Guerre en Ukraine : l'énergie n'est jamais neutre

OPINION. Alors que la guerre fait rage entre l'Ukraine et la Russie, les démocraties occidentales continuent de financer l'effusion de sang en maintenant leur dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie. Par Zion Lights, activiste écologiste, communicante scientifique britannique et ancienne porte-parole du mouvement Extinction­Rébellion.
Emmanuel Macron, Olaf Scholz et Mario Draghi sont à Kiev ce jeudi pour rencontrer le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Depuis le début de l'invasion russe en Ukraine, les pays de l'Union européenne ont versé jusqu'à aujourd'hui plus de 61 milliards d'euros à la Russie pour l'achat de pétrole, de gaz naturel et de charbon, selon le décompte du site CREA.
Emmanuel Macron, Olaf Scholz et Mario Draghi sont à Kiev ce jeudi pour rencontrer le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Depuis le début de l'invasion russe en Ukraine, les pays de l'Union européenne ont versé jusqu'à aujourd'hui plus de 61 milliards d'euros à la Russie pour l'achat de pétrole, de gaz naturel et de charbon, selon le décompte du site CREA. (Crédits : Reuters)

Nous savons depuis longtemps temps que les combustibles fossiles ne sont ni sûrs ni propres. On peut rajouter un nouveau reproche à la liste : au cours des seuls deux premiers mois de l'invasion russe en Ukraine, l'Allemagne a versé environ 8,3 milliards d'euros à la Russie pour sa facture énergétique, somme largement employée par Moscou pour acheter des armes. Dans le même temps, les pays de l'UE auraient payé un total de 39 milliards d'euros pour acheter de l'énergie russe, soit plus du double du montant de l'aide qu'ils ont accordée à l'Ukraine pour se défendre.

Gazprom contre le nucléaire

L'énergie n'est jamais neutre. Depuis des années, la Russie tente de réduire l'indépendance énergétique des nations européennes. Aussi, ce n'est pas une surprise lorsqu'un scientifique français a révélé que le géant pétrolier russe Gazprom avait financé des ONG environnementales qui prônent l'abandon du nucléaire.

Tinne Van der Straeten, membre du Parti vert, ministre belge de l'Energie et critique virulent du nucléaire, a pour sa part un temps travaillé pour le cabinet d'avocats du géant gazier russe Gazprom. Il a mis le pays sur la voie d'un mix énergétique 100 %, renouvelables, en omettant le fait qu'il restera dépendant des couteuses importations de gaz russe. L'ancien chancelier Gerhard Schroeder, qui est à l'origine de la politique allemande de sortie du nucléaire, a ensuite rejoint le conseil d'administration de Gazprom. Juste avant que le conflit n'éclate, M. Schroeder a accusé l'Ukraine, et son attitude « belliqueuse », d'être responsable des tensions régionales plutôt que la Russie.

De même, le lobby pétrolier a fait barrage au nucléaire pendant des années. L'American Petroleum Institute a été reconnu responsable du financement de groupes d'action climatique inventés de toutes pièces, appelés Citizens Against Nuclear Bailouts, dans 16 États américains en 2017. Ces derniers ont méticuleusement ciblé des groupes d'Américains avec des tracts, des appels téléphoniques et des publicités sur Facebook, les appelant à demander la fermeture des centrales nucléaires.

En France, la plupart des journalistes s'acharnent aujourd'hui contre la solution à ce dilemme énergétique : le nucléaire - rempart qui a protégé le pays de la flambée massive des prix de l'électricité. Et ce alors même que la France continue de payer les fluctuations énergétiques des pays européens plus dépendants des énergies fossiles.

La désinformation continue

Un argument que nous avons beaucoup entendu ces derniers temps est que l'énergie nucléaire est mauvaise pour l'environnement. C'est tout simplement faux. Non seulement l'énergie nucléaire a une très faible empreinte carbone, mais pour la même quantité d'électricité produite, par rapports aux autres sources d'énergie, le nucléaire a également l'impact le plus faible sur les écosystèmes sur tout un cycle de vie. Un résultat qui s'appuie sur l'indice comparatif de la Commission économique des Nations unies pour l'Europe (CEE-ONU) qui intègre les impacts suivants sur les écosystèmes : écotoxicité terrestre, transformation des zones naturelles, écotoxicité marine, eutrophisation, écotoxicité en eau douce, occupation des terres agricoles et acidification terrestre.

