
« Hopium en déroute », titrait il y a quelques jours Caradisiac. Le média spécialisé dans l'automobile aurait-il enterré un peu vite la startup fondée par le pilote de Formule 1 Olivier Lombard ? C'est en tout cas ce dont semble persuadée la Région Normandie. Réunis le 24 février avec un seul dossier à l'ordre du jour, les élus de sa commission permanente ont accepté de lui accorder un prêt de 2 millions d'euros à taux nul, remboursable au terme de 18 mois.
Cette injection de cash est bienvenue pour Hopium qui traverse une période de turbulences après un démarrage sur les chapeaux de roues. L'entreprise, dont la trésorerie est à marée basse, a du se séparer d'une partie de ses salariés et a des besoins d'investissements en R&D importants. Elle est, de plus, dans l'attente du déblocage de la ligne de financement en fonds propres de 50 millions d'euros promise, en juin dernier, par la société de gestion américaine LDA Capital. « Comme l'opération a pris un peu de retard, nous apportons un concours très circonstanciel assimilable à un bridge de trésorerie bancaire », justifie-t-on dans l'entourage d'Hervé Morin, président de la Région.
Virage sur l'aile
Déjà investi dans plusieurs projets liés à l'hydrogène, l'exécutif régional a manifestement été rassuré par le nouveau modèle d'affaires de la jeune société dont la gouvernance a été remaniée récemment. Rétrogradé au rang de DG adjoint en charge du produit, Olivier Lombard a passé le témoin à deux co-directeurs aux CV dorés sur tranche : Sylvain Laurent, ancien vice-président de Dassault Systèmes en Chine et l'homme d'affaires Philippe Baudillon, président de SIMA international et du Racing Club de France, Jean-Baptiste Djebbari, ex ministre des Transports conservant la présidence du Conseil d'administration.
Ces deux arrivées se sont accompagnées d'une réorientation stratégique. Exit au moins provisoirement la berline haut de gamme à 120.000 euros qui était présentée comme la « Tesla de l'hydrogène ». Hopium effectue un virage sur l'aile et mise désormais en priorité sur la pile à combustible (PAC) « à haute puissance d'une performance inégalée » mise au point par ses ingénieurs.
« Un actif technologique différenciant »
« L'aide apportée par la Région permettra à nos équipes d'accélérer pour que notre pile à combustible hydrogène voit le jour avant la fin de l'année 2023 », salue Sylvain Laurent dans un communiqué publié il y a quelques jours. Les nouveaux dirigeants de la société croient, en effet, dur comme fer dans les promesses de cette PAC, fruit d'un assemblage de cellules, qui devrait être commercialisée sous licence ou non.
« C'est un actif technologique différenciant ayant fait l'objet de 16 dépôts de brevets », insiste de son côté Philippe Baudillon. « Il a été estimé à plusieurs centaines de millions d'euros par des experts », nous assure t-on en écho dans les services de la collectivité régionale où l'on estime prendre peu de risques en volant au secours d'Hopium dont l'usine devrait voir le jour en 2025 en bordure de l'autoroute A13, à quelques kilomètres de Vernon (Eure), au barycentre du berceau français de l'automobile.
Un premier client en embuscade
Les intéressés ne semblent pas être les seuls à y croire. Selon les informations recueillies par La Tribune, la jeune société serait à la veille de signer un accord avec un grand constructeur automobile français en vue d'embarquer sa PAC dans des véhicules utilitaires légers. Une source bien informée croit également savoir que le dossier est l'objet d'une attention bienveillante dans les bureaux de Bercy où Bruno Le Maire devrait avoir à cœur de le défendre.
En visite dans l'usine GSK d'Evreux, l'ex député de l'Eure déplorait l'autre jour la « désindustrialisation » de son ancien fief et ses conséquences supposées « sur le vote extrême » . Avec Hopium, il a peut-être trouvé du grain à moudre. Ce soutien, s'il advient, ne serait pas pour déplaire à Hervé Morin qui met résolument ses pendules à l'heure H. « Au travers de cette aide exceptionnelle qui doit permettre à l'entreprise de poursuivre sa croissance dans un marché mondial très concurrentiel, la Région réaffirme sa volonté de porter une véritable ambition pour le rayonnement de la filière hydrogène », revendique le Normand. Affaire à suivre.
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