Angela Merkel réunit ce mercredi à Berlin les chefs des puissants Etats régionaux pour redonner des couleurs à la "Energiewende". Ce processus, amorcé en mars 2011 à la suite de l'accident de Fukushima, prévoit de faire sortir l'Allemagne du nucléaire d'ici à 2022. En congédiant à la hâte son ministre de l'Environnement Norbert Röttgen, jugé responsable d'une cuisante défaite du camp conservateur lors d'un scrutin régional majeur, et en nommant à sa place l'un de ses principaux bras droits, Peter Altmaier, la chancelière a bel et bien repris la main sur ce dossier brûlant. Selon la presse allemande, la transition énergétique, qui devait faire de l'Allemagne un modèle de sortie nucléaire mais patine pour le moment, devient ainsi "l'affaire de la patronne".
Imposer la réforme du marché photovoltaïque
Après avoir mis au pas le ministère de l'Environnement, Angela Merkel va en effet devoir aussi faire plier les Etats régionaux. Ceux-ci bloquent au Parlement une réforme censée rendre l'électricité photovoltaïque moins dépendante de l'Etat et moins coûteuse pour les ménages, en baissant le prix de vente garanti à ses producteurs. Les Länder craignent que cette réforme n'aggrave les difficultés de cette industrie, moribonde pour cause de féroce concurrence chinoise.
Rattraper le retard en matière d'éolien offshore
Mais le solaire n'est pas le seul secteur à problèmes dans les énergies renouvelables, censées peser d'ici huit ans 35% de la production électrique allemande, contre 20% aujourd'hui, et prendre le relais des neuf réacteurs nucléaires encore en activité. Berlin compte sur l'installation en masse de parcs éoliens en haute mer mais bute sur de gros retards. Le géant industriel allemand Siemens subit par exemple des pertes à répétition en raison de son incapacité à raccorder en temps et en heure ces éoliennes marines au réseau terrestre. Son patron Peter Löscher reconnaît avoir "complètement sous-estimé la complexité de ces projets".
Les centrales à gaz manquent à l'appel
Autre souci pour Angela Merkel: les centrales à gaz, censées se multiplier pour faire contre-poids aux renouvelables les jours de grisaille et d'absence de vent, manquent à l'appel. "Pour de nombreux opérateurs, il n'est pas rentable de construire de nouvelles centrales à gaz car elles risquent de ne pas fonctionner assez pour être rentabilisées", explique à l'AFP un porte-parole de l'Agence fédérale des réseaux allemands. Pour hâter la transition énergétique, l'Allemagne a décrété que l'électricité produite par des sources renouvelables était prioritaire sur le réseau, réduisant les centrales conventionnelles à gaz et à charbon au rôle de suppléantes.
Seulement 200 kilomètres de nouvelle lignes électriques sur les 1.800 de prévus
Un autre défi de la chancelière mercredi est de convaincre les Etats régionaux de doper la construction de nouvelles lignes électriques, très impopulaires auprès des populations locales. Selon le gouvernement, il faudrait 1.800 kilomètres de nouvelles lignes en particulier pour relier les industriels du sud du pays aux éoliennes du Nord. Jusqu'ici seulement 200 kilomètres ont été construits. L'état du réseau et les cafouillages de la transition valent à l'Allemagne de vivre avec la crainte diffuse d'un "black out", une coupure de courant généralisée. Elle y a échappé l'hiver dernier, mais l'Agence des réseaux a reconnu que pendant les quelques jours de grand froid en février la situation avait été "très tendue", rendant nécessaire le recours à des centrales de réserve en Autriche.
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