Régionales en Bourgogne-Franche-Comté : les enjeux économiques vus par les candidats

Le MEDEF BFC a élaboré un livre blanc à destination de tous les candidats pour les interpeler, via des auditions publiques qui se sont déroulés les 25 et 26 mai dernier à Dijon, sur les enjeux économiques de la région. Cinq candidats sur sept ont répondu à l’invitation. Exit la candidate LO et le candidat RN.
De gauche à droite, Gilles Platret (LR), Marie-Guite Dufay (PS), Denis Thuriot (LREM-MoDem), Stéphanie Modde (EELV) et Julien Odoul (RN).
De gauche à droite, Gilles Platret (LR), Marie-Guite Dufay (PS), Denis Thuriot (LREM-MoDem), Stéphanie Modde (EELV) et Julien Odoul (RN). (Crédits : DR)

« Ce que nous attendons des politiques, c'est qu'ils travaillent avec le monde économique », affirme Jean-Philippe Richard, président du Medef BFC. « Qu'ils fassent plus confiance à la vision des entrepreneurs, qu'ils écoutent davantage ceux qui font l'économie de la Région », poursuit-il. De ce point de vue, Bastien Faudot, tête de la liste de gauche, « le temps des cerises », répond plutôt favorablement aux sollicitions du Medef BFC : « Les entreprises maitrisent la technicité. Nous souhaitons une relation symbiotique avec elles. Notre intérêt est de comprendre comment fonctionne l'outil économique afin de les aider à moderniser leurs outils de production », explique-t-il. Quant à Gilles Platret, candidat LR, il souhaite créer une sorte de parlement, « une instance qui permette aux organisations et aux représentants d'être réunis avec les conseillers régionaux ». « La région travaille trop en autarcie dans son propre cadre », constate-il. « Les entreprises ont besoin d'être entendues partout sur l'ensemble des territoires avec le même accès aux services, et aux informations », poursuit-il.

La fusion des régions, imposée par la loi NOTRe de 2015, avait pour objectif de créer des régions assez fortes pour se positionner économiquement face à leurs homologues européennes, notamment allemandes, espagnoles ou italiennes. Force est de constater que la fusion de la Bourgogne-Franche-Comté n'a pas encore abouti, malgré les atouts de ce vaste territoire. « La région ne s'est pas bien mariée. Un mariage est souvent synonyme d'enfants. Or, nous en perdons chaque année... L'amélioration de notre démographie passe par une meilleure acceptation de la grande région. La Bourgogne-Franche-Comté est moins connue que les ex-régions séparément, il faut mieux nous assumer », constate Denis Thuriot tête de file d'une liste LREM-MoDem.

Sa configuration économique, en particulier son poids dans l'industrie, fait sa fragilité. Par exemple, la présidente de la région, Marie-Guite Dufay, candidate à sa propre succession, revenait mardi 26 mai d'une journée éprouvante avec les syndicats de la fonderie de Saint-Claude, qui emploie près de 300 salariés et qui ne trouve pas de repreneur.

Toutefois, la région dispose d'atouts liés notamment au fait qu'elle dispose de grands espaces. Sa ruralité offre une qualité de vie qui feront peut-être la différence dans « le monde d'après ». « Il faut miser sur une ADN industrielle et rurale, notre art de vivre une harmonie simple, et sur nos compétences spécifiques », insiste Marie-Guite Dufay. Cheffe de file du développement économique, la Région est donc en première ligne pour doper l'attractivité, priorité du territoire, en suscitant, en coordonnant et en finançant les actions utiles à la création et au développement des entreprises avec une vision à 360 degrés (infrastructures et aménagement du territoire ; formation et emploi, soutien aux filières, à la recherche et innovation, offres touristiques).

Préserver le tissu industriel de la région

La Bourgogne-Franche-Comté est la première région industrielle au regard de la part de l'industrie dans le PIB régional. Est-ce une force ou une faiblesse ? Le livre blanc du MEDEF BFC précise que pour certains bassins, elle est essentielle, tels que Belfort-Montbéliard, Le Creusot-Montceau, Chalon-sur-Saône ou Montbard. Pour Bastien Faudot, c'est un pilier central de notre économie à soutenir. « L'activité industrielle est l'économie de production, un élément central de la santé économique de notre région. Nous nous opposons à une France sans usine. Une région cliente qui ne serait plus productrice, dans le jeu de la concurrence mondiale, serait totalement captive », rappelle-t-il.

