La France peut-elle se passer de gaz russe ? "A terme, oui" selon le patron d'Engie

Invité de France Inter ce 7 mai, le président de l'énergéticien, Jean-Pierre Clamadieu, a estimé que la France serait "probablement" capable de réduire sa dépendance au gaz russe d'ici à "trois ou quatre ans". Ce dernier représente toujours 20% des approvisionnements d'Engie, qui se tourne vers le gaz naturel liquéfié (GNL), qui s'avère pour le moins polluant. L'entreprise tricolore vient parallèlement de lancer un label « transition énergétique durable » avec Bureau Veritas.
(Crédits : PHILIPPE WOJAZER)

Court, moyen ou long ? Après avoir considéré fin mars que la France aurait besoin "à moyen terme ou à long terme" du gaz russe, le président d'Engie a estimé que notre pays serait "probablement capable de réduire de manière très importante" sa dépendance d'ici à "trois ou quatre ans".

"À terme, oui. La question, c'est à quel terme", a déclaré Jean-Pierre Clamadieu ce 7 mai au micro de France Inter. Son acheminement repose en effet sur tout un réseau d'infrastructures (gazoducs, installations de liquéfaction, etc.) complexe à mettre en place.

"Si nous devions faire face à une interruption brutale, c'est un scénario qui est beaucoup plus difficile, et nécessitera des ajustements qui seront probablement eux aussi brutaux", a ajouté le patron de l'énergéticien.

Le gaz russe représente 20% des approvisionnements d'Engie

D'autant que le gaz russe représente toujours 20% des approvisionnements d'Engie. Aussi a-t-il annoncé le 3 mai dernier l'achat de 1,75 million de tonnes par an de gaz naturel liquéfié (GNL), issu d'un procédé de fracturation hydraulique interdit en France, à l'américain NextDecade, en provenance du futur terminal texan Rio Grande à partir de 2026 et pour quinze ans.

"Les tensions actuelles sur les marchés de l'énergie ont renforcé la pertinence de notre stratégie de diversification des sources d'approvisionnement pour répondre à notre priorité : assurer la sécurité d'approvisionnement de nos clients", faisait ainsi valoir un porte-parole de l'énergéticien à La Tribune le 4 mai dernier.

Un revirement déjà entamé fin mars, puisqu'Engie avait alors étendu un contrat avec un autre groupe américain, Cheniere Energy, afin de lui acheter plus de GNL que prévu, et ce pour une vingtaine d'années. L'entreprise tricolore ne compte donc pas abandonner le précieux hydrocarbure de sitôt, avec ces nouveaux contrats courant jusqu'à 2040 et au-delà.

Le gaz naturel liquéfié s'avère pour le moins polluant

Et pourtant, le GNL, qui doit être liquéfié puis regazéifié, et qui transite par voie maritime, s'avère pour le moins polluant. Dans le détail, son empreinte est de 58 grammes de CO2 par kilowattheure (KWh) en moyenne, contre 23 gCO2/KWh pour le gaz « classique » acheminé via des pipelines. Sans compter que celui produit sur le sol américain passe par une « fracturation hydraulique », c'est-à-dire un forage en profondeur, mobilisant de grandes quantités d'eau et de produits chimiques pour briser les roches.

Un procédé interdit en France depuis 2011, du fait d'un risque de contamination des nappes phréatiques mais aussi de fuites de méthane, ce gaz à effet de serre au potentiel 80 fois plus réchauffant que le CO2 sur une échelle de vingt ans. C'était d'ailleurs ce point précis qui avait concentré les critiques en 2020, et abouti au renoncement du contrat avec NextDecade. Mais la donne a changé, se défend aujourd'hui Engie.

« NextDecade a fait des avancées significatives en s'engageant à réduire les émissions sur le terminal de Rio Grande à hauteur de 90%, notamment via un projet de captage et de stockage de CO2 », assure un porte-parole à La Tribune. Le gaz en question sera « d'origine responsable (RSG), provenant des principaux producteurs de gaz des bassins Permien [le plus grand champ pétrolier des Etats-Unis, ndlr] et Eagle Ford », avec un « contrôle par une tierce partie indépendante », poursuit le groupe.

Lire aussi 7 mnPour s'affranchir du gaz russe, Engie fait volte-face et se tourne vers le gaz de schiste américain, malgré l'urgence climatique

Un label « transition énergétique durable » avec Bureau Veritas

Parallèlement, l'énergéticien a lancé, le 5 mai, un label « TED » (pour « transition énergétique durable ») censé 'donner aux citoyens et aux territoires des gages de rigueur et de transparence'" sur le développement des parcs éoliens, afin qu'ils puissent se les "approprier".

Co-conçu avec le Bureau Veritas, leader mondial des services d'audit et de certification, il englobera, dès le mois de juin, les activités solaires et éoliennes d'Engie en France, avant d'être étendu à la méthanisation durant 2022, assure le groupe. Des audits de suivi par Bureau Veritas seront ensuite prévus en 2023 et 2024.

"Il s'agit de construire les projets avec les collectivités d'implantation, tout en apportant de la confiance et en systématisant nos engagements dans la durée. Sur ce socle, nous allons construire des projets sur-mesure. En ajustant l'emplacement et la hauteur exacte des éoliennes dans un territoire donné, par exemple", a précisé sa directrice générale, Catherine MacGregor.

