec six réacteurs en fonctionnement, Khmelnitskiï deviendra la plus grande centrale d'Europe, dépassant Zaporijjia, a affirmé Petro Kotin. La centrale de Khmelnitskiï est située dans l'ouest du pays, une zone relativement sûre, mais tout de même régulièrement visée par des frappes russes, d'autant qu'une importante base aérienne y est située.

(Avec AFP)

Commentaires 3
à écrit le 16/04/2024 à 16:35
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La rédaction de La Tribune pense-t-elle sérieusement que ce sont vraiment les Russes qui bombardent la centrale nucléaire qu'ils...occupent? :):):)

à écrit le 16/04/2024 à 11:31
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La centrale est occupée par les Russes, quelle mauvaise foi de sous-entendre que les drones pourraient être russes alors que tout le monde sait que c'est Kiev qui attaque cette centrale. Pourquoi toujours exempter les responsabilités des actes ukrai...

à écrit le 16/04/2024 à 8:04
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Depuis le temps qu'ukrainiens et russes tirent dessus on peut même se dire que c'est une forteresse le truc là ! A qui profiterait un accident nucléaire ?

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