A Bruxelles, une journée très particulière

La capitale européenne s'est réveillée sonnée par le résultat du référendum britannique. Son personnel politique sait déjà qu'une longue bataille l'attend pour sauver l'intégration européenne.
« Nous sommes déterminés à garder notre unité à 27 », a affirmé Donald Tusk (à droite), vendredi, accompagné du président de la Commission Jean-Claude Juncker (au centre) et du président du parlement Martin Schulz (à gauche).

On savait que la journée du 24 juin commencerait tôt, mais pas comme çà. « Je suis allé me coucher en pensant que c'était bon », explique une haut fonctionnaire qui misait, comme la grande majorité du personnel politique de la capitale européenne, sur une courte victoire du « Remain ». Les derniers sondages relayés par l'incontournable site « Politico » plaçaient le camp emmené par le premier ministre David Cameron largement en tête avec 6 points d'avance. L'hypothèse du Brexit avait beau avoir été envisagée, les subtilités de l' "article 50", qui decrit la procédure à suivre pour le divorce, été retournées dans tous les sens, une chape de plomb n'en semblait pas moins être tombée sur Bruxelles vendredi matin. « Il n'y a pas moyen de prévoir toutes les conséquences politiques », expliquera le président du Conseil Donald Tusk dans la matinée.

Surpris par la victoire de son propre camp

A 7 heures du matin, le député conservateur britannique Sayed Kamall, qui ouvrait le bal des conférences de presse dans le lobby de l'hôtel Thon, semblait surpris, peut-être plus encore embarrassé, par la victoire de son propre camp. « Le plus important est de respecter le vote des électeurs britanniques et ensuite on trouvera un accord dans l'intérêt de l'Union européenne et du Royaume-Uni », a-t-il expliqué devant les caméras. Ce proche de Cameron avait rejoint en mars seulement le camp du « Leave » à cause de la politique d'immigration européenne mais après force hésitations, comme il l'avoua à l'époque.

Aux côtés de l'élu tory, deux députés allemands, transfuges du parti anti-euro et anti-immigration allemand AfD, profitaient de la présence d'innombrables caméras pour dérouler devant les caméras leur rêve d'une « autre Europe ». « Je ne suis pas pour la sortie de l'Allemagne car je pense qu'alors l'Union européenne s'effondrerait », expliquait sans ciller Bernd Lücke qui milite pour la sortie de la Grèce et du Portugal de la zone euro. C'est cette alliance improbable entre les partisans d'une "autre Europe" indéfinie qui fait peur aux dirigeants européens. Et la question qui est dans toutes les têtes est la suivante : la tâche d'huile du nationalisme britannique va-t-elle s'étendre sur le Continent et menacer  tout le projet d'intégration européenne?

Un message quasiment identique

Selon une scénographie bien huilée, mais non dépourvue d'émotions, les « trois présidents » ont déroulé face à cette peur un message quasiment identique : « Nous sommes déterminés à garder notre unité à 27 », a expliqué Donald Tusk. Mais ni le président de la Commission Jean-Claude Juncker, ni le président du parlement Martin Schulz ni Donald Tusk ne se livreront au laborieux exercice des questions-réponses plus de quelques minutes. Si bien qu'à 14 heures, l'« incident » du 23 juin n'était certes pas clos mais la routine reprenait lentement ses droits. On était passé à l'« après ».

Cameron veut faire traîner

La semaine prochaine, pour la première fois, les « ex-Vingt-Huit » redevenus Vingt-Sept, se retrouveront informellement en marge du Conseil européen des 28 et 29 juin. Et déjà une première bataille se profile. David Cameron veut faire traîner jusqu'au congrès de son parti la notification de la sortie de son pays qui permettra de lancer les négociations dont la durée est limitée à deux ans. Pour le Premier ministre, c'est autant de temps pour tenter de se refaire politiquement et inventer une stratégie de négociation avec les Européens qui pour l'instant n'existe pas. C'est aussi une manière de conserver l'avantage mais aussi de prolonger la période d'incertitude qui s'ouvre. Ses pairs, chefs d'Etat et de gouvernement, lui laisseront-ils le choix ?

« J'attends du moteur franco-allemand des prises de position très claires. Je voudrais que tout le monde soit clair sur le fait que le processus d'incertitude dans lequel nous sommes entrés ne dure pas trop longtemps. Il faut accélérer les choses », avait expliqué autour de midi le président de la Commission européenne.

Pour les dirigeants du trio institutionnel européen, la priorité est maintenant de ressouder les vingt-sept membres restant, de ne pas laisser les dirigeants des autres pays européens, travaillés chez eux par des courants populistes, faiblir devant le bluff de David Cameron qui cherchera à gagner du temps, et laisser croire qu'un référendum peut être anodin et une sortie indolore. Autant dire qu'avec la série d'élections qui nous sépare de 2018, ils se préparent à passer deux années éprouvantes.

Commentaires 6
à écrit le 25/06/2016 à 9:11
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L'UE est dirigé par des technocrates (souvent des politiciens dans leur pays et non réélus) qui sont très loin des préoccupations et des problèmes des citoyens et qui était incapable de diriger leur pays et encore moins l'UE. C'est le dernier moment ...

le 26/06/2016 à 21:14
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"l'appareil administratif surdimensionné à Bruxelles" j'imagine que si on fait la règle de trois pour 500 millions d'habitants, on arrive à peu par personne, vs ce qu'on a chez nous, en particulier. Heureusement que c'est en plus des fonctions dans c...

à écrit le 25/06/2016 à 7:01
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La fête est finie , c'est la gueule de bois ,songer à faire les valises.

à écrit le 24/06/2016 à 22:57
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Les pseudo-maitres du monde se réveillent avec la gueule de bois de ceux qui se sont crus décideurs alors qu'ils n'ont jamais rien été d'autre que des commis..

à écrit le 24/06/2016 à 19:29
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ils vont défendre bec et ongles leurs privilèges ; les grandes manœuvres sont en marche

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