Pays de la Loire : la rénovation énergétique des logements change de dimension

L’Union Sociale de l’Habitat des Pays de la Loire investit 150 millions d'euros dans la rénovation énergétique des logements. L’acteur du logement social a conclu un partenariat avec la Banque des Territoires pour déployer le concept hollandais de rénovation énergétique, EnergieSprong. Objectif : accélérer la réhabilitation thermique de plus de 2.000 logements dans la Région en industrialisant les process auprès de groupements d’entreprises.
C'est le premier exemple de rénovation énergétique de masse. Le marché de réhabilitation lancé par l'Union Sociale de l'Habitat des Pays de la Loire, soutenu par la Banque des Territoires porte sur 2250 logements. Principalement des pavillons, de petits collectifs (T2 au T5) et un immeuble de onze étages.
C'est le premier exemple de rénovation énergétique de masse. Le marché de réhabilitation lancé par l'Union Sociale de l'Habitat des Pays de la Loire, soutenu par la Banque des Territoires porte sur 2250 logements. Principalement des pavillons, de petits collectifs (T2 au T5) et un immeuble de onze étages. (Crédits : USH PDL)

La rénovation énergétique de masse est en route dans les Pays de la Loire. « A cette échelle, c'est une première sur le territoire ligérien et français », reconnait Axel David, directeur général de l'Union Sociale de l'Habitat des Pays de la Loire (45 organismes HLM, 230.000 logements sociaux, 1 milliard d'euros de commandes) qui vient de signer une convention de partenariat avec la Banque des Territoires pour investir 150 millions d'euros dans le financement de la rénovation énergétique de plus de 2.000 logements sociaux des Pays de la Loire. « Nous avions un problème sur un parc de pavillons « électriques », construits dans les années 1970-80 dont les consommations énergétiques étaient trop importantes », rappelle-t-il. « Alors, nous avons regardé les démarches de réhabilitation qui se faisaient ailleurs...», avance-t-il.

La méthode hollandaise

Le « ailleurs » se situait aux Pays-Bas où 5.684 logements ont été rénovés selon les critères d'EnergieSprong (« saut énergétique » en hollandais). Ce programme soutenu par l'Union européenne, déployé en Allemagne, en Italie, en Grande-Bretagne, sur le continent américain et, depuis 2016, en France par la société GreenFlex, bénéficie de financements nationaux et européens, et est supervisée depuis 2019 par les pouvoirs publics, à travers la DGEC (Direction générale de l'Energie et du Climat) et l'agence de la transition écologique Ademe. Le principe ? Des rénovations réalisées sur sites occupés, en un temps court, et garantissant une consommation « zéro énergie » sur le long terme (30 ans), grâce à sa propre production d'énergie dont les excédents pourront être revendue sur le réseau. « C'est l'un des principes de ce modèle économique, qui nous permet d'investir lourdement et sur lequel nous avons beaucoup travaillé avec la Banque des Territoires pour permettre un équilibre sur le long terme. D'un autre côté, ce modèle repose sur des garanties de performances énergétiques grâce au suivi de groupements d'entreprises qui assurent l'entretien et la maintenance pour ne pas avoir à réinvestir dans le logement au cours des années suivantes », explique Axel David.

Une première vague de 500 logements

Si le concept est initialement conçu pour fonctionner sans subvention publique, la première vague (500 logements) du projet ligérien va néanmoins bénéficier du concours de l'Etat, de la région des Pays de la Loire, des départements de Loire-Atlantique, Maine-et-Loire et Sarthe, Nantes Métropole, des intercommunalités et les aides du plan national France Relance (en cours) qui interviennent à hauteur de « 15% à 25% ».

Un coup de pouce, en somme, pour que la filière parvienne à maturité. « Et que l'on assiste à une baisse des prix des logements grâce à l'industrialisation des procédés. L'idée est quand même qu'à terme nous n'ayons plus besoin d'aides publics», affirme le directeur de l'USH Pays de la Loire, qui finance le dispositif en fonds propres et par un prêt de 90 millions d'euros accordé par la Banque des Territoires. Un méticuleux travail d'ingénierie financière aurait été mené pour que chacun des quatorze bailleurs sociaux bénéficie de ce cadre et que le modèle se tienne. « Une approche intéressante », reconnait un acteur de la French Proptech, lui aussi attentif aux concepts de construction « Hors Site » et de l'industrialisation de la filière du BTP.

Moins de 8% du BTP dans la rénovation énergétique

Plus qu'une simple opération de réhabilitation, EnergieSprong se veut aussi un outil de développement économique du territoire. Sur un marché du bâtiment estimé en 2019 à plus de 8 milliards d'euros en Pays de la Loire, l'activité d'entretien et de rénovation de logements et de locaux pèse pour 48% (4 milliards d'euros) de l'activité contre 52% pour la construction neuve. « A noter, précise Jean-Yves Le Foll, directeur de la Cellule Economique Régionale de la Construction (CERC), que la rénovation des logements compte pour 2,3 milliards, dont seulement 560 à 640 millions d'euros en 2018 pour la seule rénovation énergétique soutenue par les aides publiques (Cite, Anah...). Ce qui représente 7% à 8% de l'activité globale du bâtiment.» Sans afficher de retard par rapport aux autres régions françaises, les Pays de la Loire dispose donc de «fortes marges de progrès ».

