Bourse : Faurecia sera-t-il le nouveau Valeo ?

Le premier équipementier automobile français est réputé comme étant une valeur encore sous-valorisée. Les analystes estiment la décote entre 20 et 35%. Faurecia pourrait néanmoins revenir en force sur le marché compte tenu de ses excellents résultats financiers, mais également avec ses perspectives de croissance à long terme.
Nabil Bourassi
Le premier équipementier automobile français pourrait être la valeur offrant le plus fort potentiel du secteur automobile.

Les marchés financiers sont-ils toujours rationnels, comme ils le prétendent ? Difficile à constater, dans le cas de Faurecia... Le premier équipementier automobile français reste encore sous-valorisé, et ce, malgré ses bonnes performances financières.

Il suffit de voir sa valorisation boursière. Le groupe, qui pèse tout de même 18 milliards d'euros de chiffre d'affaires, ne vaut que 6 milliards d'euros en Bourse. A titre de comparaison, Valeo, l'autre grand équipementier français, affiche une valorisation de 14 milliards d'euros pour un chiffre d'affaires de 16 milliards seulement. En se penchant de plus près sur le ratio le plus pertinent en la matière, le PER (valeur boursière divisée par son bénéfice par action), Faurecia est à 9,8, contre 12,2 pour Valeo.

2016: l'excellent cru de Faurecia

Certes, Faurecia sort tout juste de convalescence après plusieurs années de crise et de restructuration, tandis que Valeo s'est remis sur les rails voilà plus de quatre ans déjà. En cinq ans, le titre de ce dernier a flambé de 430%, contre une hausse de "seulement" 230% pour Faurecia.

Mais le groupe dirigé depuis un an maintenant par Patrick Koller semble désormais bien parti pour rattraper son compatriote. L'année 2016 a été particulièrement brillante pour Faurecia. La marge opérationnelle a rebondi de 2 points pour atteindre 6,2%. Celle de Valeo est encore loin devant à 8,1%, mais peu importe la dynamique est là. « Vous êtes le nouveau Valeo », aurait ainsi déclaré un gérant de portefeuille à un Patrick Koller tout sourire, à l'occasion de la divulgation du plan stratégique de la branche Clean Mobility (technologies environnementales).

Beaucoup d'analystes estiment en effet que Valeo pourrait avoir atteint un plus haut, sans toutefois exclure que celle-ci continue à progresser compte tenu des résultats de l'entreprise qui surprennent jusqu'à son PDG lui-même, Jacques Aschenbroich. Il n'empêche que Faurecia pourrait constituer une belle alternative dans le secteur.

« Faurecia est en effet une des valeurs avec le plus fort potentiel de hausse car elle présente aujourd'hui encore une décote de 35% par rapport à ses concurrents, contre une décote historique de 10% », explique Marco Bruzzo, Directeur Général Délégué de Mirabaud Asset Management.

| Lire aussi : "Faurecia doit reconstruire un lien de confiance avec les marchés" Patrick Koller

Olivier Baduel, responsable de la gestion Actions Large Cap chez OFI AM, rappelle que le mouvement a déjà commencé puisque le titre Faurecia a déjà progressé de 20% depuis le début de l'année « intégrant ainsi les améliorations intervenues au cours de ces dernières années. D'une part, la marge opérationnelle s'est très sensiblement redressée et se rapproche de celle de ses concurrents. D'autre part, la structure financière a été très nettement renforcée ». L'analyste se veut toutefois plus prudent en estimant la décote à 20%.

Et il ajoute : « La société est aujourd'hui presque totalement désendettée suite à la cession, l'an dernier, de sa division « extérieur » (les pare-chocs) au groupe Plastic Omnium. »

Cette cession pourrait avoir ainsi constitué le point de départ du redressement du titre puisque celui-ci a augmenté de 60% en un an, après avoir fait du surplace les deux années précédentes.

« Ces performances placent clairement la société dans le groupe de tête de son secteur avec une performance près de 3 fois supérieure au marché depuis le début de l'année et de plus du double sur 1 an », poursuit Olivier Baduel d'OFI AM.

Marco Bruzzo partage cette analyse, ajoutant que la conjoncture réglementaire pourrait jouer en la faveur du groupe : « La société devrait énormément bénéficier de l'évolution de la réglementation à travers la réduction des émissions de CO2 et des polluants, et la réduction de la consommation de carburant. »

Et de poursuivre: « Faurecia bénéficie en outre d'une excellente visibilité avec 53 milliards d'euros d'entrées de commandes et d'une amélioration des marges grâce à un mix géographique, la Chine va doubler de taille à 5 milliards d'euros avec une marge opérationnelle de 12%, et un mix produits, avec la division Clean Mobility où la société est leader avec des marges proches de 10%. La marge opérationnelle pourrait ainsi passer de 5.2% en 2016 à plus de 7% à compter de 2018. »

L'innovation, levier de croissance rentable

C'était d'ailleurs tout l'objet de la journée investisseur organisée par Patrick Koller mardi dernier à Londres : dérouler le plan de développement stratégique et d'innovation autour des technologies propres regroupées dans la branche Clean Mobility. Faurecia est déterminé à accentuer ses efforts pour conserver son titre de leader mondial dans les systèmes de dépollution (SCR, EGR...). Le groupe veut également se positionner sur le marché des voitures électriques en plein boom et sur celui des voitures à hydrogène - il proposera dès 2019 une voiture de ce type.

