Airbus A380 : Air France brave les soi-disants interdits du financement d'avions

Après avoir obtenu une dérogation pour financer deux A380 en crédit-export (Lufthansa et British Airways aussi), la compagnie française cherche à financer un autre A380 en 2013 en crédit-export. Selon une règle des années 80, les compagnies originaires des pays Airbus n'ont pas le droit d'en bénéficier. Les compagnies américaines non plus. Ce qui crée des distorsions de concurrence.
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Air France est passée en force. Lufthansa aussi et British Airways devrait suivre. Privées des avantages du crédit export pour financer ses avions, les compagnies française et allemande ont, selon des sources bancaires et internes à Air France, passé outre en demandant et en obtenant des gouvernements français, allemand et britannique de pouvoir financer deux A380 chacun avec des crédits-exports, auxquels ils n'ont théoriquement pas droit comme toutes les compagnies originaires des pays « dits Airbus », la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni et l'Espagne. En effet, en vertu d'une vieille règle mise en place dans les années 80 sous l'égide de l'OCDE par les Etats-Unis et les quatre pays européens, les compagnies de la même nationalité que les constructeurs d'avions ne peuvent bénéficier de ces crédits, plus avantageux. Une règle qui a conduit à une sorte de « Yalta » entre Airbus et Boeing : en clair, les compagnies aériennes américaines et européennes n'y ont pas accès pour leurs achats d'Airbus et de Boeing (afin d'éviter que les européennes n'achètent que des Boeing et les américaines que des Airbus).

Distorsion de concurrence

En revanche, leurs grandes rivales, l'irlandaise Ryanair ou les compagnies du Golfe, comme Emirates ou Etihad, peuvent en profiter. Un système dénoncé il y a trois ans par neuf compagnies européennes (Air France, Lufthansa, British Airways, Easyjet, Air Berlin, Iberia, Virgin Atlantic, Air Europa et Monarch) et l'association des compagnies américaines (ATA), qui ont crié à la distorsion de concurrence. Les taux sont en en effet plus avantageux. C'est d'ailleurs après cette grogne et des discussions qui ont suivi en 2010, que les trois compagnies européennes ont obtenu le feu vert pour 2 A380 seulement chacune. Une faveur "pour les calmer", explique un banquier.

Pas de règles écrites

«Il n'y a pas de règle écrite, Air France a demandé aux gouvernements français, britannique et allemand et obtenu une dérogation. Ils ne pouvaient pas refuser. Sinon ils reconnaissaient une distorsion de concurrence », explique une source proche du dossier. Les deux A380 financés par les crédits-exports par Air France ont été livrés fin 2011 et en mai 2012. British Airways a aussi obtenu une dérogation pour deux A380 à venir. Interrogée, Air France n'a pas fait de commentaires. Lufthansa n'a pas retourné nos appels. A Bercy, on explique "que ce dossier a fait l'objet de discussions entre les partenaires internationaux en 2010 et a été pris en garantie sur la base d'un accord entre tous les acteurs, américains et européens notamment". Ce qui est vrai.

Grogne

Si le financement de quelques avions n'a rien de révolutionnaire en soi, il risque néanmoins de faire grincer les dents les autres compagnies des pays Airbus, comme Easyjet, clairement défavorisée par rapport à Ryanair. Ou du groupe TUI qui, selon nos sources, est sérieusement agacé de ne pas pouvoir en profiter. L'agacement risque de monter d'un cran. Car Air France n'exclut pas de financer ses les deux derniers A380 de sa commande de 12 appareils en crédit exports. Au moins un en tout cas. «Nous allons essayer de financer en crédit-export l'A380 que nous devons recevoir cette année», explique à La Tribune une source interne. Une brèche dans un système qui crée des distorsions de concurrence. Car loin de sa vocation d'origine, le risque pays, le crédit-export est en partie à l'origine de l'envolée des commandes d'avions depuis 2005. "Ce système doit s'arrêter. Il faut que tout le monde en profite", dit-on au sein de la compagnie tricolore.

 

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Commentaires 11
à écrit le 08/03/2013 à 9:21
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Le contribuable ne finance pas. Il accorde sa garantie. Et cette garantie est payante. Tant que les primes recues excedent les sinistres, il est gagnant. Il y a eu tres peu d'impayes depuis 2003.

à écrit le 28/02/2013 à 16:03
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Si je comprend bien ces crédits-export sont garantis par les gouvernements et donc c'est aux contribuables français (voire, allemands, britanniques, espagnols ou américains) de financer, pour partie ces avions!

le 28/02/2013 à 22:48
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absolutly

à écrit le 28/02/2013 à 12:41
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Non c'est bien ça, il y a une bonne définition sur http://www.vernimmen.net/html/glossaire/definition_credit_export.html

à écrit le 28/02/2013 à 11:49
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les soi-disant

le 28/02/2013 à 13:44
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Je fais la faute depuis longtemps.

à écrit le 28/02/2013 à 11:40
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afin d'éviter que les européennes n'achètent que des Boeing et les américaines que des Airbus. Ce ne serait pas le contraire ? Ou j'ai mal compris ?

le 28/02/2013 à 12:18
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vous avez bien compris! l est temps que l'ocde soit confiée à des vrais "spécialistes" et non pas à des blaireaux soumis aux lobbies de toutes parts.

le 28/02/2013 à 12:37
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Bonjour linspecteur. Non c'est bien cela. Air France par exemple ne peut bénéficier (en théorie) ni des crédits-exports en France pour acheter des Airbus, ni des aides du même genre aux USA pour acheter des Boeing. Idem pour les compagnies américaine...

le 28/02/2013 à 19:05
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C'est très technique, mais si les américains accordent aux compagnies américaines ces crédits exports et que l'Europe en fasse de même avec les compagnes européennes, il y a égalité...et balle au centre! Bref tout le monde sera content, sauf peut-êtr...

le 01/03/2013 à 13:41
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Oui. Cette règle est de toute façon idiote et dangereuse. Le jour où les Chinois fabriqueront des avions pouvant rivaliser avec Airbus et Boeing, nos compagnies européennes et américaines achèteront chinois pour avoir des conditions plus avantageuses...

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