Une massification jamais vue

«Pour la première fois, on entre dans une opération de massification. On ne va plus faire cinq logements par-ci dix logements par-là, mais cinq cent d'un coup. On entre véritablement dans la stratégie bas carbone de la France », s'enthousiasme Pierre-Yves Legrand , directeur du cluster Novabuild, spécialisé dans l'écoconstruction, associé à cette opération inédite. « Pour atteindre les niveaux de performance souhaitée avec des délais d'intervention extrêmement courts dans des lieux habités, il faut industrialiser la réhabilitation, les process et faire fabriquer des modules qui seront positionnés sur les bâtiments», détaille Axel David. Une révolution pour le secteur où seuls 5.000 des 70.000 salariés œuvrent dans la rénovation énergétique.

Innovant, le process de réhabilitation repose sur trois modules, préfabriqués en usine, qui viendront se « plugger » sur l'habitation. Le premier concerne la façade avec changement des huisseries (portes, fenêtres, etc.), le deuxième, la toiture avec la pose de panneaux photovoltaïques permettant de compenser ce qui n'aura pu être éliminer par les efforts thermiques, le troisième, la production d'eau, le chauffage et la ventilation. Un modèle éprouvé aux Pays-Bas où l'on projette de rénover 14.000 logements au cours des prochaines années.

ush pdl

Redonner une pérennité de 30 ans aux logements

Ici, dans les départements de Loire-Atlantique, Maine-et-Loire et de la Sarthe, douze bailleurs sociaux de l'USH Pays de la Loire, et deux bretons (Neotoa, en Ille et Vilaine et Bretagne Sud Habitat dans le Morbihan) ont fait remonter leurs besoins. Au total, ce marché de réhabilitation porte sur 2.250 logements. Principalement des pavillons, de petits collectifs (T2 au T5) et un immeuble de onze étages. Un programme divisé en quatre lots que vont se disputer les acteurs du BTP réunis en groupements d'entreprises de manière à pouvoir prendre en charge la totalité des modules d'un bâtiment et son suivi. « Car, pour garantir la performance énergétique sur le long terme, les entreprises qui feront les travaux seront celles qui assureront la surveillance et la maintenance pendant 30 ans. Investir 65.000 à 75.000 euros dans une rénovation n'a de sens que si l'on redonne une attractivité et une pérennité d'au moins trente ans au logement », précise Axel David. En novembre dernier, l'Ush et ses adhérents ont d'ailleurs créé la centrale d'achat MASH (Mutualisation d'Achat au Service de l'Habitat) pour permettre aux bailleurs sociaux d'effectuer des achats groupés, notamment dans le cadre de la rénovation énergétique et de l'industrialisation.

Une nécessaire montée en compétences

Depuis deux ans, les clusters régionaux Novabuild (écoconstruction), Atlanbois (construction bois) et Atlansun (solaire), associés à la démarche EnergieSprong, se sont mobilisés pour informer, former et favoriser le regroupement de leurs adhérents pour les aider à décrocher ces marchés. En mai 2019, le trio a créé le Club Réhabilitation EnergieSprong ouvert au millier d'entreprises adhérentes. Objectif : accompagner ce changement d'échelle, démystifier l'industrialisation et favoriser les regroupements d'entreprises pour être apte à répondre aux appels d'offres de l'USH et aux exigences d'EnergieSprong. « Personne jusqu'ici ne rénovait dans un volume comme celui-là. Il fallait que les gens se connaissent et que l'on engage une véritable montée en compétences », reconnait Pierre-Yves Legrand, face à une profession ligérienne jusque-là surtout concentrée sur l'isolation (60%) et dont seuls 18% des entreprises bénéficient du label RGE (Reconnu Garant de l'Environnement). « L'USH a fait un énorme pas de côté avec cette opération, à nous, maintenant, de permettre aux entreprises d'en faire autant », dit-il.

Durant un an, une fois par mois, experts et consultants se sont relayées pour des brainstormings, détailler les techniques d'industrialisation, appréhender les ficelles du Lean management, découvrir les réseaux, les bonnes pratiques... « Plus ça allait , plus on avait de monde », observe Pierre-Yves Legrand, où chaque mois se sont pressées 100 à 150 entreprises. « Et ils ont évolué, remarque le directeur de Novabuild. Certains allant jusqu'à faire venir des consultants, des facilitateurs... dans leur entreprise. Ils savent que ceux qui pourront répondre aux attentes de l'USH pourront aussi avoir la capacité de capter d'autres marchés. Un énorme travail de rénovation est à faire dans le tertiaire, les écoles, les universités, les commerces... Dans le cadre de la stratégie bas carbone poussée par le gouvernement, par la porte ou par la fenêtre, vingt millions de logements devront être rénovés en France au cours des dix prochaines années.»

D'ores et déjà, l'USH a reçu dix candidatures de groupements d'entreprise. Huit ont été retenues. Après études des dossiers, la désignation finale aura lieu en novembre prochain afin que la première opération démarre fin 2021- début 2022.

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