Concrètement, ce label comporte neuf engagements "qui vont au-delà des exigences réglementaires et qu'Engie s'engage à déployer systématiquement", fait valoir l'entreprise. Afin de renforcer l'implication des parties prenantes, il s'agira par exemple de déployer, pour chaque projet, un "dispositif sur mesure et évolutif d'interactions", ou encore de "fournir à la commune d'implantation une évaluation des impacts positifs".

Lire aussi 4 mnTED : la solution miracle d'Engie pour vaincre les oppositions à l'éolien

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Commentaires 19
à écrit le 08/05/2022 à 17:24
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A terme oui ... et si d'ici ce terme Poutine décidait de couper les approvisionnements ?? Sait on jamais

à écrit le 08/05/2022 à 17:06
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La France ou Engie ? Ce n'est pas nécessairement les mêmes intérêts ...

à écrit le 08/05/2022 à 16:07
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Ce que l'on voudrait savoir avec des termes plus simples ! Allons-nous pouvoir nous chauffer correctement les hivers à venir ?

à écrit le 08/05/2022 à 16:01
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Ce que l'on voudrait savoir avec des termes plus simples ! Allons-nous pouvoir nous chauffer correctement les hivers à venir ?

à écrit le 08/05/2022 à 10:17
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A quel prix ? quand j'entends ce genre de discours je ne peux que l'associer à un blocage des prix car j'ai bien peur que ce soit à des prix délirant que la France paiera son gaz demain sans compter l'énormité d'aller acheter du gaz issu d'une techni...

le 09/05/2022 à 19:52
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Le gaz de schiste, en soi, si ça pollue les USA, c'est loin (comme titiller les russes depuis les USA, qui c'est qui est proche ? :-) Nous) mais l'ennui majeur est de devoir le liquéfier pour ensuite le transporter, et le vaporiser à l'arrivée, un pi...

à écrit le 08/05/2022 à 9:47
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Gouverner c'est prévoir en particulier une production d'électricité décarbonée et d'un cout acceptable, A force de tout démolir nous en payons le prix fort..

le 09/05/2022 à 19:55
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"une production d'électricité décarbonée et d'un coût acceptable" nombreux ne veulent ni de ventilateurs (moches) ni de panneaux photovoltaïques (moches), comment produire ? La meilleure énergie est celle non consommée donc non produite. Acceptable ...

à écrit le 08/05/2022 à 9:38
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Si on se limitie à votre titre ( et combien le font ) , beaucoup concluront que tout va bien dans le meilleur des monde et passeront aux prochaines articles.

à écrit le 08/05/2022 à 9:14
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"A terme" nous pourrions nous passer aussi de la classe dirigeante ce qui résoudrait totalement les conflits.

le 08/05/2022 à 14:17
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Oui, il suffit de voir de l'intérieur ce que deviennent systématiquement les expérimentations de sociétés 'sans classe dirigeante', avec 'démocratie participative directe des citoyens', par exemple dans les ZAD: un bazard sans nom où les 'citoyens' d...

à écrit le 08/05/2022 à 0:31
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La question n'est plus de savoir si on peut se passer du gaz Et du pétrole Russe, il FAUT s'en passer. De toutes façons c'est une énergie fossile qui est condamnée.

le 08/05/2022 à 8:28
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non mais m macron et ses amis ecolos vont acheter le gaz de schiste us bien plus cher et surtout bien polluant sans trouver a critique tout cela pour punir non pas la russie mais bien les francais qui ont refuse ces taxes du precedent mandat il v...

le 08/05/2022 à 8:48
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S'en passer ??? Rappel0ns que le "réchauff6ment climat1que" est une chance extra0rdinaire qui va nous permettre d'accéder aux s0us-sols des terres du pole n0rd jusqu'à lors inexploitable à cause du fr0id et de la neige. Un source d'én6rgie en pétr0l...

le 08/05/2022 à 14:25
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Certes. Maintenant, essayez de monter un projet d'ENR genre ferme solaire un peu importante pour alimenter une petite ville (au-delà d'une installation de quelques kWc en toiture qui sert surtout à faire joli et à capter de l'argent public), une ferm...

le 09/05/2022 à 20:00
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Condamnée mais encore indispensable (hélas, y a qu'à demander à l'industrie allemande, et autres aussi). Comme le pétrole. Si on dit : "début 2023, les pompes seront vides et les tuyaux de gaz à pression nulle, on vous prévient, organisez vous !" Ça ...

à écrit le 07/05/2022 à 20:01
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Discours prosélyte et biaisé, tout simplement parce que le gaz est un combustible fossile dont la combustion émet beaucoup de CO2. Point. L'arnaque vient du fait que l'Allemagne, plus gros pollueur d'Europe avec ses centrales à charbon, veut remplac...

le 07/05/2022 à 21:19
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Vous avez parfaitement raison,

le 09/05/2022 à 20:07
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La Chine prévoit de réduire son CO2 en passant du charbon au gaz, ça fera une bonne baisse de CO2 émis et donc un pays très bien, aimable, écolo, etc. :-) Un haut fourneau chauffé au gaz, vous le transformez comment en électrique rapidement ? Les fo...

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