Dans son livre blanc, le MEDEF BFC note que la diversité du tissu industriel régional, avec une répartition des emplois entre la métallurgie, les matériels de transport, l'agroalimentaire, la plasturgie, la santé et les microtechniques est rassurante sur la capacité de la région à mieux résister. Si l'impact est direct sur l'activité et l'emploi en cas de crise, l'industrie doit aujourd'hui anticiper les mutations annoncées, en engageant au plus vite sa transition numérique et environnementale.

Dans ce contexte, l'investissement dans les énergies du futur, en particulier l'hydrogène, est stratégique, avec d'importants centres de recherche à Belfort et des déploiements prévus de cette nouvelle énergie à Auxerre ou à Dijon. « L'hydrogène oui. Mais produit à l'énergie verte ! », insiste Stéphanie Modde, tête de la liste du Pôle écologiste. Pour la candidate verte, le développement économique passe par la transition écologique d'un monde en mutation. La crise est l'occasion d'agir, de réorienter et d'accompagner les mutations industrielles. « La région doit aider les TPE et PME à accéder plus facilement aux fonds européens qui sont actuellement sous-utilisés. Les dossiers sont parfois complexes à remplir », constate Stéphanie Modde. Pour cette dernière, ces fonds permettraient aux entreprises, en difficulté du fait de la crise sanitaire, de passer les prochaines années en opérant une mutation par filière, notamment la sous-traitance automobile, vers la transition écologique.

Favoriser le retour à l'emploi en musclant la formation

Selon le livre blanc du MEDEF BFC, la Région a consacré 175,2 millions d'euros à la formation professionnelle en 2020 (+19% par rapport à 2019). « Nous sommes la région qui a le plus investi dans la formation ces dernières années », souligne Marie-Guite Dufay. Elle a été la première région française à signer son pacte régional d'investissement dans les compétences (PRIC), dispositif sur quatre ans visant à accompagner et accélérer la transformation de la formation professionnelle.

Pour l'actuel maire de Nevers, Denis Thuriot : « Pas de développement économique sans formation ». Le candidat LREM prône un meilleur dialogue entre le monde économique et le monde académique. L'idée est de faire correspondre les formations aux besoins des entreprises. Trois secteurs sont marqués par les tensions dans la Région : les études et supports techniques à l'industrie, l'installation et la maintenance, le transport terrestre.

Dans son livre blanc, le MEDEF BFC constate que la Bourgogne-Franche-Comté peine également à recruter dans la construction et la santé, surtout à des postes qualifiés. Un pôle de compétitivité BFCare s'est créé en 2013 pour améliorer la visibilité de la filière santé qui emploie 10.000 personnes sur le territoire. Celui-ci compte un réseau de 45 entreprises du secteur de la santé. Sa première mesure, si Gilles Platret est élu, sera de doubler le budget de l'orientation professionnelle et de « ramener l'entreprise dans les lycées afin d'inciter les jeunes à choisir des carrières industrielles. » Pour lui, soutenir l'emploi local passe par la préférence régionale dans les appels d'offre. « Des méthodes existent pour que les entreprises locales soient favorisées », souligne-t-il. Par exemple, dans le secteur de la construction, la « clause Molière » qui consiste à ce que le personnel affecté à l'exécution d'un marché public soit capable de comprendre et parler le français, ou, à défaut, qu'un interprète soit présent sur le lieu d'exécution.

