Lutte contre Zika : les labos français tentent de creuser leur trou

Après Sanofi, la société franco-autrichienne Valneva se lance dans le développement d'un vaccin contre le virus Zika, un grand sujet d'inquiétude outre-Atlantique. Les deux Français font partie de la douzaine de sociétés en compétition dans la recherche d'un produit immunisant.
Jean-Yves Paillé
Une soixantaine de pays sont touchés par le virus Zika, selon l'OMS.

Rarement, la Banque européenne d'investissement (BEI) a prêté autant d'argent à une société pharmaceutique. Le Franco-Autrichien Valneva a signé mardi 12 juillet un contrat pour recevoir un prêt de l'institution de 25 millions d'euros sur cinq ans, remboursable à échéance. "Nous avons mis la somme maximale et atteint le plafond pour ce type d'investissements, car nous croyons en la qualité de la société et de ses projets", se félicite Ambroise Fayolle, vice-président de la BEI. L'aide va permettre à Valneva d'investir dans sa R et D.

Et ce, pour deux produits en particulier : un vaccin contre la maladie de Lyme, actuellement en phase I, et un candidat vaccin contre le virus Zika, dernière découverte de poids de la société franco-autrichienne, annoncée vendredi 8 juillet. Pour donner naissance à ce produit-là, Valneva s'est appuyé sur la plateforme de production de son vaccin contre l'encéphalite japonaise, de la même famille que le virus Zika, approuvé par les autorités de santé américaine et européenne.

"Nous avons commencé à nous intéresser au développement de ce vaccin contre Zika en septembre", détaille Franck Grimaud, directeur général de Valneva. Il explique avoir mesuré l'évolution de l'épidémie pour se lancer. Une question de rentabilité pour une société pour le moment dans le rouge (20,6 millions d'euros de pertes nettes en 2015).

Actuellement le candidat vaccin contre le virus Zika est en phase pré-clinique, testé sur des animaux. Mais la société franco-autrichienne estime que pour avancer jusqu'au bout dans le développement en phase clinique, elle devra à terme s'associer à un laboratoire pharmaceutique, en raison du coût, qui peut grimper à plusieurs centaines de millions d'euros pour une phase III (la dernière phase avec un lancement sur le marché).

Le candidat vaccin "pourrait néanmoins entrer en phase clinique d'ici deux à six mois. Nous avons une unité de production en Ecosse prête à produire des produits pour ces essais cliniques", assure Thomas Lingelbach, président du directoire de Valneva.

"Dès que nous aurons trouvé un accord avec des autorités publiques, aux Etats-Unis ou au Brésil, nous lancerons un essai clinique" sur Zika, précise Franck Grimaud.

Sanofi va lancer un essai clinique de phase I

Valneva est donc le deuxième français à avoir publié des avancées sérieuses dans la recherche d'un vaccin contre cette maladie transmise par les moustiques et pour laquelle il n'existe encore aucun traitement ou vaccin approuvé sur le marché.

Le premier est Sanofi. Il s'est lancé dans la course mondiale contre le virus Zika en février, s'appuyant sur ses installations industrielles mises en place pour produire le Dengvaxia, son vaccin contre la dengue autorisé dans plusieurs pays. Il mise sur l'apparentement entre les deux virus et donc une recherche accélérée.

Mercredi 6 juillet le géant pharmaceutique est allé plus loin. Il a annoncé un accord de collaboration de recherche et développement avec le Walter Reed Army Institute of Research (WRAIR), un organisme du département américain de la Défense. WRAIR cèdera à la société sa technologie relative au vaccin purifié à base de virus Zika inactivé "ce qui ouvrira la voie à une collaboration plus large avec le gouvernement américain", explique Sanofi. Le Français va ainsi produire des lots cliniques pour des essais de phase II. La stratégie de Sanofi est claire: multiplier les pistes de recherche en parallèle pour augmenter ses chances d'être le premier à lancer un vaccin sur le marché.

Une douzaine de sociétés dans la course

Fierce Pharma, média spécialisé dans l'industrie pharmaceutique, recense une douzaine de sociétés dans le monde tentent de trouver un vaccin contre le virus. Parmi les concurrents les plus sérieux des deux Français, il y a GSK. La laboratoire pharmaceutique britannique s'est associé au National Institutes of Health des Etats-Unis pour mener une étude clinique de phase I.

Si le programme de Sanofi semble plus avancé que celui de GSK (phase II contre phase I), la biotech américaine Inovio Pharmaceutical estla première société à avoir lancé un essai clinique aux Etats-Unis contre le virus Zika, avec le GLS-5700,  un vaccin à ADN (une variante de la thérapie génique consiste à insérer un fragment d'ADN, comme le rappelle l'Inserm).

Les Etats-Unis, en pointe dans la lutte contre Zika

Comme Sanofi et GSK, les société pharmaceutiques ont intérêt à s'associer aux institutions américaines pour avancer dans leurs recherches. Le pays est, de par ses moyens techniques et investis, l'un des plus impliqué dans la lutte contre le virus. Notamment en raison de ses craintes d'une expansion de l'épidémie. Des préoccupations renforcées après la mort d'un premier patient fin avril dans l'île de Porto Rico, suivi d'un premier décès dans la zone continentale en juillet.

En outre, Barack Obama envisage la mise place d'un "fonds d'urgence anti-Zika" de 1,9 milliard de dollars. Ses prétentions ont été revues à la baisse. Le Sénat s'est prononcé pour un fonds de 1,1 milliard de dollars, rapporte le Wall Street Journal.

Si la recherche se concentre particulièrement sur les Etats-Unis, l'un des principaux marchés pour un vaccin contre ce virus à l'origine de cas de microcéphalie et de syndrome de Guillain-Barré serait le Brésil. Le pays a investi 136 million de dollars pour lutter contre les maladies transmises par les moustiques. Pour rappel, depuis 2015, plus de 1,5 million de personnes ont été contaminées dans ce pays, le plus touché par ce virus transmis par les moustiques. En mai, plus de 1.200 cas de microcéphalie ont été recensés au Brésil.

>> Carte de l'OMS montrant la propagation du virus dans le monde depuis son identification en 1947

Jean-Yves Paillé

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