Qui gagnera la bataille du contenu embarqué dans l'automobile ?

Après l'ordinateur et le smartphone, la voiture autonome d'ici cinq ans environ est considérée comme la troisième vague de l'Internet. Des Gafa aux éditeurs de médias en passant par les constructeurs automobiles eux-mêmes, chacun compte bien assurer sa présence dans le futur écosystème du contenu embarqué.
La présentation du projet AEX au Mondial 2018 avait suscité l’intérêt marqué des visiteurs.
La présentation du projet AEX au Mondial 2018 avait suscité l’intérêt marqué des visiteurs. (Crédits : [RENAULT])

La maîtrise de l'expérience éditoriale, audio et vidéo, qui sera proposée à bord de l'automobile a déjà commencé à faire l'objet d'une rude bataille entre les différents acteurs en présence. En ligne de mire, le temps de cerveau disponible pendant les trajets, pour l'instant accaparé par la seule radio, faute d'autonomie de la voiture. Google et Apple ont accéléré leur positionnement sur ce créneau depuis au moins trois ans. Avec la maîtrise des deux principaux systèmes d'exploitation, Androïd et IOS, ils bénéficient d'un avantage majeur dans la mesure où le smartphone constituera (au moins dans un premier temps) la porte d'entrée dans les voitures.

Dotés de cet atout technologique central, Google et Apple se musclent également côté contenu. Avec YouTube et Spotify du côté du groupe de Mountain View, Apple TV et Apple music chez la firme à la pomme, les deux géants veulent gagner un avantage décisif sur la vidéo et la musique diffusées au sein des futurs tableaux de bord. Avec Itune, première plate-forme de podcasts, Apple détient également un avantage décisif concernant ce format particulièrement adapté à l'automobile. Amazon, qui a racheté Audible, leader de livres audio, a lui aussi bien l'intention de se positionner. Netflix vise enfin une place côté vidéo après avoir signé (comme YouTube) un accord, fin juillet, avec le fabriquant américain de voitures électriques Tesla. Facebook, en train de recruter des journalistes à l'échelon mondial, pourrait lui-même embarquer son propre contenu dans les futurs véhicules autonomes.

Meilleure expérience à bord

La stratégie de Google, qui consiste à se positionner sur la tranche matinale, créneau publicitaire phare des radios, et d'Apple privilégiant le développement des abonnements à ses services depuis la baisse de la vente des iPhones, suscitent les craintes des autres acteurs du futur écosystème. Dans ce contexte de prééminence des Gafa, constructeurs automobiles et fournisseurs de médias classiques ont bien l'intention de se prémunir au maximum. Après la montée exponentielle à partir de 2010 du smartphone comme premier appareil d'information, les groupes de médias européens viennent seulement d'obtenir le vote par le Parlement d'un droit voisin au droit d'auteur leur permettant d'être enfin rémunérés par les Gafa pour l'utilisation de leurs contenus.

En adoptant une politique volontariste dès 2018 avec le partenariat avec Publicis sur une future plate-forme de contenu baptisée Augmented Editorial Experience, l'Alliance Renault Nissan poursuit deux objectifs. D'une part, le constructeur donne un signe clair au marché de son souhait d'avoir un coup d'avance et de continuer à maîtriser la partie non mécanique de ses véhicules. Il y va de sa crédibilité alors que l'électronique représente déjà en moyenne 50 % de la valeur des voitures. L'accord passé en septembre 2018 entre Google et Renault pour utiliser Android ne remet pas en cause cette stratégie, dans la mesure où il a pour but essentiel d'installer en série les applications de cartographies Waze et Google Maps à bord des véhicules.

Le constructeur compte d'autre part proposer une expérience de navigation premium à ses clients, grâce à un contenu qualitatif et diversifié. Le chantier d'AEX démarré en juillet par Relaxnews, filiale éditoriale de Publicis, s'inscrit dans la volonté de passer d'une logique passive à une logique active pendant le temps de transport. Via, au départ, une application sur smartphone, AEX compte proposer un spectre étendu de contenus. Des podcasts fournis par le groupe Challenges (dont Renault est actionnaire) mais aussi par les quotidiens français (Le Monde, Le Figaro) et étrangers (Financial Time), avec qui Relaxnews discute, ainsi que des livres audio, feront notamment partie du catalogue. Renault, qui investira plusieurs dizaines de millions d'euros dans AEX, espère pouvoir présenter un outil abouti au prochain Mondial de l'automobile, en octobre 2020.

Nouveaux acteurs médias

Cette volonté de permettre aux automobilistes d'utiliser leur temps de conduite pour apprendre, se relaxer ou encore se distraire, par le biais d'AEX ou d'autres interfaces éventuelles, se traduira inévitablement par l'émergence de médias spécialement formatés pour le nouveau support automobile, selon Benoît Raphaël, expert digital.

Le lancement de la tablette iPad par Apple avait ainsi suscité l'arrivée de l'agrégateur Flipboard. Sur le futur champ de bataille du contenu embarqué dans la voiture, les nouveaux acteurs autour de la formation, des jeux, de la relaxation et du bien-être notamment ne devraient pas manquer non plus de frapper à la portière des futurs véhicules autonomes.

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