Didi : même en Chine, le marché des VTC n'est pas rentable

VU DE CHINE. Est-il inévitable de perdre de l'argent dans l'industrie des VTC ? Au moment où Uber annonçait la perte d'1,8 milliard de dollars en 2018, Didi, qui domine ce secteur dans l'empire du Milieu et qui a racheté Uber Chine en 2016, faisait part du licenciement de 2000 salariés, soit 15% de son effectif.
Une enseigne du groupe Didi.
Une enseigne du groupe Didi. (Crédits : Carlos Jasso)

D'après une source financière interne du groupe, sa perte atteindrait 1,6 milliard de dollars sur l'année passée. Comment expliquer cette contre-performance financière de Didi, qui a d'ailleurs subi des pertes successives depuis sa création en 2012, sur un marché chinois immense et à fort potentiel ?

Tout d'abord, comme Uber l'a fait en arrivant dans chaque nouveau pays, Didi a distribué des subventions colossales aux chauffeurs et des coupons de promotion aux utilisateurs, afin d'occuper le terrain. Ensuite, il a englouti d'énormes capitaux dans sa concurrence féroce avec le chinois Meituan, sur les services de VTC et de livraison de repas à domicile. Il a également beaucoup investi pour s'étendre à l'international et dans d'autres secteurs : vélos partagés, véhicules à énergie renouvelable, services financiers...

Le défi de l'insécurité

En particulier, Didi a connu une grave crise de crédibilité : en août dernier, le viol et le meurtre, par l'un de ses chauffeurs, d'une passagère utilisant le service de covoiturage Didi Shun Feng Che a suscité de nombreuses critiques dans le pays. Une affaire similaire avait eu lieu trois mois auparavant. Didi avait pourtant promis des améliorations. Le public a découvert avec indignation son manque de réactivité face à ce genre d'incident et aux plaintes déposées par les passagers, et son laxisme dans le contrôle de la qualification de ses chauffeurs. Ce qui a déclenché des visites de contrôle par des équipes d'inspection gouvernementales des principales sociétés de VTC.

Afin de mieux régulariser ses activités, Didi a alors annoncé l'arrêt de son service. Deux dirigeants ont été congédiés, y compris une directrice des affaires qui avait positionné Didi Shun Feng Che comme outil de « réseautage social », « très futuriste, très sexy ». Cheng Wei, le fondateur de Didi, a promis d'investir plus de 20 millions de dollars pour restructurer le service clientèle, en vue d'améliorer la sécurité. Un poste de Chief Safety Officer a également été créé. Même s'il maintient son plan de licenciements, le groupe envisage de recruter 2500 personnes, surtout pour renforcer la sûreté et la conformité de ses services ainsi que son implantation internationale.

Selon une enquête du site Big Data Research, plus de 90 % des utilisateurs chinois de taxis et de VTC pensent que cette activité fait face au défi de l'insécurité. Les incidents de Didi ont changé la donne : désormais, il ne suffit plus de se focaliser sur le tarif ou l'acquisition de parts de marché. La qualité des services, et notamment la sécurité, est devenue un véritable enjeu, pour parvenir à une croissance durable en Chine, voire à l'étranger.

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Chunyan Li est auteure du livre « Réussir sur le marché chinois » - Ed Eyrolles.

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