2023, année critique pour la croissance d'Arquus

Après une année mitigée en 2022 (record de commandes en France mais décevante à l'export), le spécialiste des blindés légers et moyens va faire face à de gros enjeux structurants dès cette année. La prochaine loi de programmation militaire (2024-2030) sera un indicateur crucial pour la future croissance d'Arquus.
Michel Cabirol
Arquus va devoir monter en puissance sur les marchés à l'exportation dès cette année.
Arquus va devoir monter en puissance sur les marchés à l'exportation dès cette année. (Crédits : Arquus)

Indéniablement Arquus (Volvo Group) n'a pas profité des tensions internationales, notamment de la guerre en Ukraine, pour exploser son chiffre d'affaires en 2022. « C'est une année de stabilisation, nous n'avons pas eu beaucoup de croissance en dépit d'une grosse année en France », fait observer à La Tribune le PDG d'Arquus Emmanuel Levacher, rencontré au moment du salon Idex à Abu Dhabi (20-24 février). L'année dernière, Arquus a livré 1.277 véhicules, dont 1.200 Véhicules Tactique 4x4 (VT4), des véhicules tactiques de la famille Sherpa et des porteurs Caesar. Soit un chiffre d'affaires d'environ 550 millions d'euros (dont 43% dans les services), selon l'industriel. « Le rattrapage est fait par rapport à 2020 (+3% entre 2020 et 2022) mais Arquus est encore assez loin du record de 2019 (600 millions d'euros) », explique-t-on dans le groupe.

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Commandes : une année record en France

Le spécialiste des véhicules blindés légers et moyens a également produit l'année dernière 223 pièces de mobilité produites pour Griffon et Jaguar, qui ont été envoyées à Roanne pour y être assemblées par Nexter. Le constructeur a livré 220 tourelleaux produits. Ce qui porte le total produit à 500 depuis le lancement de ce produit. Enfin, Arquus a fabriqué 2.500 organes mécaniques (moteurs, ponts, réducteurs, boîtes de transfert...) pour des pièces de rechange, des premières montes ou des réparations. Côté soutien, c'est une année record avec 220 RIP (Réparation industrielle privée) sur tout le spectre (VAB, TRM10000, GBC180, PVP...) et 150 modernisations de véhicules sur les mêmes parcs.

En France, l'année a été record en termes de prises de commandes. La Direction générale de l'armement (DGA) a notifié en mai dernier à Nexter, Arquus et Thales, dans le cadre de leur groupement momentané d'entreprises, une nouvelle commande de 356 véhicules blindés Griffon, dont 54 en version MEPAC, et 88 EBRC Jaguar. Arquus a également obtenu en fin d'année des commandes additionnelles de pièces de rechange pour le soutien et la reconstitution des stocks de  l'armée de terre. Soit un petit parfum d'économie de guerre pour Arquus. C'est une année exceptionnelle qui ne devrait pas se confirmer dans les prochaines années : le programme Scorpion ne devrait pas atteindre ces montants dans les années à venir.

Export : une année décevante

Si en France, Emmanuel Levacher estime avoir réalisé « un bon niveau d'activité » en 2022, il reste déçu une nouvelle fois par ses résultats à l'exportation. « Nous avons réalisé une année assez limitée à l'exportation, souligne-t-il. Nous n'avons pas pu reconstituer notre carnet de commandes à l'exportation ». Il explique cette panne à l'export par « une concurrence de plus en plus rude » sur les marchés traditionnels d'Arquus provenant des pays du Moyen Orient et de la Turquie. Notamment en Afrique où le marché « se tarit » pour Arquus pour deux bonnes raisons : instabilité politique des pays africains et financements obtenus via de grands fonds étrangers qui freinent les ventes d'Arquus.

Pour compenser la perte de ces marchés traditionnels d'Arquus, le constructeur vise depuis plusieurs années le marché européen. « Cela prend beaucoup de temps », note toutefois Emmanuel Levacher. Notamment dans les pays Baltes qui veulent se rééquiper pour faire face à la Russie aujourd'hui en guerre en Ukraine et où l'industriel a quelques touches pour le VAB Mark 3 face aux Turcs et à Patria (Finlande). Emmanuel Levacher espère remporter certains appels d'offres qui commencent à sortir. Mais il s'interroge sur la compétitivité de la Base industrielle et technologique de défense (BITD) à l'export en termes de coûts en raison de l'inflation. Une BITD dans le domaine de l'armement terrestre « sur le fil du rasoir », estime-t-il

Pour revenir sur les marchés à l'export, Arquus mise sur le Bastion, et son évolution le Fortress pour percer au Moyen Orient, en Afrique de l'Est et en Europe ainsi que le Sherpa Light pour les forces spéciales. Des blindés qui pourraient intéresser certains pays dans le cadre de la régénération de leurs flottes anciennes. Il travaille également à trouver un client pays de lancement à l'export pour industrialiser le Scarabée, qui a été financé sur fonds propres dans le cadre du programme français VBAE (véhicule blindé d'aide à l'engagement) dans le cadre du remplacement du VBL. Il continue à proposer le tourelleau téléopéré Hornet, notamment aux Émirats Arabes Unis. Et il compte sur les succès des produits de Nexter à l'export (Caesar, Griffon, Jaguar...)

Des interrogations sur la LPM

Le ministère des Armées a lancé début février un appel d'offres européen pour la fourniture d'une quantité maximale d'environ 800 camions-citernes y compris leurs équipements, le soutien en service sur une durée de dix ans avec une première tranche de 300 à 400 exemplaires. Les réponses des candidats en français sont attendus avant le 6 mars à 15 heures. Arquus est naturellement sur les dents pour remporter ce contrat. En outre, comme la plupart des industriels de l'armement, Emmanuel Levacher attend avec une certaine inquiétude les derniers arbitrages de la loi de programmation militaire (LPM) pour savoir si certains grands programmes tels que Scorpion pourraient être impactés par des étalements.

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Au-delà des 800 camions-citernes, il attend également le lancement de l'appel d'offres dans le cadre de la future LPM du renouvellement de la flotte vieillissante des camions destinés au transport d'engins blindés et à la logistique. Arquus propose logiquement sa nouvelle gamme de camions militarisés évolutifs "made in France" Armis (camions 4x4, 6x6, 8x8). Et ne désespère toujours pas d'équiper l'armée de terre avec le Scarabée en remplacement du VBL (Véhicule blindé léger). Le Scarabée deviendra-t-il enfin grand ? En tout cas, Arquus, qui a lancé en 2020 un plan pour spécialiser ses sites de production de 12 millions d'euros, dont 8,7 millions pour le site de Limoges, est en ordre de marche pour donner son plein potentiel. Il lui manque... que les commandes.

Michel Cabirol

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Commentaires 2
à écrit le 04/03/2023 à 10:35
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Bonjour, Arquus a vue dernièrement sa compétance se reduire par l'attribution de la maintenance des vehicule de AdT ..( remise en etat ) Mais elle dois imperativement revenir a une demarche de développement et de reconstructions des véhicules mi...

à écrit le 01/03/2023 à 7:31
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Bonjour, La réalités s"est que cette entreprises est principalement tournée vers les demandes étatique francais et elle est incapable de produire des véhicules spécifiques avec une capacité d'exportation sur les marchés étrangers... Exemple : un p...

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