Hausse des taux : la BCE refuse de baisser la garde, l'inflation est encore trop forte

La hausse de 25 points de base de la BCE est justifiée par la persistance d'une inflation élevée, alors que la croissance économique de la zone euro ralentit de plus en plus. Prudente, la présidente de l'institution monétaire s'est bien gardé d'affirmer qu'il s'agissait du dernier relèvement, renvoyant toute décision future à l'évolution de la situation économique.
Robert Jules
Christine Lagarde, lors de sa conférence de presse, ce jeudi.
Christine Lagarde, lors de sa conférence de presse, ce jeudi. (Crédits : Reuters)

La Banque centrale européenne (BCE) s'est finalement résolue jeudi à relever, pour la dixième fois consécutive, ses taux directeurs, de 0,25 point. À compter du 20 septembre, les taux d'intérêt des opérations principales de refinancement, de la facilité de prêt marginal et de la facilité de dépôt seront relevés à respectivement 4,5%, 4,75% et 4%, atteignant leurs plus hauts niveaux depuis la création de la monnaie unique en 1999.

La crédibilité de la BCE repose sur le retour à 2%

Si Christine Lagarde dans sa conférence de presse s'est bien gardé de parler d'un pic, et d'une future baisse, elle a laissé entrevoir qu'en revanche, ils pourraient rester à ce niveau suffisamment longtemps, avec l'objectif du retour d'une inflation à 2%, synonyme de stabilité des prix, sur lequel repose « la crédibilité de la BCE ».

« Il s'agira probablement de la dernière étape en matière de taux d'intérêt. L'économie de la zone euro s'affaiblit déjà suffisamment pour rendre très improbable une nouvelle hausse de l'inflation. Ce n'est que dans le cas, peu probable, où les taux d'inflation deviendraient vraiment incontrôlables et dépasseraient les prévisions d'inflation déjà très élevées de la BCE que cette dernière prendrait une nouvelle mesure de hausse », assure Martin Moryson, chef économiste Europe, chez DWS.

Un scénario qui n'est pas toutefois à exclure. « Là où le consensus semble vouloir croire à la possible fin du cycle de hausses des taux, discours déjà entendu lors de la réunion précédente, un scénario alternatif et moins réjouissant reste possible : l'inflation surprend par sa vigueur et sa résilience et paraît décidément structurelle », considère Raphaël Thuin, directeur des stratégies de marchés de capitaux chez Tikehau Capital.

En effet, au regard des données, l'inflation a certes baissé sur un an, mais elle reste durablement élevée. Selon les données révisées de la BCE, elle est prévue d'atteindre 5,6% en 2023, 3,2% en 2024 contre 3% initialement prévu reflétant « une trajectoire plus élevée des prix de l'énergie », a précisé Christine Lagarde. En 2025, elle s'établirait à 2,1%.

Le choix d'une « solide majorité »

Si la présidente de l'institution a révélé que certains gouverneurs auraient préféré maintenir les taux inchangés pour ne pas peser sur la croissance économique, une « solide majorité » d'entre eux a approuvé le choix de relever les taux. « Il aurait été très difficile pour la BCE de faire comprendre au marché qu'une éventuelle pause n'aurait pas été un pic », remarque Fabio Balboni, économiste, chez HSBC Global Research.

En effet si la BCE précise dans son communiqué qu'elle « considère que les taux d'intérêt directeurs ont atteint des niveaux qui, maintenus pendant une durée suffisamment longue, apporteront une contribution substantielle » au retour vers l'objectif des 2%, néanmoins, prudente, la présidente de la BCE s'est bien gardée d'exclure d'éventuelles nouvelles hausses des taux, se laissant ainsi une marge de manœuvre en fonction de l'évolution de la situation. « Nous ne disons pas que nous sommes actuellement au plus haut des taux d'intérêt », a-t-elle déclaré.

« Nous prévoyons que l'inflation restera suffisamment élevée pour que la BCE ne la réduise pas avant une bonne partie de l'année 2024, dans un contexte de tensions sur le marché du travail et de productivité morose », abonde Ann-Katrin Petersen, stratégiste au BlackRock Investment Institute.

