Les Chinois sèment la zizanie entre EDF et Areva

Au-delà du « parfait climat de coopération» entre Areva et EDF vanté par son président Henri Proglio, les deux groupes négocient âprement, notamment autour de la mine d'Imouraren (Niger) et du futur réacteur de 1.000 MW qui doit être conçu avec les Chinois.
Henri Proglio, le PDG d'EDF, s'est déclaré hier prêt à répondre avec l'électricien chinois CGNPC à l'appel d'offres que l'Afrique du Sud pourrait lancer d'ici à la fin du premier semestre. Photo : Reuters

Derrière la réconciliation spectaculaire d' EDF et d'Areva, exigée par l?Elysée, et facilitée par le départ d?Anne Lauvergeon du groupe nucléaire, les tensions restent vives. Le point le plus épineux demeure le rôle que seront amenés à jouer les Chinois qu?Henri Proglio s?acharne à imposer comme partenaires, quitte à faire de l?ombre à Areva. Ainsi, le PDG d?EDF s?est déclaré hier prêt à répondre avec l?électricien chinois CGNPC à l'appel d'offres que l'Afrique du Sud pourrait lancer d'ici à la fin du premier semestre.

"On est en situation de proposer soit une technologie complètement française de type EPR, soit une technologie franco-chinoise en association avec Areva et CGNPC, ça va dépendre des appels d'offre", a déclaré Henri Proglio, en marge d'une conférence de presse. "(Les Sud-Africains) nous ont dit qu'ils souhaitaient que nous soyons en partenariat avec les Chinois. Et donc si c'est cela qu'ils veulent, c'est ce que nous ferons", a pour sa part déclaré Hervé Machenaud, directeur exécutif d'EDF en charge de la production et de l'ingénierie.

Areva fait grise mine

Chez Areva, qui était sûr d'avoir remporté le premier appel d?offres annulé au dernier moment fin 2008 par Pretoria, on fait grise mine. Henri Proglio, lui, ne change pas de cap. Au printemps 2010, il avait proposé un protocole d?accord à l'électricien CGNPC, avec lequel il construit deux EPR en Chine, prévoyant notamment la création d?un groupe de travail pour réfléchir à la participation de l?électricien chinois aux futurs réacteurs en France, en tant qu?« investisseur et fournisseur de services ». Comme l?a révélé le Nouvel Observateur, les deux députés socialistes Bernard Cazeneuve (Manche) et Jean-Marc Ayrault (Loire-Atlantique) qui ont eu connaissance de ce projet, s?en sont émus fin décembre dernier auprès du premier ministre, François Fillon.
EDF et Areva bataillent actuellement autour du futur réacteur de 1.000 MW dont la France veut disposer. « Un accord de coopération tripartite entre EDF, Areva et notre partenaire chinois CGNPC est bouclé. Nous travaillons dans un parfait climat de coopération », se félicitait jeudi Henri Proglio. C?est vite dit. En fait, les négociations les plus sensibles débutent maintenant, sur le choix de la technologie. Enjeu crucial pour Areva qui ne dispose pour l?heure que d?un unique modèle de réacteur, l?EPR, compliqué et coûteux.

Sans l'Atmea, Areva se retirera

Jusqu?à présent, les trois groupes se sont juste mis d?accord pour travailler ensemble. Ce qui n?était pas acquis puisque Areva entendait imposer comme réacteur de moyenne puissance son Atmea, une déclinaison de l?EPR conçue avec le japonais Mitsubishi. EDF, de son côté, est réticent à dupliquer le design complexe de l?EPR et tient par-dessus tout à développer sa coopération avec les Chinois. Henri Proglio a gagné la première manche puisqu?il a obtenu que l?Elysée impose la présence de l?électricien CGNPC.
Reste à décider de la technologie de ce futur réacteur, sachant que tous s?accordent sur le fort potentiel commercial d?un modèle de 1.000 MW, moins cher et plus simple pour un pays qui veut faire ses premiers pas dans l?atome.
EDF souhaiterait travailler sur la base du CPR1000, un réacteur chinois développé à partir de l?avant dernière génération des réacteurs français (900 MW). « Si on ne travaille pas sur l?Atmea, on ne restera pas dans cette alliance », affirme-t-on en interne chez Areva. Le constructeur nucléaire refuse de laisser évincer son Atmea, dont le développement a coûté 100 millions d?euros, et surtout dont il détient les droits de propriété. Areva met en avant la disponibilité immédiate du modèle, qui vient d?obtenir un feu vert de l?Autorité de sureté française.

EDF envisage de prendre 10% de la mine géante d'Imouraren

Enfin, les deux ex-ennemis semblent discuter plus sereinement d?uranium. Après un nouvel accord long terme (2014-2030 ) sur la fourniture de combustible conclu la semaine dernière, EDF a annoncé jeudi son intention de prendre 10% d'un actif minier d?Areva en échange de la fourniture de 10% de la production. Les négociations en cours portent, selon Hervé Machenaud, sur " plusieurs gisements géographiquement dispersés et majoritairement en Afrique ». Selon Areva, ces discussions ne concernent que la future mine géante d?Imouraren, au Niger, une des plus importantes réserves au monde, dont la mise en service, plusieurs fois reculée, est désormais prévue à horizon 2014. Son développement est estimé à 1,2 milliard d'euros. 

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Commentaires 2
à écrit le 17/02/2012 à 13:47
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Dans la gamme des "petits " réacteurs nucléaire il y a aussi la DCNS qui développe une version civil immergeable en mer des réacteurs équipant nos SNLE. Une technologie éprouvée.

à écrit le 17/02/2012 à 9:57
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Encore un succès de Nicolas Sarkozy: les ratés de l'exportation du nucléaire parce que l'Etat français n'a plus de politique industrielle mais seulement une politique de mise en place des copains!

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