Régionales : en Normandie, le ferroviaire électrise la campagne

Comme lors des précédents scrutins régionaux, le manque de fiabilité des lignes qui relient la Normandie à la capitale anime la campagne électorale. Une vieille antienne sur ce territoire orphelin de la grande vitesse.
La centaine de trains normands quotidiens butte toujours sur l'entrée (ou la sortie) de la gare saint Lazare où ils peinent à se frayer un chemin au milieu de 1.400 Transiliens.
La centaine de trains normands quotidiens butte toujours sur l'entrée (ou la sortie) de la gare saint Lazare où ils peinent à se frayer un chemin au milieu de 1.400 Transiliens. (Crédits : Reuters)

Comme une impression de déjà vu. Le train s'invite une nouvelle fois dans le débat électoral en Normandie. Pas un jour ne se passe sans que les ex-Intercités ne fassent l'objet de prises de bec entre les candidats par médias ou réseaux interposés. Pour qui suit l'actualité locale, cela ne constitue pas à proprement parler une surprise. Voilà des années que la mauvaise qualité des liaisons avec Paris, longtemps négligées par la SNCF de l'aveu même de son ex-patron Guillaume Pepy, suscitent ici des débats enflammés.

Il est vrai que les Normands ont quelques raisons d'en vouloir à la compagnie cheminote. Là ou les Rennais et les Bordelais se sont rapprochés de la capitale grâce au TGV, eux, s'en sont au contraire « éloignées » au cours des dernières décennies. Les chiffres sont implacables. Il faut, aujourd'hui, compter au moins une heure vingt pour parcourir la distance entre Rouen et la gare Saint Lazare contre une heure dans les années 1970. De même, il est dorénavant plus rapide de se rendre à Nantes par le train qu'à Caen, pourtant deux fois plus proche par la route.

La vie duraille

Dès son arrivée à la présidence de la Région fraîchement réunifiée en 2016, Hervé Morin avait promis de sortir la Normandie du « moyen âge ferroviaire » en prenant la main sur les Intercités. Le nouvel exécutif y avait mis les moyens. En plus de co-financer -grassement- les travaux de rénovation sur des voies à bout de souffle, il avait arraché à Manuel Valls, alors Premier ministre, la coquette somme de 700 millions  d'euros pour acquérir quarante trains Bombardier de type Omneo Premium. Objectif : remplacer des Corail hors d'âge, victimes de pannes à répétition.

Six ans plus tard, la situation sur le rail est en voie d'amélioration. Pour autant, elle est loin d'être optimale permettant aux opposants du président sortant de canonner sur « les promesses non tenues ». Bien que l'intéressé revendique un taux de régularité de 95% et une augmentation de l'offre, les temps de trajets restent inchangés et les retards fréquents. En réalité, la centaine de trains normands quotidiens butte toujours sur l'entrée (ou la sortie) de la gare saint Lazare où ils peinent à se frayer un chemin au milieu de 1.400 Transiliens.

Avec l'Ile de France : je t'aime moi non plus

La solution a pour nom Ligne Nouvelle Paris Normandie (alias LNPN). Inscrite dans la Loi d'orientation des mobilités parmi les chantiers prioritaires, elle n'est toutefois pas prête de voir le jour. Saucissonné en plusieurs tranches étalées dans le temps, ce projet milliardaire prévoit la création de voies réservées pour les TER normands entre Mantes et Paris et la construction d'une nouvelle gare plus capacitaire sur la rive Sud de Rouen.

Mais le dossier, soutenu comme un seul homme par toute la classe politique en aval de la Seine, est loin de faire l'unanimité en amont. « Il y a encore beaucoup de gens au sein des états-majors de la SNCF et de la Région Ile de France qui préféreraient que les trains normands finissent leur course à Mantes, point de départ du futur RER E », confie un fin connaisseur des questions ferroviaires.

Valérie Pécresse, comme d'ailleurs son prédécesseur socialiste, se montre peu pressée d'aider ses voisins. Elle  a ainsi refusé d'apporter sa contribution à la construction d'une passerelle (dite saut de mouton) en gare Saint Lazare. Laquelle permettra aux TER venus du Havre et de Cherbourg d'enjamber les voies où circulent les Transiliens et d'échapper ainsi aux embouteillages. De son côté, la SNCF donne l'impression de freiner des quatre fers. Ses dirigeants affirment aujourd'hui qu'il sera difficile d'inaugurer ce pont ferroviaire avant... 2032 : quatre ans après la date inscrite dans la LOM.

Moralité :  le prochain président de la Région, de quelque bord qu'il vienne, devra encore mouiller la chemise pour espérer gagner la bataille du rail.

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