Faurecia fait également évoluer son business model en tentant de multiplier les revenus récurrents. Avec le rachat du danois Amminex, le français veut pouvoir équiper des flottes de bus, camions de l'ASDS, un système plus efficient que le SCR et son Ad-blue (de l'ammoniac qui arrose les gaz d'échappements pour neutralise les Nox) avec un système qui consiste à installer des cartouches qu'il faut nécessairement changer. Faurecia promet que le coût d'achat et d'usage sera inférieur à celui de l'Ad-Blue. Il vient d'ailleurs de remporter plusieurs contrats à l'international pour équiper de grandes métropoles (Séoul, Londres, Copenhague). En clair, Faurecia veut faire de l'innovation, le principal levier de croissance rentable, soit le modèle mis en place avec succès par Jacques Aschenbroich chez Valeo. Patrick Koller a promis de présenter des plans stratégiques pour ses autres activités notamment son activité « intérieur » avec le cockpit du futur.

Un titre encore fragile et sous pression

Mais Faurecia pourrait rencontrer plusieurs écueils sur le chemin d'un rallye boursier. D'abord, la conjoncture ne joue pas à 100% en sa faveur. Cette semaine, l'annonce d'un avertissement sur résultats d'un équipementier automobile allemand et les signaux répétés d'un ralentissement aux Etats-Unis ont fait plonger le secteur. Faurecia plus que les autres, alors même que son exposition aux Etats-Unis est assez réduite. Le titre Faurecia baisse ainsi de 7% sur une semaine, là où il baisse de seulement 5,5% chez Valeo et de 4% chez Plastic Omnium. C'est encore le signe d'une certaine fragilité du titre.

De l'aveu même de Patrick Koller, Faurecia doit reconstruire la confiance avec les marchés financiers. « Cette faiblesse est de notre responsabilité. Toute la stratégie de Faurecia est désormais de se focaliser sur la construction de la confiance. Nous communiquons davantage sur ce que nous faisons, et nous faisons la démonstration que nous tenons nos promesses. Mais cette démarche doit s'inscrire dans la durée », a-t-il ainsi déclaré dans une interview à La Tribune.

La hausse du prix des matières premières pourrait aussi peser sur les résultats de Faurecia, sans parler des effets de changes qui ont atteint d'importants niveaux de volatilité, notamment en Europe avec la Livre. Le momentum du retour de Faurecia pourrait également être en décalage avec le cycle haussier du secteur qui serait en passe de prendre fin.

PSA veut vendre ses 47% du capital

Enfin, les intentions de PSA ne sont pas neutres. Le groupe automobile français, actionnaire historique de Faurecia dans lequel il est passé sous la barre des 50% fin 2015, pourrait continuer à descendre dans le capital. Patrick Koller se veut rassurant : « Nous agirons de façon coordonnée. » Il s'agit pour le patron de Faurecia de ne pas laisser PSA déverser ses 47% d'actions sur le marché ce qui pourrait tirer le titre vers le bas.

Les analystes, eux, ne sont pas inquiets. « Le risque que tout ou partie du capital détenu par le groupe PSA puisse être cédé ne doit pas constituer en soi un frein à l'investissement », insiste Olivier Baduel. Marco Bruzzo, de Mirabaud AM, lui, juge que l'hypothèse d'un retrait de PSA « n'est pas un motif d'incertitudes pesant sur le titre ».

Patrick Koller estime que Carlos Tavares, PDG de PSA, croit au potentiel de Faurecia et qu'il ne cédera ses titres que lorsque ceux-ci auront grimpé. Il espère peut-être ainsi éviter d'avoir recours à un coûteux programme de rachat d'actions pour soutenir le cours...

Nabil Bourassi

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Commentaire 1
à écrit le 30/06/2017 à 18:06
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Récapitulons : Faurecia : CA 18M€ - capitalisation 6M€ Valeo. : CA 16M€ - capitalisation 14 M€ PER : capitalisation / bénéfice Faurecia : 9,8 soit 0.612M€ bénéfice Valeo. : 12,2 soit 1,14M€ bénéfice Marge : bénéfice / CA Faurecia : 3,4% V...

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