Les investissements dans le secteur énergétique restent insuffisants pour faire baisser les prix selon l'AIE

Les investissements dans le secteur énergétique mondial ont progressé de 8% par rapport à la période d'avant Covid, pénalisés par la hausse des coûts, indique l'Agence internationale de l'énergie (AIE) dans son rapport annuel. Si les énergies renouvelables en captent les trois quarts, ils restent insuffisants pour atteindre les objectifs de la transition énergétique. Quant aux investissements dans les hydrocarbures, ils vont surtout profiter au charbon.
Robert Jules
Vue de la raffinerie de Ras Tanura appartenant à Aramco en Arabie Saoudite.
Vue de la raffinerie de Ras Tanura appartenant à Aramco en Arabie Saoudite. (Crédits : Reuters)

Si les objectifs de la transition énergétique pour décarboner l'économie mondiale sont clairs - zéro émission nette en 2050 -, en revanche, la voie pour les atteindre apparaît de plus en plus sinueuse, exigeant des investissements massifs à court terme dans le secteur de l'énergie.

En 2022, ils ont représenté 2.400 milliards de dollars à l'échelle mondiale, soit une progression de 8% par rapport à leurs niveaux d'avant la pandémie, selon le rapport annuel de l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Ils restent toutefois insuffisants selon l'agence pour faire baisser les prix de l'énergie qui atteignent des niveaux historiques et atteindre les objectifs de réduction de gaz à effet de serre qui favorisent le réchauffement climatique.

1.400 milliards de dollars dans le renouvelable

Néanmoins, une part importante - 1.400 milliards de dollars - est allée au développement du secteur de la production d'électricité à travers les énergies renouvelables - solaire et éolien - et l'extension des réseaux électriques, ainsi qu'aux mesures permettant d'améliorer l'efficacité énergétique.

Le secteur des hydrocarbures et dans une moindre mesure la production de carburant bas carbone a drainé un montant important mais inférieur à leur niveau d'avant la crise, malgré l'effet d'aubaine représenté par le prix élevé du pétrole, du gaz naturel et du charbon. « Le revenu net des producteurs mondiaux de pétrole et de gaz devrait doubler en 2022 pour atteindre un montant sans précédent de 4.000 milliards de dollars », souligne l'agence.

C'est l'objet d'une polémique outre Atlantique entre Joe Biden et les « majors » pétrolières à qui il reproche de ne pas investir dans le développement de la production préférant engranger des bénéfices historiques, alors que le prix de l'essence et du diesel atteignent des prix records qui pèsent sur les consommateurs dans un contexte d'inflation élevée.

Cette hausse généralisée des prix a d'ailleurs absorbé une part non négligeable des investissements. « Près de la moitié des 200 milliards de dollars supplémentaires d'investissements en capital en 2022 seront probablement absorbés par des coûts plus élevés, plutôt que d'apporter une capacité d'approvisionnement énergétique supplémentaire ou des économies », indique l'AIE. Des majorations de coûts qui vont de la main d'œuvre aux services spécialisés en passant par l'augmentation des prix du ciment et de l'acier pour les infrastructures et la hausse du prix de l'énergie.

« L'investissement dans les combustibles fossiles est sur une tendance à la hausse, mais il est toujours inférieur de près de 30 % à ce qu'il était au moment de la signature de l'Accord de Paris », remarque toutefois l'AIE.

Prime géopolitique

Alors que les prix du brut, du gaz naturel et du charbon en forte hausse de fin 2021 jusqu'à aujourd'hui en raison de la crise énergétique européenne, les sanctions occidentales contre la Russie en rétorsion à l'invasion de l'Ukraine ont ajouté une prime de risque géopolitique aux cours des hydrocarbures.

Ainsi, les investissements dans le charbon, qui exigent une moindre intensité capitalistique que le pétrole et le gaz naturel, ont augmenté de 10% en 2021 (soit 105 milliards de dollars) et de 10% également en 2022 (voir graphique ci-dessous). Ce développement qui tourne le dos aux engagements de la COP de Glasgow est surtout le fait de la région asiatique. Ainsi, la Chine qui a dû composer avec des pénuries de houille et des rationnements de l'électricité a augmenté sa capacité de production de charbon de 350 millions de tonnes au deuxième semestre de l'année dernière, donnant la priorité à l'impératif de la sécurité énergétique. En 2022, elle a déjà approuvé de nouvelles capacités équivalant à 15 gigawatts.

L'Inde, elle aussi confrontée à des pénuries d'électricité, a augmenté ses capacités  de production locale en raison des prix élevés internationaux.  En Europe, une consommation accrue de charbon a été annoncée par plusieurs pays pour permettre la reconstitution des stocks gaziers avant l'hiver.

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investissement O&G

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Les compagnies pétrolières saoudienne Aramco et émiratie ADNOC vont augmenter de 15% à 30% leurs investissements dans la production cette année, souligne le rapport.

Outre le brut, les prix des produits pétroliers (essence, diesel, gasoil, kérosène) ont atteint eux aussi des niveaux records, traduisant un problème de capacité de raffinage, alors que les marges se sont envolées. « En 2021, le secteur mondial du raffinage a connu sa première réduction de capacités en 30 ans, avec la fermeture de 1,8 million de barils par jour qui a dépassé les modestes capacités ouvertes en Chine et au Moyen Orient », pointe l'agence qui remarque que « la solide performance financière (du secteur) et le taux d'utilisation élevé vu au cours de ces derniers mois ne devraient pas nécessairement se traduire par un niveau élevé d'investissements étant donné la persistance des incertitudes sur les perspectives de la demande pétrolière à long terme ».

GNL, des investissements « compliqués »

Enfin, pour le gaz naturel, le marché a été bousculé par la guerre en Ukraine. Les pays de l'Union européenne veulent se passer du gaz russe, leur principal fournisseur, et mise sur le gaz naturel liquéfié (GNL) comme alternative, ce qui ne va pas sans poser des problèmes. « L'abandon du gaz russe par l'Europe crée de nouvelles demandes sur les marchés du GNL, mais les nouveaux investissements dans le GNL sont rendus compliqués par le fait que la plupart des projets sont confrontés à une période de construction de trois à quatre ans et à des périodes de récupération du capital investi qui vont bien au-delà de la ruée de l'Europe vers un approvisionnement alternatif », avertit l'AIE. Ce qui n'est guère rassurant à quelques mois de la période hivernale.

Robert Jules
Commentaire 1
à écrit le 23/06/2022 à 0:48
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C'est pas possible : M Le Maire et Macron avaient dit que l'ouverture à la concurrence du marché de l'électricité devait faire baisser les prix

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