"Crowdfunding" : quand les particuliers se font banquiers

Le Français Prêt d’Union annonce ce jeudi 7 novembre une levée de fonds de 10 millions d’euros. A cette occasion, le groupe norvégien Schibsted, propriétaire du site leboncoin.fr, entre au capital de la plate-forme Internet de crédit entre particuliers.
Christine Lejoux
En 2013, Prêt d'Union aura distribué 50 millions d'euros de crédits entre particuliers, contre 11 millions l'année précédente. REUTERS.
En 2013, Prêt d'Union aura distribué 50 millions d'euros de crédits entre particuliers, contre 11 millions l'année précédente. REUTERS.

Les plates-formes Internet de crédit entre particuliers - cette forme de "crowdfunding" qui met en relation quasi directe des ménages à la recherche d'un prêt pour financer l'achat d'une voiture, par exemple, avec des épargnants soucieux de faire fructifier leur bas de laine - ont le vent en poupe. Prêt d'Union, créée en 2009 et pionnière du secteur en France, annonce ce jeudi 7 novembre une levée de fonds de 10 millions d'euros.

 Une augmentation de capital qui voit le groupe norvégien de médias Schibsted - propriétaire du site d'annonces leboncoin.fr - entrer au capital de Prêt d'Union et en devenir le deuxième actionnaire, derrière le Crédit Mutuel Arkéa. Ce dernier n'est autre que l'un des actionnaires historiques de Prêt d'Union, comme AG2R La Mondiale, Weber Investissements - la holding des fondateurs de la société de gestion Financière de l'Echiquier - et Kima Ventures, le fonds d'investissement de Xavier Niel et de Jérémie Berrebi, respectivement fondateurs de Free et de Net2one.

 Le gros des 10 millions d'euros a été apporté par Schibsted

 Si les actionnaires historiques ont remis au pot à l'occasion de cette levée de fonds, le gros des 10 millions d'euros a cependant été apporté par Schibsted.

"Avant ce nouveau tour de table, nos actionnaires provenaient essentiellement du monde de la finance, et nous apportaient leur expertise en matière de crédit à la consommationet de produits d'épargne. Mais, en tant que plate-forme Internet, il était important pour nous de faire également entrer dans notre capital un acteur du Web",

explique Charles Egly, co-fondateur de Prêt d'Union.

 Une opération qui, toutes proportions gardées, n'est pas sans rappeler la récente prise de participation de Google dans l'Américain Lending Club, "la" référence en matière de crédit entre particuliers, ou "peer to peer lending" en anglais. En mai dernier, le moteur de recherche le plus populaire au monde et le fonds d'investissement Foundation Capital avaient en effet injecté 125 millions de dollars (92 millions d'euros) dans Lending Club, valorisant ainsi à 1,55 milliard de dollars la société fondée en 2006 par le Français Renaud Laplanche.

 Lending Club, un modèle qui inspire Prêt d'Union

 Un modèle pour Prêt d'Union : "Notre ambition est d'accomplir en France et en Europe ce que Lending Club est en train de faire aux Etats-Unis", avoue sans détours Donald Bryden, président du conseil de surveillance de Prêt d'Union. Que fait donc de si extraordinaire Lending Club ?

La plate-forme Internet propose aux ménages des crédits à la consommation d'un montant maximum de 35.000 dollars, crédits qui sont financés par des internautes-investisseurs, lesquels trouvent là une nouvelle source de rendements pour leurs placements. Et la faiblesse de ses coûts de fonctionnement permet à Lending Club de proposer des crédits à des taux inférieurs à ceux des banques.

 La recette fonctionne si bien, en particulier depuis la crise financière de 2008 qui a provoqué une crise de confiance entre les particuliers et les banques, que Lending Club devrait générer deux milliards de dollars de prêts entre particuliers, cette année, contre 800 millions en 2012.

Résultat, la société, qui se rémunère via des commissions sur les montants des prêts, table sur un chiffre d'affaires d'une centaine de millions de dollars pour 2013, contre 35 millions l'an dernier, soit un bond de…185%. Une croissance exponentielle qui encourage Lending Club à tenter l'aventure de l'introduction en Bourse, un projet prévu pour l'an prochain.

 50 millions d'euros de crédits distribués en 2013

 Prêt d'Union n'en est pas encore à ce stade, mais la progression de son activité est, elle aussi, spectaculaire. Notamment parce qu'après un parcours du combattant de deux ans, la start-up avait décroché en 2011 l'agrément de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR, le gendarme du secteur bancaire), un sésame "nécessaire pour faire du peer to peer lending à une échelle intéressante", selon Charles Egly. "

Cette année, nous aurons distribué 50 millions d'euros de crédits, contre 11 millions l'an dernier", se félicite le jeune patron. Des crédits amortissables - Prêt d'Union ne donne pas dans le crédit revolving - et qui, pour les montants inférieurs à 5000 euros, sont deux fois moins chers que ceux des établissements spécialisés, lesquels proposent le plus souvent du crédit renouvelable.

Résultat, "nous visons toujours l'équilibre financier pour la fin 2014 ou le début de l'année 2015", confirme Charles Egly.

 Prêt d'Union compte recruter au moins 25 personnes au cours des 12 prochains mois 

 Une ambition qui sera servie par l'augmentation de capital de 10 millions d'euros.

"Cette levée de fonds va nous permettre de lancer le chantier du Big Data [afin d'affiner les procédures de contrôle des risques de surendettement ; Ndlr], d'investir en R&D (recherche et développement) et de recruter au moins 25 personnes au cours des 12 prochains mois",

annonce le co-fondateur de Prêt d'Union, qui compte actuellement 45 collaborateurs.

 Des perspectives qui ne laissent pas le gouvernement insensible : lors des assises de la finance participative, le 30 septembre, Fleur Pellerin, la ministre déléguée à l'économie numérique, avait présenté un projet de réglementation créant une entorse au monopole bancaire, afin de faciliter les prêts entre particuliers. Le texte, qui fait l'objet d'une consultation publique jusqu'au 15 novembre, prévoit un plafond de prêt de 250 euros par personne et de 300.000 euros pour chaque crédit.

 

 

Christine Lejoux

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Commentaires 4
à écrit le 14/11/2013 à 19:15
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PRUDENCE ! PRUDENCE ! Il suffit d'aller sur le site de PRET D'UNION, de se déclarer "INVESTISSEUR PROFESSIONNEL", de télécharger la "Convention de service investisseur" pour s'apercevoir que les choses ne sont pas aussi simples et transparentes qu...

à écrit le 07/11/2013 à 9:46
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Attention, risque d'escroquerie majeur !

le 07/11/2013 à 14:39
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j'allais mettre exactement la meme chose! Et sans compter la riposte des banques classiques si ce systeme leur fait trop d'ombre....

le 07/11/2013 à 14:51
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Donc, pour vous les banques sont honnêtes c'est ça ??? Pourriez-vous argumenter SVP ?

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