Crise de la dette ou inflation ? La BCE confrontée à un rude débat avant sa dernière remontée des taux

Un compte-rendu de la réunion de la BCE montre à quel point la décision de relever les taux en septembre dernier a été difficile. Certains participants ont même ravivé l'erreur de 2011, commise par le dirigeant de l'institution d'alors, le banquier central français Jean-Claude Trichet.
En septembre, les gardiens de l'euro ont décidé à une « solide majorité » de relever les taux d'intérêt à 4,5%, son plus haut niveau depuis 1999.
En septembre, les gardiens de l'euro ont décidé à une « solide majorité » de relever les taux d'intérêt à 4,5%, son plus haut niveau depuis 1999. (Crédits : Kai Pfaffenbach)

« Une décision difficile » face à un contexte économique incertain. Telles sont les conditions dans lesquelles la Banque centrale européenne a décidé de relever son taux directeur le 14 septembre dernier. Des coulisses décrites dans un compte-rendu de réunion de la BCE publié ce jeudi, et consulté par l'AFP. D'après celui-ci, le choix d'augmenter les taux ou faire une pause était assujetti à « des considérations tactiques » aux impacts multiples.

Lors de cette réunion, les gardiens de l'euro ont décidé à une « solide majorité » de relever les taux d'intérêt à 4,5%, son plus haut niveau depuis 1999. Depuis juillet 2022, c'est la dixième fois d'affilée que l'institution de Francfort effectue ce geste. Ce, dans un contexte d'inflation en baisse en zone euro mais encore appelée à durer.

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D'après le document, les partisans d'une pause ont, durant cette réunion, donné de la voix, arguant notamment qu'une nouvelle hausse des taux « risquait de répéter la situation qui s'était produite en 2011 », lorsque des hausses avaient dû être « rapidement inversées », au début de la crise de la dette souveraine.

Choix cornélien

D'après ce compte-rendu de réunion, la BCE a donc dû se « donner le temps d'évaluer l'impact des décisions précédentes » sur l'activité et les prix. Elle devait aussi « prendre en compte les coûts économiques et sociaux d'un éventuel atterrissage brutal ». La hausse a finalement été approuvée au motif que l'annonce d'une pause aurait pu signifier que la banque centrale était « plus préoccupée par l'économie et une potentielle récession que par une inflation trop élevée », selon la majorité des personnes présentes.

Le spectre de l'erreur de 2011

Durant la réunion de septembre, les opposants au relèvement des taux ont ravivé le souvenir de 2011, année où le président de la BCE d'alors, Jean-Claude Trichet, banquier central français et partisan de l'orthodoxie monétaire, avait décidé de relever deux fois les taux. Ce, alors qu'une crise économique était alors en gestation. Un choix considéré comme une erreur par la plupart des observateurs économiques de l'époque, alors que la BCE était dans sa 25è année d'existence.

Son successeur Mario Draghi avait dû corriger le tir dès son arrivée en novembre de la même année, gagnant plus tard des lauriers de « Super Mario ». Les opposants de septembre 2023 à un relèvement des taux ont aussi fait valoir que 4,25 points de pourcentage de hausses depuis juillet 2022 faisaient la « démonstration suffisante » de la détermination de la BCE à ramener l'inflation à la cible de 2%.

Une inflation en zone euro au plus bas depuis deux ans

En septembre, l'inflation en zone euro a été mesurée à 4,3%, au plus bas en deux ans. Selon de nombreux experts, ce succès pourrait encourager la BCE à ne pas relever ses taux lors de sa réunion à venir le 26 octobre.

Au mois d'août, l'inflation en zone euro (qui compte 20 pays membres) était de 5,2%. Ces chiffres étaient respectivement de 6,1 % et 5,3 % au mois de juillet 2023. Bien qu'en baisse depuis le début de l'année, les taux d'inflation demeurent inédits depuis les débuts de l'euro en 2002. D'après Eurostat, ceux-ci sont portés par la hausse des prix de l'alimentation, de l'alcool et du tabac, avec un taux annuel de 9,7 %, ou encore des services (5,5 % en août 2023 par rapport à août 2022).

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L'inflation a commencé à s'installer en Europe suite au pic de la crise sanitaire en 2020 et au déclenchement de al guerre en Ukraine en février 2022. Pour atténuer la flambée de prix, les gouverneurs de la BCE ont décidé de relever les taux directeurs à plusieurs reprises depuis juillet 2022. Ces derniers n'avaient pas été augmentés depuis les années 2010.

(Avec AFP)

Commentaires 4
à écrit le 13/10/2023 à 8:23
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Allons, un peu de fraternité, n'accablez pas Jean-Claude...

à écrit le 13/10/2023 à 8:07
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La dette n'est qu'un outil de nos oligarchies afin de donner nos pays aux banquiers, ça ne sert donc à rien de la ménager, alors soit on l'annule soit on l'exploite puisque si jamais on en refusait le remboursement les banquiers se mettraient à saign...

à écrit le 12/10/2023 à 21:22
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Nul besoin de ces justifications, le mandat de la BCE (ses objectifs) est clair. Et le mandat de la Fed aussi (ses objectifs) - bien que quelque peu différent, puisqu'il intègre la composante du "plein emploi". La BCE ne peut donc ignorer la véritabl...

à écrit le 12/10/2023 à 19:17
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On paye actuellement les pots cassés de la fuite en avant de la BCE en 2020 et 2021, menée sous le prétexte fallacieux de la Covid-19

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