Sous la pression de Pékin, Ant Group reporte son entrée en Bourse historique

Depuis récemment, l'appli permettait d'acheter des produits de gestion de patrimoine. Avec d'autres activités, telles les prêts personnels et à la consommation et les assurances, la pépite de Jack Ma s'est attirée la méfiance des autorités chinoises qui craignent de perdre le contrôle sur les flux financiers.
(Crédits : ALY SONG)

L'arrivée en Bourse devait marquer l'histoire. L'IPO de la fintech Ant Group, éditrice de la très populaire application Alipay, est finalement reportée. Le géant du paiement en ligne, fondé par le milliardaire chinois Jack Ma, a suspendu mardi sa colossale entrée en bourse, prévue en double cotation au Star Market de Shanghaï (souvent baptisé le Nasdaq chinois) et à Hong Kong. En cause, la pression croissante des régulateurs financiers chinois.

Initialement, elle cherchait à lever 35 milliards de dollars, soit de très loin la plus importante opération de ce type de l'histoire. Elle aurait du la valoriser à hauteur de 250 milliards de dollars, soit cinq fois plus que la capitalisation boursière de BNP Paribas (environ 49 milliards de dollars).

Cette suspension a fait chuter à la bourse de New York le titre du géant Alibaba, également créé par M. Ma, et auquel Ant Group a été lié avant de s'en séparer. Le titre perdait plus de 7% vers 15H30 GMT sur le New York Stock Exchange, où Alibaba s'échange depuis 2014.

Lire aussi : L'IPO historique du chinois Ant Group parasitée par Washington ?

Ant Group, qui compte 731 millions d'utilisateurs mensuels actifs sur sa plateforme de paiement Alipay, a contribué à révolutionner le commerce et les services de paiement en Chine. Son volume de transactions se chiffre à plus de 14.000 milliards d'euros par an en Chine continentale.

L'appli mobile permet ainsi aux utilisateurs de commander un taxi, réserver un hôtel, acheter des billets de cinéma, payer des factures de services publics, prendre rendez-vous avec des médecins ou encore acheter des produits de gestion de patrimoine.

Jack Ma convoqué par les autorités chinoises

Or, c'est justement sur cette dernière activité qu'Ant Group a notamment suscité l'inquiétude des régulateurs financiers en faisant incursion dans d'autres activités réglementées, à savoir des prêts personnels et à la consommation, et des assurances.

La Bourse de Shanghai s'était dit inquiète dans un communiqué distinct du risque que l'entreprise échoue "à respecter les conditions d'émission et d'enregistrement ou les exigences (des régulateurs) en matière d'information". Le groupe lui-même a "fait état de problèmes majeurs tels que des changements dans la supervision de la fintech", a-t-elle souligné.

L'annonce est intervenue au lendemain d'une réunion inhabituelle avec les régulateurs à laquelle avaient été convoqués Jack Ma, principal actionnaire d'Ant Groupe, le président du groupe Eric Jing et le directeur général Simon Hu. Les médias d'Etat avaient récemment mis en garde contre l'instabilité financière qui pourrait résulter de la croissance rapide du groupe.

Elle fait aussi suite à la mise en place de nouvelles réglementations destinées à limiter les risques liés au secteur en pleine croissance des prêts en ligne en Chine, dans lequel Ant Group a investi de manière agressive.

Le parti tente de réglementer les Fintech

Les régulateurs chinois "tentent de garder le contrôle sur un secteur fintech déjà énorme, rentable et en évolution rapide", a commenté auprès de l'AFP Brock Silvers, directeur des investissements chez Kaiyuan Capital.

"En l'absence d'une réglementation établie, les régulateurs ont peut-être été, de manière compréhensible, soucieux de s'impliquer", a-t-il poursuivi.

Ma, l'un des plus puissants milliardaires chinois, a été la cible des critiques des médias d'Etat, après un discours fin octobre à Shanghai dans lequel il a semblé accuser les régulateurs de brider l'innovation des fintech, et s'est vanté du record boursier qu'Ant s'apprêtait à battre, après celui d'Alibaba à Wall Street en 2015 (25 milliards de dollars).

Dimanche, le Financial News, contrôlé par l'État, s'est inquiété que les géants de l'Internet comme Ant Group deviennent trop gros, mettant en garde contre une éventuelle "grave contagion des risques".

Pour autant, Pékin encourage ses fleurons technologiques à se coter sur les places boursières nationales, plutôt qu'à l'étranger, dans un contexte de rivalité économique et politique acérée avec les Etats-Unis.

Lire aussi : Fintech : la crise du coronavirus vient stopper net les investissements mondiaux

Commentaire 1
à écrit le 04/11/2020 à 8:42
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Oui les multinationales chinoises sont impressionnantes mais comment croire à un minimum d'indépendance dans leur stratégie vis à vis du pouvoir chinois ?

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