Climat : la BoE prévoit de lourdes pertes pour le secteur financier

La banque centrale d'Angleterre estime que le secteur financier pourrait supporter des pertes comprises entre 10 et 15 % de leurs bénéfices annuels dans les années à venir à cause du réchauffement climatique. Une trajectoire à 1,8 degré (contre 1,5 degré prévu par les accords de Paris) se traduirait ainsi par une perte supplémentaire de 110 milliards de livres.
Les banquiers centraux multiplient les avertissements au secteur financier sur le risque climatique.
Les banquiers centraux multiplient les avertissements au secteur financier sur le risque climatique. (Crédits : Matthew Childs)

Un cri d'alarme. La Bank of England (BoE) invite les banques et les assureurs à réduire au plus vite leur exposition au risque climatique s'ils souhaitent éviter de lourdes pertes à l'avenir. Tel est du moins la conclusion d'une série de tests de résistance (stress test) menée par le superviseur au Royaume-Uni.

"S'ils varient selon les entreprises et les scénarios, les taux de perte devraient atteindre en moyenne entre 10 à 15% des bénéfices annuels" dans les décennies à venir", prévient ainsi Sam Woods, directeur de l'autorité de réglementation prudentielle de la BoE, dans un discours en parallèle à la présentation du résultat de ces tests.

La banque affirme que la plupart des banques et assureurs exerçant au Royaume-Uni devraient être en mesure de faire face au risque climatique, et ont fait de "bons progrès" dans leur préparation, mais que tous doivent faire "beaucoup plus".

Un avertissement  qui sonne comme un écho à la polémique suscité par un haut responsable de HSBC AM qui a mis en doute les prévisions jugées exagérément pessimistes  des banquiers centraux sur le risque climatique.

110 milliards de livres de pertes de plus sur un scénario médian

"Au fil du temps, les risques climatiques vont devenir un poids persistant sur la rentabilité des banques et assureurs, particulièrement s'ils ne les gèrent pas efficacement", estime Sam Woods, qui souligne néanmoins que l'incertitude sur l'ampleur de ce risque restait importante.

Ces tests, les premiers du genre qui doivent se tenir tous les deux ans, reposent sur trois scénarios. Le premier est une hypothèse d'action rapide pour contenir la hausse de la température de la planète à 1,5 degré à la fin du siècle. C'est devenu un scénario de moins en moins probable.

Un autre envisage des politiques plus tardives qui entraînent la montée de la température de 1,8 degré comparé à l'ère pré-industrielle. Dans ce second scénario, la projection des pertes des banques est supérieure de 110 milliards de livres à leur niveau en cas d'action rapide.

Dans la troisième option, aucune action n'est prise et la température augmente de 3,3 degrés avec des conséquences climatiques catastrophiques, entraînant une baisse "permanente" du PIB britannique et mondial.

Les régulateurs britanniques se focalisent sur les conséquences du changement climatique sur la solidité des banques et mais restent muets sur les financements d'investissements dans les industries polluantes, régulièrement dénoncés par les ONG écologistes. Ils évitent en effet de s'attaquer aux causes du changement climatique, estimant que cela ne relève pas de leur mandat.

Ces "stress tests" avaient été retardés par la pandémie de Covid-19 et ont été lancés en 2021. En zone euro, la Banque centrale européenne a lancé son premier test de résistance bancaire sur le sujet en mars et prévoit de conclure l'exercice en juillet.

La Banque de France à quant à elle déjà testé neuf groupes bancaires et quinze d'assurances en 2021, révélant pour le moment un risque modéré pour ces établissements.

L'association Positive Money a commenté le résultat des tests britanniques en estimant que malgré les avertissements de l'Agence internationale de l'Energie (AIE) et du GIEC contre tout croissance de l'énergie fossile,  les banques britanniques sont clairement "à côté d'une trajectoire crédible vers la neutralité carbone, après avoir injecté 275 milliards de livres dans les carburants fossiles depuis 2016". Et d'appeler le législateur ou le régulateur de contraindre les banques et les assureurs à modifier leur trajectoire, en agissant notamment sur le niveau de fonds propres requis pour les financements dans les énergies fossiles.

(avec AFP)

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