![En Turquie, la Banque centrale a augmenté ses taux directeurs de 2,5 points. Une hausse attendue mais pas à la hauteur de certaines espérances.](https://static.latribune.fr/full_width/2180428/le-president-turc-tayyip-erdogan-a-ankara-en-turquie.jpg)
La Turquie poursuit sa lancée. Ce jeudi, la Banque centrale turque a relevé ses taux directeurs de 2,5 points. C'est la deuxième hausse des taux turcs depuis deux ans : ces derniers s'établissent désormais à 17,5%. Cette augmentation s'inscrit dans la continuité de la politique de resserrement monétaire, récemment mise en place par le gouvernement turc malgré les réticences du président Erdogan.
Pour tenter d'endiguer l'inflation, la Banque centrale turque a déjà relevé fin juin son taux directeur de 8,5% à 15%, abandonnant pour la première fois en deux ans les mesures économiques non-conventionnelles défendues par le président Erdogan. Une décision visant à « un resserrement monétaire afin d'établir au plus tôt le cours de la désinflation », avait indiqué l'institution monétaire, ajoutant que « le resserrement monétaire sera renforcé autant que nécessaire, de manière opportune et progressive jusqu'à ce qu'une amélioration significative des perspectives d'inflation soit obtenue ».
Un relèvement limité et « insuffisant »
Toutefois, cette hausse des taux est moins élevée que ce qu'attendaient les investisseurs. Cela laisse à penser que le président turc garde une certaine main mise sur la politique économique du pays et ne laisse pas complètement la nouvelle gouverneure de la banque centrale, Hafize Gaye Erkan, et le ministre de l'Économie Mehmet Simsek œuvrer comme bon leur semble.
« Terrible décision », estime Timothy Ash, économiste de BlueBay Asset Management, qui considère qu'elle donne raison aux observateurs selon lesquels le ministre et la gouverneure « n'ont pas de vrai mandat pour mener à bien un resserrement de la politique monétaire ». « Un taux à 17,5% lorsque l'inflation est autour de 40% et tend à la hausse est insuffisant », affirme l'économiste, pour qui « la livre va être mise à rude épreuve ».
Inflation et cours de la livre turque
Si le chef de l'Etat consent pour l'heure à se détourner de sa politique monétaire hétérodoxe et accepte de monter les taux, c'est pour lutter contre une inflation galopante qui avoisine les 40% et sortir son pays de la crise économique.
L'inflation en Turquie a ralenti en juin à 38,2% sur un an, son plus bas niveau en dix-huit mois, mais les observateurs s'attendent à un possible rebond en juillet sous l'effet de la chute de la livre turque, qui a perdu le quart de sa valeur face au dollar depuis fin mai. Ce jeudi en début d'après-midi, elle s'échangeait à près de 27 livres pour un dollar.
Après les élections, le gouvernement turc a réduit son dispositif de défense de la livre turque, artificiellement soutenue des mois durant par des ventes massives de devises pour lui éviter de dévisser.
Des contrats signés avec des pays du Golfe
La récente hausse des taux intervient au lendemain d'une tournée du président turc dans plusieurs pays du Golfe où il a signé des accords estimés par certains analystes à 100 milliards de dollars. Il s'est ainsi rendu en Arabie Saoudite, au Qatar et aux Emirats arabes unis, dernière étape de sa tournée, où il a signé des accords estimés à plus de 50 milliards de dollars, selon les médias d'Etat émiratis.
Mercredi 19 juillet, l'annonce de ces accords avait permis à la livre turque de reprendre quelques couleurs face au dollar, mais la monnaie turque a perdu de nouveau aussitôt du terrain jeudi.
« La banque centrale turque a une fois de plus aujourd'hui déçu les attentes (...) Il existe maintenant un risque plus évident pour que le changement de politique [monétaire] échoue et que la livre subisse une pression à la baisse beaucoup plus forte », juge Liam Peach, du cabinet Capital Economics.
En parallèle de la lutte contre l'inflation, Recep Tayyip Erdogan doit aussi s'atteler à la reconstruction des zones touchées par le double séisme survenu le 6 février dans le sud-est du pays et qui a causé la mort d'au moins 50.000 personnes et fait plus de trois millions de déplacés. Le président turc a promis de reconstruire au plus vite 650.000 logements dans les provinces affectées. Selon le chef de l'Etat et l'ONU, le coût total des dégâts du désastre s'élève à plus de 100 milliards de dollars.Reconstruction après le double séisme meurtrier
(Avec AFP)
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