PSA Peugeot Citroën piégé par sa présence trop limitée hors d'Europe

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  1061  mots
La Peugeot 301 est faite pour les pays émergents. mais son coût n'est pas assez bas.
PSA est pris en étau entre la chute structurelle de ses parts de marché en Europe et son intercontinentalisation insuffisante. Il progresse en Chine mais sa pénétration y demeure assez faible. Il régresse au Brésil ou en Russie. PSA est absent d'Inde, d'Amérique du nord et... d'Iran.

Piégé. A l'heure où il discute d'une alliance avec le chinois Dongfeng, PSA Peugeot-Citroën, en mal d'argent frais, se trouve pris en étau entre la dégringolade continue de ses immatriculations en Europe et une présence encore beaucoup trop faible en-dehors. Très dangereux. Alors que son alliance stratégique avec l'américain GM montre ses limites, le constructeur automobile tricolore n'arrête pas de perdre structurellement des parts de marché sur le Vieux continent.

La crise n'est donc pas la seule responsable. Sur les huit premiers mois de l'année, PSA affiche ainsi dans l'Union européenne une pénétration de 11,2% seulement (hors utilitaires), contre 12,1% il y a un an, 13% il y a deux, 13,5% en 2010…. Et 14% au milieu des années 2000.

 Présence limitée en Chine

 Le problème, c'est que, malgré les discours récurrents sur l'internationalisation, PSA manque de réels relais de croissance en-dehors de la vieille Europe. Certes, il y a la Chine où ses ventes ont augmenté deux fois plus vite que le marché au premier semestre. Mais sa part de marché y demeure faible (3,8%). Et, sur les autres grands marchés, la situation est hélas peu brillante. "La situation est difficile en Russie et au Brésil", a reconnu Philippe Varin, son président, au dernier salon de Francfort la semaine dernière.

Une chute en Russie

En Russie, PSA a ainsi vu ses ventes reculer sur huit mois de 19% à 42.600 unités, avec une part de marché très faible de 2,4% à peine, selon les chiffres officiels de l'AEB, malgré le démarrage en fabrication locale des berlines Peugeot 408 et Citroën C4 Sedan... Les volumes sont trois fois inférieurs à ceux de Renault, malgré deux marques au lieu d'une. Peu glorieux. "C'est plus difficile que prévu", indique laconiquement Philippe Varin.

Les difficultés s'aggravent au Brésil

Au Brésil, autre marché désigné comme prioritaire pour l'internationalisation du groupe, ce n'est pas fameux non plus. PSA y chute de 18% sur huit mois à 76.300 exemplaires, selon les chiffres de l'Association des constructeurs locaux Anfavea. Soit un recul cinq fois plus rapide que celui du marché lui-même.

La chute de PSA frise les 40% sur le seul mois d'août, malgré le lancement de la nouvelle petite Peugeot 208, industrialisée à Porto Real (Etat de Rio). PSA y vend 40% de véhicules en moins par rapport à Renault, alors que, là aussi, il a deux marques et une gamme de modèles beaucoup plus large. Soit une pénétration de 4,2% seulement. Le groupe y perd de l'argent.

Une absence problématique en Inde

Le groupe tricolore est en outre totalement absent de l'Inde, autre grand marché prometteur, alors qu'il y avait été un temps industriellement présent dans les années 90. Après moult études et faute d'argent, le retour de PSA en Inde a été reporté sine die.

Enfin, PSA est le seul grand groupe automobile mondial à n'avoir aucune présence en Amérique du nord, où le marché est en plein boom. Renault y est au moins indirectement présent à travers son allié nippon Nissan ou l'italien Fiat via son partenaire Chrysler…

Un retrait d'Iran coûteux

A la demande de son allié GM, PSA a dû par ailleurs abandonner l'Iran, son deuxième débouché mondial derrière la France avec 472.800 unités en 2010. L'Iran était un marché historique pour Peugeot. Un prix à payer pour l'alliance nouée avec l'américain, qui exigeait que PSA se conformât à la politique de Washington vis-à-vis de l'Iran - où GM et Ford n'étaient pas !

Quant à l'Asie du sud-est, la présence de PSA y demeure confidentielle, en dépit d'un projet de Citroën avec le constructeur national malaisien Proton dans les années 90, qui a finalement avorté. Alors, où sont les "relais de croissance", dont parle Philippe Varin ?

Le succès se concentre sur... des petits marchés

Certes, PSA affiche de belles performances sur des marchés comme l'Argentine (+44% à 67.900 unités sur le premier semestre), l'Algérie (64.000 immatriculations sur sept mois) et la Turquie (34.000). Mais ce sont des marchés limités. Ce n'est pas ça, en tous cas, qui va contrebalancer la dégringolade en Europe (hors Russie), où PSA vend encore 58,5% de ses véhicules.

De petits dividendes chinois

PSA mise donc, de facto, son « intercontinentalisation » essentiellement sur la Chine. Au premier semestre, ses ventes ont crû dans l'ex-Empire du milieu de 33%. Et la firme envisage une progression d'un quart sur l'année à plus de 550.000 unités. Mais, pour un groupe qui avait été avec Volkswagen le premier étranger à s'y implanter dans les années 80, c'est encore peu. Après un accord industriel entre Peugeot et la mairie de Canton qui a capoté, puis entre Citroën et le groupe Dongfeng en 1990, PSA vend beaucoup moins sur place que les deux leaders GM et Volkswagen, mais aussi que Nissan ou le coréen Hyundai-Kia, arrivés bien plus tard.

Les activités chinoises de PSA sont certes enfin devenues bénéficiaires. Mais le dernier dividende versé par la co-entreprise chinoise DPCA à PSA reste dérisoire à… 100 millions d'euros. Rien à voir avec les milliards de profits des deux-co-entreprises locales de Volkswagen. Un gros coup de pouce de Dongfeng serait donc le bienvenu.

 L'arrivée des 301 et C-Elysée

Contrairement à Renault, qui su s'internationaliser et dispose d'un fer de lance décisif pour les pays émergents avec sa gamme à bas coûts (les fameuses Dacia Logan, Sandero ou le 4x4 Duster…), PSA manque notamment d'un petit véhicule pas cher pour percer en particulier au Brésil. Les récentes Peugeot 301 et Citroën C-Elysée sont certes d'excellents modèles d'entrée de gamme, mais ils sont dérivés de la 208 et produits à Vigo, en Espagne (sauf pour le Chine où ils sont prévus en industrialisation locale). Ce qui rend leur coût insuffisamment bas.

GM n'apporte rien hors d'Europe

Le constructeur français espérait certes beaucoup initialement de son alliance avec GM, nouée fin février 2012, pour se renforcer hors du Vieux continent. Mais, jusqu'ici, l'alliance franco-américaine reste cantonnée à l'Europe et le consortium du Michigan n'apporte aucune aide à PSA en-dehors. Le groupe hexagonal ne profite donc pas de la puissance de GM en Chine ou au Brésil, voire de sa présence en Inde. Fâcheux.