Bière, lait, sucre... : avec la pénurie énergétique, des tensions sur l'agroalimentaire

Cet hiver, certains aliments pourraient manquer dans les rayons des supermarchés faute de resources pour produire ! Une nouvelle inquiétante pour la filière agroalimentaire comme pour les consommateurs.
Laurent Lequien
(Crédits : Reuters)

Après un été éprouvant pour les agriculteurs, marqué par la sécheresse et une flambée continue des coûts de production, la présidente du syndicat agricole majoritaire FNSEA Christiane Lambert a appelé à concilier "planification alimentaire et écologique" mardi dernier lors d'une conférence de rentrée. Face à l'inquiétude qui étreint la profession, "pas question pour nous d'être abattus, nous sommes déterminés à agir et à faire comprendre cette nécessaire double planification, à la fois alimentaire et écologique", a-t-elle défendu, reprenant l'intitulé de la mission confiée à la Première ministre Élisabeth Borne.

"L'agriculture sait qu'elle a un certain nombre de progrès à faire", a reconnu Christiane Lambert, qui a affirmé soutenir la fixation d'objectifs environnementaux tant qu'ils s'accompagnent "de paliers et de moyens d'accompagnements (...) et tant que la sécurité alimentaire n'est pas pénalisée".

"La souveraineté alimentaire, la sécurité alimentaire, la capacité à produire n'est pas acquise définitivement", a-t-elle souligné, insistant sur une notion que son syndicat a contribué à remettre au coeur du débat public dès le début de la guerre en Ukraine.

Parmi les dossiers brûlants de la rentrée: les négociations commerciales plus tendues que jamais avec la grande distribution, et qui ont même fait l'objet d'un rappel à l'ordre du gouvernement vendredi pour appeler les enseignes à accepter les hausses de prix des industriels, notamment dans le secteur du lait.

Pour s'adapter au changement climatique, "l'agriculture a besoin de mesures d'urgence, mais elle a aussi besoin de mesures de long terme, pour tenir, garantir la pérennité des exploitations", a-t-elle ajouté. Parmi elles, la FNSEA défend un recours accru au stockage de l'eau et à l'irrigation, qui ne font pas l'unanimité parmi les syndicats agricoles et associations environnementales.

Autre sujet crucial, pleinement lié à l'accumulation des risques climatiques: la réforme de l'assurance-récolte, dont la profession attend les modalités opérationnelles d'ici son entrée en vigueur en janvier 2023. La FNSEA plaide notamment pour un seuil de déclenchement de la prise en charge à 20% de perte de production (contre 30% actuellement).

Christiane Lambert, qui préside aussi la première organisation représentant les agriculteurs en Europe, la Copa-Cogeca, a rappelé que 44% des surfaces agricoles européennes ont été affectées par la sécheresse cet été, notamment en Italie ou en Espagne où les champs d'oliviers et de tournesol ont fortement souffert.

Macron appelle à "consommer français"

Emmanuel Macron a appelé vendredi à "acheter" et "consommer" français, car la défense de la "souveraineté agricole et alimentaire" est "la mère des batailles" dans le contexte de la guerre en Ukraine et des crises climatique et énergétique.

"Nous traversons une période très particulière, grave, difficile, qui suppose la mobilisation de tous", a déclaré le chef de l'État dans un discours aux Terres de Jim, le rendez-vous annuel des jeunes agriculteurs, qui se tient ce week-end à Outarville (Loiret), dans la Beauce.

"Cette souveraineté agricole et alimentaire" est "absolument indispensable (...) c'est la mère des batailles" et "on a besoin de tous nos compatriotes pour qu'ils comprennent qu'acheter français, consommer français, aimer notre agriculture, c'est la clé pour garder cette souveraineté et ne pas se réveiller demain avec la gueule de bois", a-t-il ajouté en concluant son discours.

Après avoir rappelé les différentes mesures d'urgence prises par le gouvernement pour soutenir les filières agricoles ces derniers mois, il a insisté sur la nécessité de "sortir de la dépendance" aux engrais et intrants de Russie et de Belarus, et de faire face à la hausse des prix de l'énergie, "qui est une arme de guerre" pour Moscou.

Accompagné du ministre de l'Agriculture Marc Fesneau, le chef de l'État a axé cette année sa visite à Terres de Jim sur le dossier sensible du renouvellement des générations en agriculture, alors que quelque 100.000 fermes devraient changer d'exploitants d'ici 2030.

Il a proposé que des consultations se tiennent dans les six prochains mois en vue de la mise en oeuvre d'"un pacte de renouvellement et d'avenir pour l'agriculture", qui passera notamment par une "loi d'orientation et d'avenir agricole en 2023", qui doit elle-même fixer un cap pour 2030.

Il s'agira d'un temps d'échanges "sur les sujets d'orientation, de formation, de transmission et de transition" entre le ministère de l'Agriculture, les professionnels, les régions... qui va permettre de fixer les paramètres de la loi.

Emmanuel Macron a indiqué qu'un "réseau d'incubateurs d'entrepreneurs d'entreprises agricoles innovantes" sera mis en place, que 20 millions d'euros seront investis pour l'enseignement agricole dans le cadre du fonds compétence de France 2030. Il a en outre annoncé qu'un "fonds entrepreneurs du vivant" sera "doté de 400 millions d'euros" pour aider "les jeunes à s'installer, à lisser la charge pendant plusieurs années et à mener les transformations indispensables" pour s'adapter à la transition écologique.

Pour lui, la préservation des terres agricoles est liée à la transition agroécologique avec à la clé, dans certains cas, un changement de cultures, une adaptation au climat, et le développement du "carbone-farming", c'est-à-dire développer massivement la séquestration du carbone dans les sols agricoles.

Laurent Lequien

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Commentaires 3
à écrit le 10/09/2022 à 20:25
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A 7 euros le litre d'huile de tournesol qui ne rencontre aucun acquéreur dans les étalages ce n'est pas une question de pénurie mais plutôt de spéculation alimentaire... A quand le plafonnement des prix des denrées alimentaires de 1ère nécessit...

à écrit le 10/09/2022 à 16:15
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Revirement de "Macron qui appelle à acheter français" ? Alors qu'il a à de nombreuses reprises critiqué la France ("le gaulois") et soutenu tout ce qui est mondialiste

à écrit le 10/09/2022 à 11:10
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La bière et le sucre...bof pas grave c'est mauvais pour la santé. Par contre ce serait plus gênant pour le lait.

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