Un autre mythe concerne la fermeture estivale des centrales nucléaires pour des raisons de sécurité. Cette idée a fait la « une » de la presse française ces derniers temps. Il est vrai que pendant les périodes prolongées de sécheresse ou de canicule, le niveau des rivières est généralement plus bas et leur température plus élevée. Les centrales nucléaires doivent donc prendre des mesures (par exemple, réduire la puissance de leurs réacteurs) afin de ne pas rejeter trop d'eau chaude qui pourrait avoir un impact sur l'environnement. Cette mesure est prise pour préserver la biodiversité des rivières.

Cette procédure est toutefois prévue et anticipée, si bien qu'elle ne pèse que très peu sur la production d'énergie. D'après le Réseau de transport d'électricité (RTE), les pertes de production nucléaire dues aux contraintes climatiques ne sont que de 0,37% en moyenne en France. Plus de 98% de l'eau utilisée pour la production nucléaire est restituée à l'environnement sans dégradation de sa qualité, et entre 2000 et 2017 en France, les pertes de production liées aux contraintes climatiques n'ont représenté que 0,18% en moyenne de la production d'électricité d'origine nucléaire.

Un changement de perception

L'indignation suscitée par ces problèmes mineurs et maitrisés est inexplicable. Des pays comme l'Allemagne, l'Italie et la Belgique, qui ont choisi d'arrêter progressivement leurs centrales nucléaires, sont devenus dépendants des importations russes en retour - et pénalisent en conséquence les prix de l'énergie en Europe ainsi que son indépendance géopolitique. S'ils n'avaient pas mis hors service leurs propres réacteurs, ils seraient beaucoup moins dépendants de la Russie pour les exportations de combustibles fossiles.

Malgré les appels répétés à la réouverture de ses centrales nucléaires, l'Allemagne a déclaré qu'il n'en serait rien. Non seulement le gouvernement actuel n'est pas pressé de se libérer de sa dépendance à l'égard du pétrole et du gaz russes, mais, malheureusement, il a récemment changé d'avis et s'oppose à l'inclusion de l'énergie nucléaire dans la taxonomie verte de l'UE - une position qui rendra la tâche plus difficile à tout autre pays européen décidant d'adopter un mix énergétique plus rationnel.

La Finlande - un pays qui ne sait que trop bien ce que signifie être voisin de l'ours russe - a lui choisi une approche beaucoup plus réaliste. Lors de sa conférence, le parti vert du pays (Vihreät De Gröna) s'est prononcé à une large majorité en faveur du nucléaire, qu'il qualifie sans hésiter d'« énergie durable ». Il appelle au développement de petits réacteurs modulaires (SMR) ainsi qu'à la prolongation des licences des réacteurs nucléaires existants. D'après les écologistes finlandais, le pays a besoin « d'un approvisionnement suffisant en énergie peu émettrice de CO2 et à l'empreinte environnementale minimale (...) pour construire un avenir durable ».

Ce cas n'est pas isolé. Fatih Birol, directeur de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), a déclaré : « L'énergie nucléaire a un rôle intégral à jouer si nous voulons sérieusement relever le défi climatique... Nous devons multiplier par cinq le rythme des nouvelles constructions de centrales nucléaires. »

S'opposer aux solutions énergétiques propres en temps de guerre revient à se ranger du côté d'un dictateur. Si le changement climatique s'aggrave, il en sera de même pour les conflits mondiaux. Les gouvernements occidentaux doivent intensifier leurs programmes d'énergie nucléaire et les journalistes doivent cesser de diffuser des informations erronées sur cette source d'énergie vitale. Rappelons que l'inconvénient de parler trop vite, c'est qu'après avoir dit des bêtises, on se met dans l'embarras de devoir les penser.

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Commentaire 1
à écrit le 16/06/2022 à 20:14
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Ecolo se dit elle... on notera qu'elle ne comprend rien à rien de rien.. mais si en plus les enjeux deviennent géopolitique alors ça devient lunaire.. si extinction rébellion c'est aussi stupide, inculte qu'ignare, alors faut arrêter de s'embêter à ...

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