Greenwashing  : l'UE s'attaque aux étiquettes et publicités vertes trop « vagues ou trompeuses »

La Commission européenne présente ce mercredi son plan pour éliminer l'écoblanchiment des étiquettes et des publicités, avec des sanctions « dissuasives » pour les entreprises faisant des déclarations infondées. Sur 150 allégations vertes (emballages, publicités) examinées par la Commission en 2020, la moitié (53%) contenaient « des informations vagues, trompeuses ou non étayées ».
Pour des ONG, « Il n'existe pas de banane ou bouteille d'eau neutre en CO2, c'est de l'écoblanchiment pur et simple, un écran de fumée ».
Pour des ONG, « Il n'existe pas de banane ou bouteille d'eau neutre en CO2, c'est de l'écoblanchiment pur et simple, un écran de fumée ». (Crédits : Reuters)

« Zéro carbone », « à base de matériaux recyclés », « empreinte climatique réduite »... Dans sa proposition législative attendue à la mi-journée, qui sera ensuite négociée par les Etats membres et les eurodéputés, Bruxelles veut endiguer l'écoblanchiment des étiquettes et des publicités.

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Et pour cause, sur 150 allégations vertes (emballages, publicités) examinées par la Commission en 2020, la moitié (53%) contenaient « des informations vagues, trompeuses ou non étayées ». Textile, cosmétiques, électroménager... aucun secteur n'était épargné. De plus, l'examen de 232 « labels écologiques » européens a montré que la moitié étaient accordés avec des vérifications « faibles ou inexistantes ».

« Les consommateurs manquent d'informations fiables, ils sont confrontés à des pratiques commerciales trompeuses et au manque de transparence et de crédibilité des labels environnementaux », déplore l'exécutif européen dans un projet du texte consulté par l'AFP. Après avoir proposé en mars 2022 de bannir « les allégations environnementales génériques et vagues » (« produit vert », « éco-responsable »...), Bruxelles veut interdire toute affirmation qui ne serait pas soutenue par des bases factuelles et scientifiques, accessibles via QR code ou site internet.

«Réunir des preuves scientifiques  »

Le projet enjoint aux États de « veiller à ce que les allégations environnementales concernant des produits et entreprises soient justifiées sur la base d'une méthodologie » fondée « sur des preuves scientifiques reconnues », identifiant aussi les impacts environnementaux négatifs, et tenant globalement compte du « cycle de vie » (composants, usage, recyclage...). Les systèmes de certification environnementale seraient soumis aux mêmes critères, avec des règles de transparence, d'indépendance et de supervision.

Les Etats seraient tenus de faire contrôler le bien-fondé des allégations des entreprises par des « vérificateurs indépendants » accrédités, et, en cas d'infraction, d'infliger « des sanctions effectives, proportionnées et dissuasives ». Les nouvelles dispositions s'appliqueraient aux produits et services non couverts par d'autres textes européens à visée similaire - les investissements « verts » étant ainsi déjà réglementés par une « taxonomie » dévoilée fin 2021.

Les ONG saluent ce coup de vis, mais voudraient une méthodologue unique

L'objectif est salué par les ONG : « la prolifération du « greenwashing » empêche les consommateurs de faire des choix éclairés, et rend plus difficile pour les entreprises qui s'efforcent de réduire leur impact environnemental de se distinguer des resquilleurs », observe Blanca Morales, du Bureau européen de l'environnement (BEE). « Les consommateurs ne font pas confiance aux revendications environnementales, qu'ils ne comprennent pas », la proposition de Bruxelles « pourra les conduire à des modes d'achats plus durables », abonde Dimitri Vergne, du Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC).

Pour autant, alors qu'une méthode de référence (PEF) permet déjà de mesurer « l'empreinte environnementale » des produits, aucune méthodologie unique ne serait imposée aux entreprises qui disposeraient donc d'une marge de manœuvre. « Nous sommes inquiets d'une ouverture excessive », car « nous ne voulons pas que chaque entreprise développe dans son coin sa propre évaluation », ajoute Dimitri Vergne, appelant à « un cadre de gouvernance robuste impliquant la société civile ».

Il plaide aussi pour un traitement préférentiel des « labels très fiables » faisant autorité de longue date, comme l'Ecolabel officiel conçu par l'UE, « l'Ange bleu » allemand ou le « Nordic Swan » scandinave. Dans son projet, la Commission prévoit seulement d'obliger les entreprises se revendiquant « zéro carbone » à détailler clairement si elles achètent des crédits sur le marché du carbone ou plantent des arbres pour compenser leur propre impact environnemental. « Ces allégations trompent les consommateurs en suggérant que les produits ou services n'ont aucun impact climatique, une impossibilité scientifique », insiste le BEE, redoutant une « occasion manquée ».

« Pas de banane neutre en CO2 »

Pour le BEUC, c'est particulièrement vrai dans l'agro-alimentaire. « Il n'existe pas de banane ou bouteille d'eau neutre en CO2, c'est de l'écoblanchiment pur et simple, un écran de fumée (...) Planter des arbres mettant des décennies à pousser est beaucoup plus facile et moins cher, mais nettement moins efficace que de réduire ses émissions », s'indigne sa directrice générale Monique Goyens.

Pour Gilles Dufrasne, de l'ONG Carbon Market Watch, « certaines entreprises essaient vraiment de bien faire, et sont mal conseillées par tous les consultants qu'elles paient ». Il ajoute avoir tendance « à être moins compréhensif vis-à-vis des grandes multinationales parce qu'elles disposent des ressources pour faire correctement les choses » et estime que « la première chose, c'est d'interdire les affirmations sur la neutralité carbone ».

Le Royaume-Uni sévit

Début mars, le groupe Lufthansa a été rappelé à l'ordre par l'autorité britannique de la publicité (ASA) pour une réclame dans laquelle il affirmait « protéger le futur » de la planète, ce qui « donnait une impression trompeuse de l'impact environnemental » de la compagnie. « Nous avons considéré que cette affirmation était susceptible d'être comprise par les consommateurs comme signifiant que Lufthansa avait déjà pris des mesures d'atténuation importantes pour s'assurer que l'impact environnemental net de son activité n'était pas préjudiciable ». La publicité en cause montre un avion en vol vu de face, dont la moitié inférieure est remplacée par une image de la terre photographiée depuis l'espace, avec un lien vers un site internet et la mention : « Connecter le monde. Protéger son avenir. »

Par ailleurs, le géant britannique des supermarchés Tesco est visé par une procédure devant les autorités irlandaises de la concurrence et de la protection des consommateurs. En cause : l'affirmation que certains de ses sachets de thé sont « biodégradables ». La procédure a été engagée par des scientifiques de l'University College de Cork, après une étude scientifique ayant montré que ces sachets étaient intacts après avoir été enterrés 12 mois. Tesco s'est défendu estimant que « la méthode de décomposition des sachets utilisée dans l'étude ne reflète pas les conseils sur l'emballage », précisant que ce type de sachet de thé est un « compostable industriel » et n'est pas adapté à une décomposition « en bacs à compost ou en terre ».

(Avec AFP)

Commentaire 1
à écrit le 22/03/2023 à 15:20
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wow, comme c'est pathetique.......l'europe a ete construite sur les appros et la securite, puis sur la convergence d'economies; comme tout le monde , surtout la france, s'assied sur les regles en rigolant, vu que l'europe ne sert plus a rien, elle se...

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