Logement : la troisième vie du 7-9 rue Victor-Schœlcher à Paris

Pour le compte de la RIVP, le bailleur social de la Ville de Paris, l’architecte Alain Sarfati a converti un immeuble de bureaux en logements, vingt-sept ans après avoir opéré la transformation inverse.
César Armand
La nouvelle version du bâtiment de couleur blanche et bardée de métal tissé, se démarque de l'immeuble en brique en arrière-plan, où dominent la pierre, le zinc et les tuiles.
La nouvelle version du bâtiment de couleur blanche et bardée de métal tissé, se démarque de l'immeuble en brique en arrière-plan, où dominent la pierre, le zinc et les tuiles. (Crédits : DR)

En face du cimetière Montparnasse, entre la fondation Giacometti et l'adresse historique de Simone de Beauvoir, se situe le 7-9 rue Victor-Schoelcher dans le XIVe arrondissement de Paris. « L'existence précède l'essence » expliquait, en 1945, Jean-Paul Sartre, le compagnon de l'écrivaine, défendant l'idée selon laquelle l'homme est maître de son destin, quelle que soit son origine sociale. Appliquée à un immeuble, cette pensée reflète les multiples vies qu'il a pu connaître quelle qu'ait été l'intention de son concepteur.

Après avoir abrité des logements entre 1957 et 1989, le bâtiment est devenu, en 1992, un immeuble de bureaux pour la Société anonyme de gestion des eaux de Paris (Sagep), avant de redevenir il y a quelques semaines sous l'autorité de la Régie immobilière de la ville de Paris (RIVP) un ensemble de logements sociaux.

« Il y a presque 30 ans, Georges Mercadal, alors tout nouveau DG de la Sagep me dit : "C'est ici que sera le nouveau siège, il me faut l'envie d'y venir tous les jours, cet endroit est sinistre avec vue sur le cimetière'', se souvient Alain Sarfati, l'architecte qui a présidé aux deux transformations. La métaphore aquatique s'est vite imposée sous la forme de cette grande façade blanche. »

Et en effet, celle-ci créée il y a 25 ans ondule, entre plis et replis, telle une vague, comme si l'on ressentait les vertus apaisantes de l'eau.

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bâtiment, chantier, construction

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De la réversibilité

Sa couleur blanche a, elle aussi, été maintenue comme une « évidence bioclimatique » pour une façade exposée à l'Ouest.

« Aujourd'hui, le logement social se distingue entre autres par l'utilisation de la couleur : on voit des bâtiments rouges ou verts [mais] la couleur stigmatise ces programmes alors que tout est fait pour que la mixité sociale soit possible, pour que la ville soit vivable par tous », s'agace Alain Sarfati.

Les 4.417 mètres carrés de bureaux ont été métamorphosés en 54 logements allant du studio au cinq pièces, sur 3.830 mètres carrés, et là encore, l'accent a été mis sur la réversibilité. « Nous avons voulu permettre que des transformations soient possibles dans le temps, que des évolutions de la distribution intérieure soient faciles, que l'on puisse trouver la pièce en plus tant convoitée. Et puis techniquement, les gaines sont disposées de telle manière que l'on pourra un jour y refaire un ou plusieurs étages de bureaux », assure l'architecte.

Sur le palier de chacun des six étages, l'entrée des appartements donne sur une longue coursive horizontale inclinée, elle-même bardée de métal tissé vertical placé ainsi pour offrir de l'intimité aux habitants. Comme l'a relevé une locataire pendant notre visite, il n'est même pas possible d'y installer des pots de fleurs.

« Il faut se rendre à l'évidence : il est indispensable de poser des limites, explique Alain Sarfati. Si on laisse les coursives se remplir, on va y trouver des vélos, des barbecues, des bouteilles de gaz... Cela devient compliqué ! La coursive n'est pas un balcon facilement privatisable. »

En revanche, les occupants peuvent s'approprier l'intérieur des logements. En témoigne une cuisine en cours de réaménagement par un locataire. « Des gens transforment leur salle de bains, changent le revêtement du sol, commente l'architecte. Cela veut dire qu'ils ont envie de rester, de s'installer durablement. »

De retour sur la coursive, de l'inox poli installé sur une autre façade réverbère la lumière à l'intérieur des espaces collectifs et privatifs. « Les écailles sont une vêture, un habillage pour les isolants, décrypte Alain Sarfati. La façade extérieure, ainsi qu'une partie importante des façades intérieures, sont constituées d'une structure en béton, d'un isolant thermique et d'une protection fabriquée en Alucobond [panneau composé de deux tôles d'aluminium avec un noyau minéral ignifuge, ndlr] ». Même si rebâtir un immeuble sur lui-même relève de la transition écologique, cette dimension n'est pas immédiatement perceptible. L'architecte s'en défend :

« Je préfère parler de la dimension bioclimatique d'un bâtiment, de sa capacité à prendre en compte l'orientation des vents dominants et l'ensoleillement, pour adapter les façades, les matériaux et les ouvertures à ces différents aspects ».

Et, promis, les matériaux sont recyclables.

César Armand

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