Une région mieux connectée

Placée au centre de l'Europe, la Bourgogne-Franche-Comté connait néanmoins un problème de desserte, constate le MEDEF BFC. D'une part, la desserte « physique » n'est pas optimale. Des territoires entiers restent enclavés, sans autoroute ni voies ferrées (Morvan, Nièvre, Haut-Jura, Châtillonnais, Haute-Saône). Par exemple, il existe très peu de dessertes TGV transversales, quasiment aucune liaison TGV vers les aéroports parisiens ou lyonnais et certains services sont sur la sellette à l'instar de la halte TGV de Montbard. Des infrastructures restent manquantes : la région est la seule de France à n'être pas dotée d'un aéroport. « La région a été trop coulante avec la SNCF. Nous aurions pu tester depuis longtemps l'ouverture à la concurrence qui constitue un enjeu important pour nos infrastructures ferroviaires », remarque Gilles Platret.

D'autre part, la desserte « virtuelle » progresse lentement. Au premier janvier 2020, 99% de la population de la région étaient couverts par la 4G. En revanche, fin 2019, la Bourgogne-Franche-Comté faisait encore figure de mauvais élève en matière de très haut débit fixe avec 42% de la population couverte, contre 56% au plan national. Des programmes de déploiement de la fibre optique sont en cours. Leur accélération et leur aboutissement sont indispensables au développement économique, mais également à l'offre de soins (télémaintenance), à la qualité de vie et finalement à l'attractivité des territoires. La crise sanitaire a prouvé le rôle essentiel du digital dans les entreprises et les dirigeants sont désormais majoritairement convaincus que la transformation numérique est prioritaire.

Pour Stéphanie Modde, « une chose est sûre, il faut accélérer le maillage territorial pour équiper toutes les entreprises en Fibre, qu'elles soient dans une ville moyenne ou une petite ville ». Toutefois, très peu de chefs d'entreprises de TPE et PME savent concrètement comment intégrer cette transition. Sur ce sujet, l'Usinerie à Chalon-sur-Saône est un pôle régional de la transition numérique qui ouvrira ses portes prochainement. Cet organisme a justement pour mission notamment de les accompagner à passer ce cap.

Transition énergétique : se saisir des opportunités

Selon les chiffres de l'Insee, la Région consacre 1,8 % de son PIB à la recherche et au développement. Ce qui la situe dans le premier tiers des régions européennes. Elle est toutefois en dessous des 3% préconisés par la Stratégie Europe 2020. L'industrie régionale bénéficie de l'implantation de quatre pôles de compétitivité favorisant des projets innovants dans l'automobile, la plasturgie, le nucléaire, l'agroalimentaire et les microtechniques.

La BFC se positionne aujourd'hui sur la transition écologique, notamment sur les énergies nouvelles comme l'hydrogène à Belfort ou encore la filière éolienne qui compte aujourd'hui une soixantaine d'entreprises.

Stéphanie Modde se dit totalement en phase avec les propositions du Medef en termes de transition écologique. Un constat qui la mène à dire avec humour : « Ils sont chez les Verts ! ». Fil d'Ariane de sa candidature, la transition écologique se retrouve dans toutes les politiques publiques qui incombent à la région. Ainsi, les aides aux entreprises seront-elles conditionnées à des critères respectueux de l'environnement et éthiques.

Tourisme : construire le « monde d'après »

Dans son livre blanc, le MEDEF BFC remarque que, en matière de tourisme, la Région est tiraillée entre une clientèle de proximité - française et européenne - qui apprécie ses atouts (patrimoine, gastronomie, vin, nature...) et une clientèle chinoise, positionnée sur le low cost. Un choix stratégique est à faire pour cette filière qui emploie 41.200 personnes (3% de l'emploi touristique national et 4% des emplois dans la région) et rapporte 4,6 milliards d'euros (6,3% du PIB régional et environ 3% de la consommation en France). Le contexte de la crise sanitaire a fait grandir la demande d'une nouvelle clientèle locale. Les acteurs du tourisme sont plus que jamais invités à adapter leur offre à ce public qui pense local et est prêt à consommer les produits et services de son propre territoire. La qualité du patrimoine architectural naturel et culturel de la région est susceptible de constituer un sujet de fierté mais aussi un aimant pour inciter à l'installation de Franciliens en quête de qualité de vie.

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Commentaire 1
à écrit le 07/06/2021 à 8:43
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Mais avec une bonne tête pareille qu'est-ce qu'il fait en politique Thuriot ???

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