Piratage informatique : à Taïwan, un nouveau vol de données sensibles

L'île vient de subir un nouveau piratage informatique. Des documents militaires et gouvernementaux ont été volés. Taïwan, avec ses industries stratégiques, est la cible de nombreuses cyberattaques. Un mouvement qui intervient alors que les relations entre Taïwan et la Chine sont de plus en plus tendues.
Des pirates informatiques ont volé des « informations sensibles », dont des documents militaires et gouvernementaux, à Chunghwa Telecom, le principal opérateur télécom de l'île.
Des pirates informatiques ont volé des « informations sensibles », dont des documents militaires et gouvernementaux, à Chunghwa Telecom, le principal opérateur télécom de l'île. (Crédits : Kacper Pempel)

C'est un nouveau vol de données que subit Taïwan. Des pirates informatiques ont volé des « informations sensibles », dont des documents militaires et gouvernementaux, à Chunghwa Telecom, le principal opérateur télécom de l'île, et les ont vendues sur le dark web, a indiqué ce vendredi le ministère de la Défense de Taipei.

« La première analyse de cette affaire est que les pirates ont obtenu des informations sensibles de Chunghwa Telecom et les ont vendues sur le dark web, y compris des documents provenant des forces armées, du ministère des Affaires étrangères, des garde-côtes et d'autres unités », a confirmé le ministère de la Défense dans un communiqué envoyé à l'AFP vendredi.

Cette annonce confirme les informations de la chaîne locale TVBS. Dans un reportage, la chaîne a montré une capture d'écran d'un message des pirates informatiques annonçant qu'ils « vendaient 1,7 téraoctets de données de Chunghwa Telecom » comprenant des contrats gouvernementaux.

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Pour l'heure, ni le ministère, ni TVBS n'ont identifié les pirates ou indiqué leur provenance. Le ministère de la Défense s'est toutefois montré rassurant, précisant qu'un contrat de l'armée de l'air inclus dans le vol de données ne relevait « pas une information confidentielle ». La correspondance entre la marine et Chunghwa ne contenait pas non plus d'information classifiée, a indiqué le ministère.

De son côté, Chunghwa Telecom a précisé jeudi avoir « mené une enquête pour déterminer les causes de l'incident présumé » qui n'a pas causé « d'impact significatif sur ses opérations », dans un communiqué à la Bourse de Taïwan.

« Les cyberopérations visant Taïwan ne s'arrêtent jamais »

Taïwan est devenue l'une des principales cibles des attaques informatiques dans le monde. Les attaques virtuelles se sont multipliées depuis un an, avec en moyenne cinq millions de cyberattaques par jour contre les agences du gouvernement, selon les estimations des autorités taïwanaises. Au premier semestre 2023, ces attaques ont même bondi de 80%, a noté la société de cybersécurité Fortinet, faisant de Taïwan la cible numéro un en Asie-Pacifique.

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La menace vient généralement de pirates accédant aux réseaux informatiques pour ensuite « patienter tranquillement à l'intérieur de l'infrastructure de la victime », explique à l'AFP Crystal Tu, chercheuse en cybersécurité à l'Institut de défense nationale et de recherche sur la sécurité de Taïwan. Ils passent à l'action lors de conflits, avec l'objectif de « perturber des infrastructures critiques, notamment dans les secteurs des télécommunications, de l'énergie et de la finance ».

« Les cyberopérations visant Taïwan ne s'arrêtent jamais », insiste la chercheuse, reflétant l'importance géostratégique de l'île.

Ces attaques ne visent pas seulement le gouvernement de Taïwan, ou son infrastructure de défense. Elles sont aussi menées contre la puissante industrie taïwanaise de semi-conducteurs. Et pour cause, l'île est le leader mondial. Ces composants sont indispensables à l'économie mondiale, des voitures aux téléphones portables en passant par les missiles.

L'industrie des semi-conducteurs également visée

Et leur importance est telle que l'an dernier, un ancien haut responsable américain avait indiqué que les Etats-Unis préféreraient encore détruire les sites de production taïwanais, plutôt que les laisser tomber aux mains des forces chinoises.

En 2023, Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC), qui contrôle plus de la moitié de la production mondiale de puces électroniques, avait signalé une fuite de données chez l'un de ses fournisseurs.

« Taïwan est une cible importante parce qu'elle se trouve au sommet de la chaîne d'approvisionnement des technologies de pointe », souligne Jim Liu, un haut responsable de Fortinet.

« La géopolitique et les relations (Chine-Taïwan) pourraient inévitablement accroître les incidents de cybersécurité », estime-t-il.

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Empreinte chinoise

Mais d'où viennent ces cyberattaques ? Dans la majorité des cas, les tactiques employées contre les infrastructures taïwanaises portent la marque de groupes parrainés par l'État chinois, ont suggéré certains experts. Encore l'année dernière, Microsoft avait signalé la menace d'un groupe basé en Chine appelé Flax Typhoon visant Taïwan. Selon le géant technologique américain, Flax Typhoon avait pour objectif « d'espionner et de maintenir l'accès » à diverses organisations taïwanaises le plus longtemps possible.

Pour rappel, Pékin considère le territoire de 23 millions d'habitants comme une de ses provinces devant être rattachée au reste du pays, par la force si nécessaire. Lors de manœuvres militaires menées en 2022 et 2023, Pékin avait simulé un blocus de l'île. Mais ce blocus pourrait aussi être virtuel.

« Comme Taïwan est une île, toutes les communications avec le monde extérieur dépendent de câbles sous-marins », expliquait récemment, dans un entretien à l'AFP, le ministre adjoint en charge du numérique, Huai-jen Lee. Donc « le pire scénario serait que tous nos câbles sous-marins soient sectionnés ».

Pour s'y préparer, Taïwan travaille avec deux fournisseurs étrangers de services satellite afin qu'ils collaborent avec la principale compagnie de télécommunications de l'île, selon le ministre. Des récepteurs satellite seront ainsi placés dans 700 endroits répartis sur le territoire « afin de tester si on peut y faire basculer notre système de communication en cas de crise majeure », a-t-il détaillé. « La priorité est de maintenir la stabilité du système de commandement du gouvernement et de préserver l'exactitude des informations fournies » à la population.

La tension continue de monter entre la Chine et Taïwan

Outre la menace virtuelle, Pékin continue de mettre la pression sur Taipei avec des vols d'appareils militaires ou encore le déploiement de bateaux de guerre dans ses eaux, selon les autorités taïwanaises. Mercredi dernier, onze navires chinois ont été détectés en vingt-quatre heures autour de Taïwan, a déclaré le ministère taiwanais de la Défense, un record depuis le début de l'année. Quinze avions militaires ont également été déployés.

Cette recrudescence d'activité s'inscrit dans un contexte de tensions exacerbées entre Pékin et Taipei, notamment après un incident mortel en mer impliquant un navire des garde-côtes taïwanais. Une vedette chinoise transportant quatre personnes a chaviré le 14 février près des îles taïwanaises de Kinmen alors qu'elle était poursuivie par les garde-côtes taïwanais, entraînant la mort de deux pêcheurs chinois. Pékin a accusé les autorités taïwanaises de « chercher à échapper à leurs responsabilités et à cacher la vérité » sur cet incident.

(Avec AFP)

Commentaire 1
à écrit le 02/03/2024 à 8:59
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Chers petits actionnaires laissez tomber ces bobards il fait que vous sachiez que depuis que nos données sensibles sont sur internet elles sont toutes achetable. Donc des patrons peuvent connaître l'état de santé d'un collaborateur ou futur collabor...

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