Comment AIG a été sauvé de la faillite par l'Etat américain

Premier assureur mondial à l'époque, American International Group a frôlé la faillite en septembre 2008, sauvé par l'injection de 182 milliards de dollars d'argent public. Le Trésor américain tente aujourd'hui d'entrer dans ses frais.
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Lentement, le Trésor américain poursuit sa sortie du capital d'American International Group (AIG). Jeudi matin, il s'est ainsi séparé de 207 millions d'actions de l'ancien premier assureur mondial, ramenant sa participation à 70%. Cette vente a apporté 6 milliards de dollars dans les caisses de l'Etat. Parallèlement, 8,5 milliards de dollars devraient être récupérés grâce à la cession à venir de la participation du Trésor dans AIA, la filiale asiatique d'AIG.

Si le processus de désengagement suit son cours, il prend plus de temps que prévu. La feuille de route que s'était fixé le Trésor début 2011 ? il est alors monté à 92% du capital après un processus de restructuration de la dette d?AIG - n'a pas été respectée. Si bien que l'objectif initial de solder la totalité de cette participation avant la fin de l'année semble totalement inatteignable.

Opération complexe

Car l'opération est complexe. Le Trésor doit d'abord veiller à rentrer dans ses frais, après avoir injecté 182,3 milliards de dollars pour sauver l'assureur. Il lui faut pour cela vendre ses titres à un prix plancher de 28,73 dollars, seuil sous lequel a évolué l'action AIG une grande partie de l'année 2011. En janvier, elle était pourtant montée au-delà des 60 dollars. Plusieurs cessions de titres ont ainsi dû être reportées l?an passé en attendant que le cours remonte.

Dans le même temps, l'administration américaine doit se montrer suffisamment patiente afin de ne pas mettre trop de titres - et trop rapidement - sur le marché, ce qui pénaliserait grandement le cours de Bourse d'AIG. Et pourrait donc compliquer la tâche du Trésor. Jeudi, l'assureur a ainsi décidé de racheter la moitié des actions mises en vente. Cela n'a pas empêché son action d'accuser une chute de près de 4% à Wall Street, à 28,39 dollars. Avec un objectif de cours moyen des analystes situé à 30 dollars, la marge man?uvre pour le Trésor demeure limitée.

En janvier 2011, la presse américaine indiquait que l'administration visait un prix moyen de 45 dollars. À ce prix là, l'Etat aurait réalisé un bénéfice de 25 milliards de dollars, qui lui aurait alors permis de réduire le coût du décrié plan Tarp à 30 milliards, selon les projections de Timothy Geithner, le secrétaire au Trésor. Un coût "remarquablement bas" comparé aux précédentes crises bancaires de l'histoire, expliquait-il à l'époque. Ce scénario est aujourd'hui remis en cause.

Pertes historiques

Les déboires d'AIG ont véritablement débuté fin 2007. La société basée à New York est encore le numéro un mondial de l'assurance. C'est même un véritable mastodonte, présent dans plus de 130 pays et dont les actifs dépassent les 1.000 milliards de dollars. En 2006, elle a dégagé 14 milliards de dollars de profits. Et le début 2007 est prometteur: sur les neuf premiers mois de l'année, les profits atteignent 11,5 milliards de dollars.

AIG est alors rattrapée par les prémices de crise financière. Au quatrième trimestre 2007, le groupe est contraint de passer une charge de 11,5 milliards de dollars pour tenir compte des pertes potentielles de son portefeuille de produits dérivés de risque de crédit aux entreprises (CDS, "credit default swap"). Il passe ainsi dans le rouge, affichant la plus importante perte trimestrielle de son histoire (5,3 milliards). La première d'une longue série.

Car la situation ne s'arrange pas. Bien au contraire. La crise des subprimes (ces prêts hypothécaires accordés à des ménages non solvables) gagne chaque mois de l'ampleur et entraîne avec elle l'ensemble des marchés financiers. L'assureur est victime de sa politique de diversification dans les activités de marchés, entamée en 1987 avec la création d'AIG Financial Products. Cette division , qui a emis nombre de produits de crédits complexes et risqués, accumule alors les pertes. Au cours des trois premiers trimestres de 2008, l'établissement affiche un déficit abyssal de 18,5 milliards de dollars.

182 milliards de dollars d?argent public

Pour tenter de rassurer les marchés, AIG lance une augmentation de capital en mai 2008, levant 20 milliards de dollars. Mais le répit n'est que de courte durée. Le 15 septembre, la banque d'affaires Lehman Brothers fait faillite, créant un climat de défiance généralisée envers les valeurs financières. A Wall Street, l'action de l'assureur s'effondre, perdant en quelques séances quasiment toute valeur. Le groupe est en fait au bord de l'asphyxie et a besoin de réunir au plus vite 75 milliards de dollars.

C'est finalement la Réserve fédérale qui lui fournira les liquidités nécessaires, en lui accordant, le 18 septembre, un prêt de 85 milliards de dollars. En échange, l'Etat prend 79,9% du capital et réclame un vaste plan de cession d'actifs, afin de recentrer la compagnie sur son c?ur de métier. Au total, 182,3 milliards de dollars d'argent public seront injectés pour éviter la chute d'AIG.

Les cessions d?actifs ? notamment la vente d?Alico, la branche d?assurance-vie, à Metlife et l?introduction en Bourse d?AIA qui ont rapporté, à elle seules, près de 37 milliards de dollars ?  ont permis de rembourser une partie de cette somme. Le reste le sera, peut-être, par la vente des actions que détient toujours le Trésor.

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