Artemis : la NASA de retour vers la Lune, l'Europe sur un strapontin

La mission Artemis 1 de la NASA, dont le décollage est prévu lundi à 14h33, doit durer 42 jours au total. Ce voyage vers la Lune, auquel participe en tant que partenaire de la NASA l'Europe (ESA), s’effectuera sans aucun astronaute à bord.
Michel Cabirol
(Crédits : NASA)

Lundi, le monde va à nouveau retenir son souffle même si bien évidemment la nouvelle mission (Artemis 1) de la NASA vers la Lune ne procurera pas les mêmes frissons que la mission Apollo 11 en juillet 1969. Mais quand le lanceur SLS (Space Launch System), qui n'emporte pas d'astronautes cette fois-ci, s'élancera vers la Lune à 14h33 ce lundi (heure de Paris) près de 50 ans après la dernière mission Apollo (Apollo 17), il y aura quelques battements de cœur qui pourraient s'accélérer, y compris chez les Européens. Car l'Agence spatiale européenne (ESA) est partenaire de la NASA sur Artemis, dont le coût du programme s'élève au total à 35 milliards de dollars. D'ailleurs, le logo de l'ESA est bien visible sur le lanceur développé par Boeing, juste en-dessous de celui de la NASA.

« Les risques ont été évalués (lundi). On a considéré qu'ils étaient acceptables pour ce vol d'essai, qui a pour but principal de tester le système », a estimé Philippe Deloo, responsable du programme ESM au sein de l'ESA.

Depuis lundi dernier, la NASA a confirmé le lancement à l'issue de la revue d'aptitude au vol de SLS. Et pas même l'orage qui s'est abattu samedi sur Cap Canaveral en Floride n'a remis en cause dimanche l'optimisme des météorologues de l'US Space Force Space, qui prédisent à 80 % les chances d'une météo favorable. Ce lundi, la NASA dispose d'une fenêtre de tir de deux heures. En cas de report, elle a planifié deux autres créneaux de lancement très prochainement, prévus les 2 et 5 septembre. Si la NASA rate les trois fenêtres de tir, un lancement serait planifié au mois d'octobre, selon l'ESA.

Un stress-test pour le programme Artemis

La mission Artemis 1 est un stress-test grandeur nature pour pousser dans ses retranchements le lanceur et le vaisseau spatial Orion, propulsé par le module de service européen (ESM), dont la maîtrise d'oeuvre a été confiée à Airbus par l'ESA. Tous les systèmes qui vont voler - du lanceur à l'étage supérieur en passant par Orion - sont des systèmes complètement nouveaux, qui n'ont jamais volé. L'un des premiers objectifs de cette mission sera de tester le bouclier de rentrée de la capsule dans l'atmosphère.

« Lorsqu'on revient de la Lune, la capsule arrive avec une vitesse bien supérieure à celle d'une rentrée de l'orbite basse, avec une vitesse d'environ sept kilomètres par seconde, explique Philippe Deloo. Lorsqu'on revient de la Lune, on arrive à onze kilomètres par seconde. C'est un point critique pour la sécurité des astronautes que la NASA veut vérifier ».

La NASA veut également vérifier tous les systèmes de propulsion, dont celui d'Orion propulsé par l'ESM fourni par l'ESA, lors des poussées successives. Ce sera également l'un des points critiques de la mission. Elle va par ailleurs tester les systèmes de navigation et de communication d'Orion. Enfin, la mission Artemis permettra de vérifier la fiabilité du déploiement des panneaux solaires, qui sera l'un des points critiques de la mission. Orion a des panneaux solaires, qui non seulement sont orientables autour de leur axe, mais qui, en plus, peuvent s'incliner vers l'avant ou vers l'arrière pour des raisons structurelles et des raisons thermiques. « Sur le thermique, nous allons apprendre énormément avec le vol. Nous aurons l'occasion de voir comment le système réagit au niveau thermique et nous allons pouvoir affiner nos modèles », souligne Philippe Deloo.

Pour autant, les équipes de la NASA et de l'ESA ne sont pas partis d'une feuille blanche. Elles disposent d'un héritage des programmes précédents, comme la navette spatiale ou de l'ATV, le cargo spatial développé par l'ESA. « Nous ne sommes pas complètement dans le brouillard, mais, malgré tout, ce sont de nouveaux véhicules, explique-t-il. Ce vol d'essai aura sa part de risques. Nous les avons évalués et nous avons considéré qu'ils étaient acceptables pour ce vol d'essai. C'est la raison pour laquelle l'aptitude au vol a été déclarée et la date du 29 août pour le lancement confirmé ».