Outre la BCE, les banques centrales du continent européen affrontent le dilemme d'une faible croissance économique conjuguée à une inflation toujours élevée. C'est d'ailleurs là le problème. La BCE poursuit ses hausses de taux pour refroidir l'économie en pesant sur la demande de biens et de services ainsi que sur celle du crédit des entreprises et des ménages. « Pour que l'inflation se normalise pleinement et revienne à l'objectif de 2 %, un nouveau ralentissement de l'économie et une certaine faiblesse du marché du travail sont probablement nécessaires », considère Konstantin Veit, gérant de portefeuille chez Pimco.

Selon les nouvelles projections de l'institution monétaire, la croissance dans la zone euro est révisée à la baisse, de 0,9% à 0,7% pour 2023, de 1,5% à 1% pour 2024 et de 1,6% à 1,5% pour 2025.

Le retour du pétrole cher

Les récents indicateurs montrent en effet que la situation ne va pas s'améliorer dans les prochains mois, avec le recul de la production industrielle et le début d'un affaiblissement du secteur des services dans la zone euro, à l'image du recul de l'activité de l'Allemagne, la plus grande économie de l'Union européenne. Parallèlement, la récente hausse des prix du pétrole contrecarre la baisse de l'inflation dans la mauvaise direction, avec un baril de Brent qui a gagné plus de 11% en un mois évoluant au-dessus de 93 dollars.

Il reste encore difficile de déterminer si l'inflation baisse aujourd'hui sous l'effet de la politique monétaire ou du reflux de certains prix, par exemple celui du gaz naturel qui est en baisse de près de 84% sur un an, sur le marché européen. Avec le risque que la confiance des marchés dans la capacité de la BCE à atteindre ses objectifs s'érode progressivement.

Mais ce n'était pas le cas ce jeudi. Les investisseurs ont accueilli la décision de la BCE avec un certain optimisme, l'indice Stoxx 600 gagnant 1,6%. Mais il est vrai aussi que les marchés financiers nous ont habitué à digérer les nouvelles hausses de taux en deux temps.

Robert Jules
Commentaires 12
à écrit le 15/09/2023 à 10:21
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LAGARDE mourra plutôt que de se rendre.

le 15/09/2023 à 12:10
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Si la hausse des taux n'est pas favorable aux emprunteurs elle est favorable aux épargants.

à écrit le 15/09/2023 à 8:10
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Ben si les décisions de la bce passent par le gars que je connais qui y bosse et bien ça m'étonne pas ! LOL Des comptables ça fait certainement pas des dirigeants le problème c'est que la finance leur fait croire ça.

à écrit le 15/09/2023 à 7:38
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Ce n'est pas cette hausse des taux qui va augmenter la production de pétrole et d'électricité. Sans la hausse du prix de l'énergie, l'inflation ne serait que de 2%. Mesure inutile donc !

à écrit le 15/09/2023 à 2:31
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La bce serait credible ?, la bonne blague.

à écrit le 14/09/2023 à 20:36
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Cela fait bien longtemps qu'il n'y a plus de croissance en France , remplacé par de la dette et la planche à billets.

à écrit le 14/09/2023 à 19:49
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Bonjour, Vue que les salaires n'augmentes pas , ils faut reduire l'inflation... si non beintot nous ne pourrons plus travailler et manger un minimums. Certains ons perdu la tête pour un peux de pain... A ne pas l'oublier...

le 14/09/2023 à 22:26
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Ça ça risque pas de vous arriver.. vu que ce sont les actifs actuels qui payent votre retraite rogger.. alors s eux mêmes n’auront ni le même âge de départ à la retraite, ni niveau de prestation financière servie ni la même carrière lineaire … bref ...

le 14/09/2023 à 22:26
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Ça ça risque pas de vous arriver.. vu que ce sont les actifs actuels qui payent votre retraite rogger.. alors s eux mêmes n’auront ni le même âge de départ à la retraite, ni niveau de prestation financière servie ni la même carrière lineaire … bref ...

le 15/09/2023 à 12:09
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Les salaires ont augmenté de 4.5 % en 2023 et on prévoit 4 % en 2024. Vous avez la solution pour diminuer l'inflation ?

le 15/09/2023 à 12:10
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Les salaires ont augmenté de 4.5 % en 2023 et on prévoit 4 % en 2024. Vous avez la solution pour diminuer l'inflation ? ` `

à écrit le 14/09/2023 à 19:39
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Ça alors !!! Au moins ils voient qu'il y a un deuxième tour salarial donc c'est pas gagné !!! Quand on a fait n'importe quoi pendant 15 ans quoi qu'il en coûte, c'est illusoire de penser regler le pb en 5mn

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