Sucre, beurre, papier...l'hyperinflation menace en Russie, le Kremlin dément toute pénurie

Alors que la situation se tend chaque jour en Russie dans les supermarchés, l'administration de Vladimir Poutine assure pouvoir assurer l'approvisionnement. Le Kremlin compare la situation à celle rencontrée pendant le Covid-19. En Russie, l'inflation a atteint +12,54% en mars, son plus haut depuis la fin 2015.
« C'est pareil pour le prix du beurre, 1.000 roubles (8,69 euros) pour 1 kg » (Photo Yuri Kobylinskiy)
« C'est pareil pour le prix du beurre, 1.000 roubles (8,69 euros) pour 1 kg » (Photo Yuri Kobylinskiy) (Crédits : dr)

« Nous sommes entièrement autosuffisants en sucre et en sarrasin », a assuré la vice-Première ministre russe Viktoria Abramtchenko lundi. Le ton choisi est le même que celui utilisé par Vladimir Poutine quelques jours plus tôt, assurant que « tout se passe comme prévu » suite à l'invasion de l'Ukraine le 24 février. Mais le Kremlin est aussi soucieux de remporter la guerre d'images. Face à la déferlante de vidéos sur les réseaux sociaux montrant des personnes dévalisant les étagères des supermarchés en Russie, Moscou a donc réagi. Selon la vice-Première ministre, "le complexe agro-industriel russe approvisionne totalement le pays en denrées alimentaires de base" et il n'y a pas de risque de "pénuries alimentaires sous la pression des sanctions".

Malgré les sanctions des Occidentaux - qui s'abattent principalement sur le secteur financier russe - le Kremlin compare la période à celle rencontrée lors du Covid-19 : « comme en 2020 (...) la première vague de la pandémie, nous avons constaté une ruée sur le sucre et la gretchka. » « Nous sommes totalement approvisionnés en semences russes des principales cultures céréalières », a-t-elle encore dit lors d'une réunion gouvernementale, selon les agences de presse russes.

Les hausses des prix pour les Russes

Mais au-delà de ces effets de pénuries, que certains magasins affichent désormais avec des pancartes telles "il n'y a plus de sucre", c'est l'hyperinflation sur certains produits qui se confirme dans un pays qui compte 144 millions d'habitants. A cela s'ajoute une forte dévaluation du rouble.

En Russie, l'inflation a atteint +12,54% en mars (contre +10,4% en février), soit son plus haut depuis la fin 2015, selon le ministère de l'économie.

Pour la contrer, la banque centrale russe avait doublé son taux directeur, le portant à 20%, afin de limiter l'envolée de l'inflation. La Banque a aussi imposé des mesures drastiques sur l'achat de devises pour freiner la chute de la devise et maintient la Bourse de Moscou fermée pour éviter de la voir s'écrouler. Mais la moitié de ses réserves, environ 300 milliards de dollars, ont été gelées dans le cadre des sanctions.

Résultat, des mesures de rationnement de certains produits, dont le sucre, ont aussi été mises en place par certains supermarchés, tandis que les prix ont bondi après avoir connu déjà une forte inflation depuis le début de la pandémie.

« Au supermarché Magnit, quand vous venez le soir, il n'y a déjà plus de sucre. Le prix du kilogramme de sucre est passé de 30 roubles (0,26 euro), à 50 roubles (0,44 euro), puis 73 roubles le kg (0,64 euro). Dans certains endroits, il est à 100 roubles (0,87 euro). Les prix ont fait plus que doubler », raconte à La Tribune un habitant de la région de Moscou.

« C'est pareil pour le prix du beurre, 1.000 roubles (8,69 euros) pour 1 kg. J'ai pu en trouver à un bon prix, en passant par des connaissances qui ont accès directement à la vente au prix de sortie d'usine. »

Côté alimentaire, des tensions ont été observées sur le sarrasin dans le pays. Les graines de sarrasin sont souvent utilisées en bouillie, la "gretchka" populaire en temps de crise en Russie et en Ukraine.

Puces électroniques, papier, vers un marché noir ?

Ces pénuries concernent d'autres produits. Alors que les fournisseurs de composants occidentaux, dont Etats-Unis et Taïwan (Samsung, Intel, AMD) ont annoncé cesser leurs livraisons, c'est toute l'industrie de l'électronique  et ses infrastructures qui sont menacées, rapportait le journal russe Kommersant. Les datacenters sont ainsi touchés mais aussi la main d'oeuvre spécialisée dans l'informatique qui aurait choisi de quitter la Russie. Avec l'embargo de Samsung et de Apple, c'est aussi la pénurie sur les smartphones qui se dessine.

De même, le prix du papier s'envole en Russie. « Dans toute la Russie, les acheteurs se plaignent en masse d'une pénurie de papier de bureau dans les magasins. Là où l'offre est disponible, les prix ont été multipliés par quatre en moyenne », rapporte la chaîne russe RTVI.

Toutes ces pénuries pourraient favoriser l'émergence d'un marché noir.

Pour freiner l'inflation, la Russie peut décider de plafonner les prix d'une vingtaine d'aliments de base: viande, poisson, lait, farine, sucre, huile, céréales, beurre, riz, pain, choux, carottes, oignons et pommes de terre. Jusqu'ici, le gouvernement n'a pas pris de mesures en ce sens.

Au final, la Russie traverse la plus importante crise économique depuis 1991 et la chute de l'Union soviétique.

Lire aussi 4 mnSanctions contre la Russie: l'Australie interdit les exportations d'alumine et de bauxite

(Avec AFP)

Commentaires 3
à écrit le 21/03/2022 à 21:04
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Des kilomètres de linéaires vides, comme au bon vieux temps de l'URSS dont rêve Poutine. Sauf que les Russes d'aujourd'hui ne sont pas ceux d'hier, ils ont goûté aux produits du capitalisme et je ne pense pas qu'ils vont y renoncer facilement et rapi...

le 22/03/2022 à 8:13
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mon cher Valbel89 j'ai bien peur que vous ne vous trompiez. Un bon Russe ça ferme sa gueule et se serre la ceinture au nom de la patrie. Les mauvais russes, il n'y en a plus, soit ils émigrent, soit ils sont en prison.

le 22/03/2022 à 8:41
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@dupont la joie : si je résume, en Russie, aucune liberté de penser et d'avoir une opinion différente du pouvoir en place. Drôle de notion du bien et du mal, et parfait exemple de la négation de l'autre. Mais c'est une spécialité au Kremlin depuis ...

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