
C'était en décembre 2021 : réunies par le Cercle des femmes de l'immobilier, 120 entreprises et organisations signaient au Salon de l'immobilier d'entreprise (Simi) « une charte d'engagement en faveur de la parité et de l'égalité professionnelle femmes-hommes » avec des objectifs et des plans d'action. Tant est si bien qu'en mars 2022, était créé un Observatoire de la charte de la parité dans l'immobilier, afin de « suivre le périmètre des signataires, dresser un bilan régulier des actions menées, identifier les freins et les bonnes pratiques, contribuer à améliorer les choses ainsi qu'à traquer les biais cognitifs et à casser les schémas dans les écoles », explique à La Tribune sa présidente Isabelle Rossignol.
Plus d'un salarié sur deux est une femme
Sans surprise, près d'un an plus tard, il en ressort que « les entreprises les plus avancées sont celles dont les dirigeants sont les plus impliqués », déclare Stéphanie Galiègue, directrice générale déléguée chargée de la recherche et des études à l'Institut de l'épargne immobilière et foncière (IEIF).
« L'impulsion du dirigeant est extrêmement importante mais il doit aussi mettre en marche toute l'entreprise. La recette consiste à demander aux collaborateurs les objectifs les plus pertinents et à suggérer des actions », appuie la présidente de l'Observatoire Isabelle Rossignol.
Il n'empêche : s'il existe 51,7% de salariées femmes dans l'immobilier, elles restent sous-représentées dans les comités exécutifs et les comités de direction. En effet, il y a en moyenne 3 femmes pour 5,5 hommes. Pis, 26 % des entreprises n'ont aucune femme au sein de leurs instances dirigeantes... Idem dans le top 10 des salaires avec seulement 3,4 femmes voire moins de 3 dans les métiers du conseil, de l'expertise et de la promotion immobilière.
Des biais cognitifs repérés dès l'école
D'après la sociologue Chantal Schmitt qui a réalisé des entretiens qualitatifs, les hommes ont tendance à favoriser les candidats ayant le même profil et à leur reconnaître plus de compétences et de leadership. Tout comme certaines femmes « manquent » de désir de promotion, soit par honnêteté intellectuelle, soit par peur de l'échec, ou redoutent que « la maternité ne marque un coup d'arrêt à leur évolution dans l'entreprise ».
Des biais cognitifs que la directrice de l'Ecole supérieure des professions immobilières (ESPI) a également repérés chez les jeunes générations et qu'elle s'évertue de « casser ».
« Le géomètre qui trimballe son matériel partout, c'est terminé. Aujourd'hui, ce n'est plus seulement un métier technique et de terrain, mais un métier de conseil avec des relations aux entreprises », illustre Lina Mounir, responsable Pôle marchés immobiliers - Analyste Senior à l'Institut de l'épargne immobilière et foncière (IEIF).
Seules 20% se disent prêtes à publier des objectifs chiffrés
La route reste néanmoins encore longue. Seules 20% des entreprises et organisation signataires de la Charte de la parité se disent prêtes à publier leurs objectifs chiffrés et les résultats, notamment dans les postes de direction. Par exemple, recruter ou promouvoir 50% de femmes d'ici à 2025 ou faire progresser de 10% par an le nombre de femmes à des postes de management.
« La publication suppose d'accepter d'être observé en interne et en externe. Même en interne, cela veut dire que les collaborateurs vont pouvoir se faire une idée sur leur entreprise. Autrement dit, ça condamne au succès ! » veut croire Isabelle Rossignol, présidente de l'Observatoire de la charte.
En réalité, engager une analyse annuelle chiffrée sur les niveaux de rémunération et la rendre publique, bien que nécessaire, s'avère complexe à mettre en œuvre.
« Cela demande de mettre en place un processus interne qui, souvent, n'existe pas et cela va nécessiter des enveloppes financières pour rattraper les écarts. Sachant que les moyens ne sont pas extensibles à l'infini, il faut aussi éviter le saupoudrage et ne pas tomber dans l'iniquité », souligne Stéphanie Galiègue, DG déléguée à l'IEIF.
Une précédente étude de mars 2021 montre pourtant que plus de femmes encadrant la performance est synonyme d'une bien meilleure productivité. Toutes choses étant égales par ailleurs, des institutions font de plus en plus d'appels d'offres avec des critères d'égalité femme/homme en exigeant des indicateurs chiffrés sur le sujet.
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