Une coopération clé, mais qui reste un strapontin

Pour l'Europe, c'est le jour de gloire. Certes sur un strapontin, elle part à la conquête de la Lune en coopération avec la NASA. « A chaque fois que la NASA ira vers la Lune et sur la Lune, ce sera avec l'Europe », qui fournit l'ESM (13 tonnes), « l'un des éléments critiques » de la mission, constate le responsable de la stratégie à l'ESA, Didier Schmitt. Ce programme est un « challenge excitant au quotidien, souligne Antoine Alouani, responsable du système propulsion pour le compte d'Airbus Space. Il démontre que pour l'industrie européenne est capable de réaliser des grands programmes. Nous sommes bien plus que des sparring-partners : on produit, on teste et on livre un élément qui est complètement critique sur l'ensemble de la mission. Si nous échouons à réaliser notre mission, en fait, il n'y a pas de mission ». Parmi les principaux groupes partenaires européens travaillant sur l'ESM, outre Airbus Space en tant que maitre d'oeuvre dont le centre de compétence des vols habités et vaisseaux spatiaux est basé à Brême, figurent ArianeGroup, Thales Alenia Space en Italie et en Belgique, le groupe suisse Ruag (via sa filiale Beyond Gravity) et les filiales d'Airbus aux Pays-Bas (Space Netherlands) et en Espagne (Crisa).

Le coût de développement et de construction du premier ESM s'élève à 650 millions d'euros. Le budget total consacré aux six premiers ESM commandés par la NASA s'élève à 2,1 milliards d'euros, ont indiqué des responsables de l'ESA mardi. C'est peu, trop peu comme ambition. L'Europe doit avoir cette ambition du vol habité, elle doit avoir cette volonté de devenir une puissance, qui compte dans l'exploration spatiale, à commencer par des missions vers et sur la Lune, et plus loin vers Mars. L'Europe a-t-elle une ambition spatiale de nature politique que celle qui prévaut aujourd'hui ? On en est loin, très loin, à des années-lumière...

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Le vol a été annulé :

Lire aussiArtemis : le décollage vers la Lune de la nouvelle fusée américaine annulé

Michel Cabirol

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Commentaires 9
à écrit le 29/08/2022 à 10:32
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Un strapontin, c'est une place qui convient à beaucoup d'Européens.

à écrit le 29/08/2022 à 10:11
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C'est sympa d'aller sur la lune et ensuite viser Mars. Quel intérêt autre que "scientifique" de se poser sur des cailloux stériles ? Économiquement: Aucun. Autant de milliards dépensés en pure perte alors qu'ils pourraient permettre d'améliorer le so...

le 29/08/2022 à 12:06
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Hélium 3.

à écrit le 29/08/2022 à 8:32
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La conquête de la Lune est bien partie cette fois, la preuve: avec un braquemart de 100 m de longueur, ça en impose Mesdames. Par contre je trouve que les deux testicules sont bien longues et effilées, prière de ne pas blesser la Lune...

à écrit le 29/08/2022 à 7:36
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Bonjour L'Europe n'as aucun programme de vols habiter.... donc nous ne pouvons etre que passagers.. Aucune ambition de.notre union pour se type de découverte ? Ou nos dirigeants manipuler pour que soyons les éternelle passagers payeurs.. Bien s...

le 29/08/2022 à 8:50
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L’ Europe n est pas un état !! Donc pour mette en place un programme faut que les 27 soient d accord et payent … il est grand temps d une Europe fédérale qui serait capable de parler financer décider et se protéger au même niveau que les usa, La Chin...

le 29/08/2022 à 8:53
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Vol habité en utilisant quelle fusée européenne ? Ariane ? Le choix est très restreint, nous n'avons pas de milliardaire visionnaire en France, pour créer sa propre fusée. :-) On a combien d'astronautes à mettre dans la future fusée UE pour la Lune ...

le 29/08/2022 à 14:06
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Il suffit de lire ces commentaires pour savoir pourquoi l'Europe n'a aucune ambition et aucune chance de devenir une Europe fédérale. Au nom de l'ambition, les Français sont trop cyniques pour se lancer dans un tel méga projet, trop de plaintes su...

le 29/08/2022 à 16:53
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Pour repondre amicalement, Dans les annee 1980 l'union européenne a abandonné toute volonté d'exploitation spatiale , le seul progrès conduit est le système galeïo ( gps européenne) . Ils n'y a pas d'union fédéral en Europe car ils n' y a aucun...

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