Le transport et la distribution d'électricité, le nouveau terrain de jeu du BTP

Du fait du développement des renouvelables, de la décarbonation de l'énergie et des déséquilibres entre production et consommation, cela va entraîner mécaniquement la création de nouveaux réseaux de transport et de distribution d'électricité en France, en Europe et dans le monde. Vinci vient ainsi de remporter deux contrats de 1 milliard d'euros au Brésil, quand Spie profite des investissements massifs de l'Allemagne dans l'équilibre de son réseau. Leurs concurrentes Bouygues et Eiffage se positionnent également sur ce créneau mais ne sont pas très bavardes... Explications.
César Armand
(Crédits : Reuters)

La question du transport et de la distribution d'électricité n'a jamais électrisé les foules. L'objectif de réduire de 10% la consommation d'énergie du pays d'ici à 2024 et la menace d'un black-out cet hiver a, en revanche, fait prendre conscience de cet enjeu stratégique. En France comme ailleurs, l'électricité circule depuis l'endroit où elle est produite jusqu'à son consommateur final.

Dans notre pays, RTE se charge de son transport depuis les centrales et/ou les installations d'énergies renouvelables, notamment via les lignes à haute voire très haute tension (THT). Puis passé le poste de transformation, Enedis la distribue en basse tension jusqu'aux logements des particuliers, ainsi qu'aux autres sites privés et publics (bureaux, commerces, industries...). Autrement dit, deux filiales d'EDF, en passe d'être renationalisées, acheminent, entretiennent, exploitent et gèrent l'ensemble du réseau.

Deux contrats à 1 milliard d'euros au Brésil pour Vinci

Cette situation de quasi-monopole public reste un cas à part en Europe et dans le monde. Pas plus tard que le 3 octobre, Vinci a signé deux partenariats publics-privés avec l'Agence nationale de l'énergie électrique brésilienne portant sur le financement, la conception, la construction et l'exploitation de lignes à THT pour près de 1 milliard d'euros.

« A la remise de l'offre, notre équipe brésilienne calcule une redevance annuelle, exprimée elle-même comme une remise par rapport à la redevance annuelle maximale indiquée par le client. Cet engagement sur la valeur en termes réels comprend la rémunération d'investisseur et d'opérateur », explique Christophe Pélissié du Raulas, directeur du développement de Vinci.

«  Cette redevance annuelle est inflatée [indexée sur l'inflation] chaque année », précise-t-il aussitôt.

En vingt ans, sa filiale Cobra IS a déjà réalisé 32.000 kilomètres de lignes à très haute tension. Si elle les avait conservées, elle détiendrait, à date, 25% du parc, mais elle a tout revendu à des investisseurs. Pour ces nouvelles lignes, « nous n'écartons pas l'idée d'ouvrir le capital, mais la décision n'a pas encore été prise », dit encore le cadre dirigeant du groupe coté. Et ce, dans un contexte où la profondeur de marché reste énorme : 30.000 kilomètres de lignes à THT sont prévues dans les dix ans à venir.

« Il existe un déséquilibre sur le marché de l'électricité brésilien entre des centrales photovoltaïques au Nord et des grands lieux de consommation au Sud, tant et si bien que le réseau de transmission doit être renforcé », décrypte le directeur du développement de Vinci, Christophe Pélissié du Raulas.

L'Allemagne investit massivement dans l'équilibre de son réseau

Du fait du développement des renouvelables, de la décarbonation de l'énergie et des déséquilibres entre production et consommation, cela va en effet entraîner mécaniquement la création de nouveaux réseaux de transport et de distribution d'électricité. Par exemple, l'Allemagne, prise en tenaille entre la sortie du nucléaire et la dépendance au gaz russe, a décidé d'investir massivement dans l'éolien offshore en Mer du Nord, mais cela lui demande aussi de revoir la gestion et l'équilibre de son réseau électrique.

A cet égard, le groupe Spie, a, lui, annoncé, le 6 octobre, la mise en place de 15 kilomètres de lignes à très haute tension entre deux communes allemandes « afin de transporter de l'énergie éolienne du nord au sud ». Dans cette entreprise française cotée au SBF 120 qui se définit comme le « leader européen indépendant des services multi-techniques dans les domaines de l'énergie et des télécommunications », le transport et la distribution d'électricité représente déjà 17% de son chiffre d'affaires (46% en Allemagne !) avec une croissance annuelle moyenne du marché, estimée à 5% d'ici à 2025.

« A la différence des marchés allemand et néerlandais, déjà privatisés, le marché français est davantage contrôlé par des entreprises publiques », relève Lieve Declercq, directrice générale de Spie Nederland et membre du comité exécutif du groupe Spie.

« L'Allemagne et les Pays-Bas ont beaucoup mieux compris que la France qu'il valait mieux collaborer et travailler ensemble pour relever le défi de la transition énergétique, plutôt que dans une relation de sous-traitant. C'est la clé pour avoir assez de ressources et relever avec succès ce défi, qui nécessite des investissements considérables », poursuit-elle.

Bouygues et Eiffage se positionnent également sur ce marché

Bouygues se positionne également sur ce marché mais, à la différence de ses concurrents, la major refuse de s'exprimer publiquement. Au sein de son pôle Energies & Services, qui vient d'absorber Equans, l'entité EnerTrans conçoit et construit des installations à haute et moyenne tension pour les gestionnaires de réseaux, les services industriels municipaux, les centrales électriques et l'industrie.

Sa rivale Eiffage n'est guère plus bavarde et renvoie à l'installation des pylônes créés spécialement pour une ligne à très haute tension dans les Hauts-de-France. Elle vient pourtant d'accélérer sur les énergies renouvelables en faisant l'achat, début septembre, de Sun'r, spécialisée dans les champs photovoltaïques et l'agrivoltaïsme.

Lire aussiAprès Vinci, Eiffage accélère sur les énergies renouvelables

César Armand

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