Idée reçue #7 : "La nature n'a pas de prix, et de toute façon, on ne sait pas le calculer"

Les services rendus par la nature sont irremplaçables et les tentatives pour les chiffrer se multiplient.
Construction du barrage de Belo Monte, en Amazonie / Reuters

1 hectare de forêt française, 950 euros par an. Les services rendus par les abeilles dans le monde, 2 milliards de dollars par an. Ce sont les résultats de quelques calculs récents qui tentent de chiffrer la valeur des services rendus par la nature. Les hommes ont toujours eu recours à ces services pour se nourrir, se chauffer, fabriquer des matériaux, s'abriter, etc. L'avènement de la révolution industrielle n'y a rien changé. Les énergies fossiles elles-mêmes, pétrole en tête, sont l'œuvre de la nature.

Avec l'ère des loisirs est apparue une nouvelle façon de la « consommer » : randonnée, ski, montagne, rafting, etc. Certaines utilisations, notamment industrielles, ont conduit à la dégradation ou à la destruction d'une partie du capital naturel. Avec la « loi de responsabilité environnementale » de 2008, l'obligation de réparer ces dommages a été inscrite dans le droit français. Le procès Erika, en condamnant Total à payer pour chaque oiseau mazouté et kilomètre de littoral souillé, constitue une première dans la reconnaissance juridique du préjudice écologique. Sujet de recherche depuis de nombreuses années, la valorisation des services naturels est actuellement en pleine effervescence. En France, dans la foulée du Grenelle Environnement, un rapport sur la question a été commandé à l'inspecteur général de l'agriculture Bernard Chevassus-au-Louis. Objectif : intégrer le coût de la biodiversité aux décisions publiques. Ses conclusions distinguent les services d'auto-entretien qui contribuent au fonctionnement des écosystèmes, ceux d'approvisionnement (en bois, eau, aliments), ceux de régulation (du climat, du cycle de l'eau, etc.) et enfin les services culturels. Certains pays ont réalisé l'exercice à leur échelle. En juin 2011, le Royaume-Uni a ainsi évalué à 680 millions de livres sterling par an la capacité de ses forêts à absorber du CO2. En amont du sommet international sur la biodiversité de Nagoya en octobre 2010, sous l'égide de l'économiste indien Pavan Sukhdev, le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) a publié des rapports ciblant différents publics, des politiques aux entreprises en passant par les citoyens. Il s'agissait, là aussi, de mettre en évidence la valeur de la nature et la nécessité de la préserver, notamment en lui attribuant une valeur monétaire. L'occasion de chiffrer à 40 % la part de l'économie mondiale qui dépend directement de services rendus par la nature et à 23 500 milliards de dollars par an la perte liée à la dégradation de la biodiversité. Même des entreprises se sont risquées à établir un embryon de comptabilité environnementale. Le fabricant d'articles de sport Puma a annoncé au printemps 2011 la publication de son premier « compte d'exploitation environnemental ».

Mais cette méthode consistant à attribuer à la nature une valeur monétaire a ses détracteurs, car elle repose sur le principe de la compensation, qui permet de reconstituer ailleurs la nature détruite ici. Voire de « compenser » certains types de dégâts par d'autres actions positives qui n'ont rien à voir. Planter des arbres pour créer des puits de carbone au Brésil ne répare pas la perte de biodiversité causée par la construction d'une autoroute en France. En matière de comptabilité « verte », certains prônent donc plutôt l'évaluation des coûts générés par la reconstitution à l'identique des services naturels qui ont été dégradés, une méthode qui permet une forme d'amortissement du capital naturel, nettement plus orthodoxe en comptabilité classique.

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