Portugal : le président pourrait accepter un gouvernement de gauche

Le président portugais, Anibal Cavaco Silva a demandé des "clarifications formelles" au leader du PS Antonio Costa avant de le nommer Premier ministre. Ces garanties concernent notamment le respect des règles de la zone euro.
Antonio Costa, secrétaire général du PS portugais, pourrait devenir premier ministre.

Anibal Cavaco Silva, président de la République portugaise semble progressivement se rendre à l'évidence. Ce lundi 23 novembre, le secrétaire général du PS, Antonio Costa, est, pour, la quatrième fois depuis les élections du 4 octobre dernier, ressorti du palais de Belém à Lisbonne, siège de la présidence, sans avoir obtenu sa nomination de chef du gouvernement. Mais le président l'a chargé de « clarifier formellement » six points sur sa coalition avec les trois autres formations de gauche (communistes du PCP, bloc de gauche (BE) et écologistes du PEV) avant de pouvoir le charger officiellement de la direction d'un gouvernement.

Un président qui rechigne à nommer Antonio Costa

C'est une étape importante, car Anibal Cavaco Silva, ancien premier ministre conservateur, n'a jamais dissimulé ses réticences à accepter une coalition des gauches. Le 23 octobre dernier, il avait refusé de croire Antonio Costa lorsque celui-ci lui avait affirmé être en mesure de former un gouvernement. Il avait alors confirmé le premier ministre sortant de droite Pedro Passos Coelho qui avait été, finalement, renversé par une motion de défiance votée le 10 novembre au parlement par l'ensemble des partis de gauche, qui y sont majoritaire avec 122 sièges sur 230.

La tentation de l'immobilisme

Anibal Cavaco Silva ne peut dissoudre l'Assemblée de la République, car une élection présidentielle est prévue en janvier et la dissolution est interdite par la constitution six mois avant et six mois après cette élection. Mais le président avait, la semaine dernière, évoqué l'option d'une longue période de transition où Pedro Pessos Coelho aurait pu gérer les affaires courantes en attendant la prochaine élection présidentielle. Il avait en effet rappelé qu'en 1987, il avait mené un tel gouvernement pendant cinq mois. Mais cette stratégie eût enfoncé le pays dans une longue crise politique et dans une véritable paralysie. Le danger pour le Portugal aurait été considérable.

Les garanties demandées

Le président a donc dû reconnaître qu'il ne pouvait avancer dans cette voie et que, malgré sa déception, la droite portugaise devait abandonner le pouvoir. Mais auparavant, il entend prendre des garanties auprès d'Antonio Costa. Ces garanties lui permettent aussi de tenter une dernière manœuvre : provoquer une tension au sein de la gauche pour provoquer une cassure au sein de cette alliance. Anibal Cavaco Silva aura tout tenté pour éviter le scénario d'un gouvernement PS soutenu par la gauche radicale. Mais il joue là sa dernière carte.

Que demande le président de la république ? Ce sont les six garanties qui avaient aussi été demandées aux deux gouvernements de Pedro Passos Coelho. Antonio Costa devra s'engager à poser une question de confiance au parlement, à adopter un budget pour 2016, à « prendre des initiatives pour remplir les engagements découlant de la participation du Portugal à la zone euro », à demeurer dans l'OTAN, à assurer la stabilité du système financier et à garantir le rôle du Conseil (indépendant) de concertation social. Ces conditions peuvent faire grincer quelques dents au sein du PCP et du BE, mais ces deux partis ont déjà largement accepté ces conditions dans la mesure où Antonio Costa avait notamment placé comme condition à la formation d'un gouvernement de gauche, le respect des engagements budgétaires du pays.

Le président acceptera-t-il les garanties qui lui seront données ?

Antonio Costa devrait donc être en mesure de donner les garanties demandées. La question reste, en théorie, de savoir si Anibal Cavaco Silva les acceptera et les jugera suffisantes. Un refus est toujours possible, même s'il est vrai que la démarche présidentielle de ce 23 novembre semble clairement ouvrir la voie à la création d'un gouvernement Antonio Costa. Du reste, la droite semble avoir commencé à accepter d'entrer dans l'opposition. Pedro Passos Coelho a prévenu Antonio Costa que, s'il perdait le soutien de sa gauche, il ne devra pas compter sur la droite pour lui venir en aide. Autrement dit, le PS ne pourra gouverner qu'avec la gauche radicale. En attendant, Antonio Costa semble pouvoir espérer être nommé dans les jours qui viennent.

Gouvernement sous haute surveillance

La position du futur gouvernement ne sera pas aisée. Il sera sous la haute surveillance et la méfiance de la commission européenne, mais aussi de la BCE. Une seule agence de notation agréée par la BCE, le Canadien DBRS, note le Portugal en catégorie investissement, ce qui est une condition pour être intégré dans le programme de rachat de titres publics de la BCE. Si DBRS décide d'abaisser sa note, la BCE devra accorder une dérogation au Portugal. Sous condition, évidemment. C'est dire si la liberté de manœuvre d'Antonio Costa sera étroite. La gauche entend, dans son accord, entre autres en finir avec le gel des pensions et relever le salaire minimum.

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Commentaires 3
à écrit le 24/11/2015 à 10:40
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Je ne comprends pas ce Président qui en nommant Costa comme premier ministre le laisserait pendant au moins 2 mois s'enférer dans les contradictions gauchistes de ses partenaires et ce serait tout bénéfice pour l'élection d'un Président de centre-dro...

à écrit le 23/11/2015 à 18:57
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le pb n'est pas de connaitre la couleur politique d'un parti qui va acceder au pouvoir, le pb est de savoir s'ils vont respecter les regles du jeu ( ce qui pour un politicard veut dire ' avaler des couleuvres') meme tsipras a compris, bien qu'il ess...

à écrit le 23/11/2015 à 15:02
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On peut noter que les deux premières conditions (vote de confiance, vote Budget 2016), n'ont pas été demandées par le Président de la République au Gvt de droite Minoritaire. Deux poids et deux mesures ?

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