L'Epag, cette école française de formation des pilotes menacée de mort dans l'indifférence

Le tribunal de grande instance de Dunkerque se prononcera vendredi sur le sort d'une petite école de pilotage, l'Epag, menacée de liquidation car deux conditions suspensives ne sont pas levées pour permettre au repreneur de déposer une offre ferme. Son plus gros contrat pourrait être transféré à une école de formation publique (ENAC) alors que celle-ci pourrait ne pas être en mesure de l'absorber en totalité et être obligée de délocaliser à Oman.
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Les 50 salariés de l'IAAG-Epag (Institut Amaury de Lagrange-Ecole de Pilotage Amaury de Lagrange), une école de formation de pilotes et de mécaniciens située sur l'aérodrome de Merville dans le Nord-Pas-de-Calais, craignent le pire. Vendredi 25 octobre, à 11 heures, le tribunal de grande instance de Dunkerque se prononcera sur l'avenir de cette ancienne filiale d'Air France, cédée en 1996 pour un franc symbolique à l'association « Institut Amaury de Lagrange » : liquidation ou reprise. Le tribunal a en effet fixé à ce vendredi la date limite pour déposer une offre de reprise ferme.

Un repreneur prêt à se lancer

Il y a effectivement un repreneur : le fonds d'investissements français FJ Investissements, dirigé par Vincent Markus et doté de 72 millions d'euros. Sauf que son intérêt s'accompagne de conditions suspensives nécessaires à la pérennité de l'école. Toutes ont été levées sauf deux, dont la plus importante, le maintien des contrats de formation des 60 « cadets » annuels de China Eastern au sein de l'Epag. Ce contrat  est menacé car il risque d'être confié à l'ENAC, une école publique.

Contrat de formation de 60 cadets chinois

Avec la crise en 2008, Air France a suspendu la formation de ses cadets mais l'Epag a initié un contrat de formation de cadets chinois pour le compte de China Eastern dans lequel elle assure un flux de « formation initiale » (il s'agit d'une formation théorique d'une quinzaine de mois), préalable à un stage au sein d'Air France qui prend en charge la qualification des élèves sur A320 et de leur adaptation en ligne (accompagnés d'instructeurs, les stagiaires prennent le manche d'un avion commercial accompagné). Une fois formés, ces pilotes rejoignent China Eastern.

L'ancien ministre Michel Delebarre écrit à son ancien dir cab, Jean-Cyril Spinetta

Jusqu'ici les deux contrats (formation initiale à l'Epag d'une part, et l'adaptation en ligne à Air France qui validait la formation) étaient séparés. Mais « la collaboration actuelle et future d'Air France semble s'orienter exclusivement vers l'ENAC pour la formation des futurs cadets chinois, alors même que l'ENAC envisage parallèlement d'en sous-traiter une partie à l'étranger », explique l'ancien ministre Michel Delebarre sous François Mitterrand, aujourd'hui maire de Dunkerque, dans un courrier adressé le 22 octobre au PDG d'Air France-KLM Jean-Cyril Spinetta qui a été son directeur de cabinet du temps où il était ministre de 1984 à 1986 puis de 1988 à 1990.

Délocalisation à Oman?

L'ENAC assure déjà une partie de la formation initiale de 45 cadets chinois. Une sorte d'échange dans la mesure où l'ENAC assure les 20 heures de formation sur les avions Beech imposées par China Eastern pour le compte de l'Epag qui ne dispose pas de ces avions très coûteux. Selon certaines sources confirmant les propos de Michel Delebarre, l'ENAC n'aurait pas les moyens d'absorber l'ensemble des cadets chinois et devrait transférer son surplus de formation dans le sultanat d'Oman. « On tue une entreprise privée française pour transférer de l'activité à une entreprise publique qui va délocaliser. C'est l'inverse de l'idée du redressement productif », pestent des proches de l'Epag. L'ENAC aurait proposé à Air France des prix très intéressants.

