
Les économies développées reverront-elles, un jour, une situation de taux bas et de crédits abordables ? Rien n'est moins sûr. L'avenir ne semble pas se montrer clément, selon le discours officiel de la Banque centrale européenne (BCE).
Lors d'une conférence de presse la semaine dernière à Saint-Jacques-De-Compostelle, en Espagne, Christine Lagarde, sa présidente a souligné qu'une éventuelle baisse des taux n'était pas en débat au sein de l'institution. Une prévision partagée par 70 économistes interrogés par Reuters entre le 15 et le 18 septembre. Près de 60% d'eux, soit 41, ne prévoient pas d'assouplissement monétaire avant au moins juillet 2024 et la médiane des réponses montre qu'une baisse de 75 points de base des taux pourrait intervenir seulement à partir du second semestre de l'année prochaine.
Pour rappel, lors de sa réunion du 14 septembre, Christine Lagarde, la présidente de la BCE a décidé de relever ses taux directeurs de 0,25 point de pourcentage, soit la dixième hausse en moins d'un an. Ainsi, à compter du 20 septembre, les taux d'intérêt des opérations principales de refinancement, de la facilité de prêt marginal et de la facilité de dépôt seront relevés à respectivement 4,5%, 4,75% et 4%, atteignant leurs plus hauts niveaux depuis la création de la monnaie unique en 1999.
L'objectif est encore et toujours de durcir l'accès au crédit pour ralentir l'inflation, à 5,2% en août sur un an, quand la BCE s'est fixée un objectif à 2%.
Les économistes parient sur un maintien des taux ces prochains mois
Mais alors que le resserrement monétaire commence à se faire ressentir sur la dynamique des prix, une incertitude demeure sur les prochaines réunions de la gardienne de la monnaie. Toujours selon les économistes interrogés par Reuters, les responsables de la BCE en auraient terminé avec les augmentations de taux et le taux de dépôt actuel de 4,00% devrait rester à ce niveau jusqu'à la fin de l'année.
« Il faudra probablement un certain temps avant que la BCE ne le présente comme tel, mais 4,00% sera probablement le taux terminal, selon nous », a déclaré Mark Wall, chef économiste chez Deutsche Bank.
La probabilité d'au moins une nouvelle hausse des taux d'intérêt cette année est évaluée à seulement 20%, selon la médiane des réponses de 32 économistes sondés. L'analyse du marché des contrats à terme sur les taux d'intérêt montre, quant à elle, que la probabilité d'une nouvelle hausse des taux d'ici la fin de l'année est d'environ 25%.
Mutisme de la BCE sur les prochaines réunions
Les économistes semblent presque certains du scénario de maintien des taux, mais la BCE ne laisse présager aucune préférence. « Nous ne disons pas que nous sommes actuellement au plus haut des taux d'intérêt », a notamment déclaré Christine Lagarde le 14 septembre, estimant néanmoins « que les taux d'intérêt directeurs ont atteint des niveaux qui, maintenus pendant une durée suffisamment longue, apporteront une contribution substantielle » au retour vers l'objectif des 2%. Néanmoins, « les futures décisions du Conseil des gouverneurs feront en sorte que les taux d'intérêt directeurs de la BCE soient fixés à des niveaux suffisamment restrictifs, aussi longtemps que nécessaire »
Lundi 18 septembre, ce fut au tour de Peter Kazimir, le gouverneur de la Banque de Slovaquie de renchérir sur la possibilité d'une nouvelle hausse de taux.
« Seules les prévisions de mars peuvent confirmer que nous nous dirigeons sans équivoque et progressivement vers notre objectif d'inflation », a-t-il déclaré dans une tribune, avant d'ajouter « c'est la raison pour laquelle je ne peux pas exclure actuellement la possibilité de nouvelles hausses de taux. »
Un jeu de poker menteur, qui n'inquiète cependant pas beaucoup les analystes. « La présidente (de la BCE) (Christine) Lagarde n'a apparemment pas voulu dire que les taux avaient atteint leur maximum (...) Cependant, les embûches pour (contrer) une nouvelle hausse semblent relativement élevées », relève Mark Wall.
« Une nouvelle hausse n'est pas notre scénario de base, mais il existe un risque raisonnable qu'une hausse se matérialise si la croissance des salaires et l'inflation restent fortes jusqu'en décembre », admet cependant Bas van Geffen, stratège macroéconomique chez Rabobank.
Les taux devraient donc se maintenir selon les analystes, à condition que le contexte économique s'y prête.
De son côté, la Réserve fédérale américaine (Fed) se montre plus transparente sur sa politique à venir. La Banque centrale américaine devrait maintenir ses taux dans la fourchette actuelle, de 5,25 à 5,50% lors des « minutes » de la Fed, sa conférence mensuelle, qui doit avoir lieu ce mercredi soir. Les investisseurs en sont en tout cas convaincus à 99% selon l'indice FedWatch de CME Group. Et les traders, selon le même indice, n'évaluent qu'à 29% la probabilité d'une hausse à la fin octobre/début novembre.Aux USA, la politique monétaire est beaucoup plus claire
(Avec Reuters)
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