Contrat pour au moins deux ans

« Cette situation dessert l'Epag injustement alors que ses coûts de formation dispensés sont moindres. Or le succès de sa reprise repose sur cette activité de formation d'une soixantaine de pilotes au moins pour les deux exercices à venir et le versement de la taxe d'apprentissage en provenance d'Air France à hauteur en 2013 d'1 million d'euros et de la moitié de cette enveloppe pour 2014 (c'est la deuxième condition suspensive du repreneur, ndlr) explique Michel Delebarre à Jean-Cyril Spinetta.

L'Epag, un projet pour des pilotes français

Ce contrat permettrait d'accompagner un nouveau projet pour l'Epag. Celui d'étendre ce qui a été fait avec China Eastern aux pilotes français pour les aider à trouver un emploi dans une compagnie.

Interrogé ce jeudi matin, Jacques parent, le maire de Merville espère, si le dossier ne se décantait pas d'ici à vendredi 11 heures, que le tribunal accepte d'accorder un sursis supplémentaire d'un mois. « La trésorerie le permet » indique Jacques Parent.
 

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Commentaires 11
à écrit le 05/11/2012 à 11:47
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Espérons que d'ici Vendredi une solution de reprise soit trouvée, ayant fait une partie de mes études à l'Institut Amaury de la Grange et ayant apprécier la qualité de la formation qui m'y a été donnée, je trouve malheureux que cette petite structure...

à écrit le 05/11/2012 à 7:07
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Vous devriez vérifier vos sources : aucun lien entre China Eastern et le Sultanat d'OMAN. L'ENAC fait son travail d'école de formation. Le fait qu'elle soit publique ne l'interdit en rien de faire son boulot (sinon vous en critiqueriez ses fonctionna...

à écrit le 27/10/2012 à 10:09
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Encore un superbe exemple de nivellement par le bas. Comme disait Michel Houellebecq, prix Goncourt 2010, "La France restera toujours un pays touristique".

à écrit le 26/10/2012 à 19:47
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Tuons le peu d'entreprises françaises désireuses de continuer à faire perdurer leur savoir en France! Et pourquoi pas y contribuer nous-même, en utilisant l'argent de nos impôts pour tuer nos propres entreprises privées? Vous en avez rêvés, c'est en ...

à écrit le 26/10/2012 à 8:56
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Bonjour et merci pour cet espace démocratique. Je tiens cependant à rectifier les propos de Mr Delabard. Non l'ENAC n'est pas concourante de l'EPAG en effet les contrats de formation avec les compagnies chinoises étaient conditionnés par la réalisati...

le 26/10/2012 à 16:02
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L'ENAC, l'EPAG et Air France avaient jusqu'ici un partenariat profitable aux trois. Pourquoi donc Air France semble aujourd'hui vouloir exclure son ancienne filiale et la mettre en péril?

à écrit le 25/10/2012 à 22:10
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Malheureusement les écoles de pilotage sont victimes du marché chinois. L'EPAG tout comme l'ESMA se retrouvent en redressement judiciaire ayant vendu des formations à perte. L'argent du contribuable aurat une fois de plus était gaspillée rappelons qu...

à écrit le 25/10/2012 à 21:08
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C'est un scandale politique que cette mise à mort d'une école aéronautique historique par le truchement des fonds publics. "L'ENAC (la DGAC) aurait proposé à Air France des prix très intéressants..." A quand le ministère du développement corruptif?

à écrit le 25/10/2012 à 19:39
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il faut delocaliser la formation des pilotes (et mecanos) ils seront plus en harmonie avec l'entretien des A320 a Casa et des 747 en chine le transport aerien suit le meme chemin que la marine marchande

à écrit le 25/10/2012 à 14:42
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ou est notre pilote confirmé "Capitaine MONTBOURG?.........

à écrit le 25/10/2012 à 13:30
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Et oui encore une fois on fait l'inverse du bon sens ....... attention l'addition arrive à grande vitesse.

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