L'informatique redéfinit le concept de pellicule

Que vont devenir les métiers traditionnels de l'argentique ? Les petits labos de proximité ne risquent-ils pas de disparaître au regard des nouvelles technologies numériques qui associent appareil photo et micro-informatique ? Autant de questions que se posent les fabricants et distributeurs de consommables. Au moment où, malgré une légère progression en volume, les ventes de films ont été l'an dernier pour la première fois négatives en valeur. Saisie par l'objectif et scannée, c'est-à-dire analysée par une trame d'éléments appelés « pixels », et définis non plus par l'empreinte du réel mais par un système binaire, la photo numérique élimine de fait l'utilisation de la pellicule argentique. Les professionnels s'accordent sur un point : la qualité du numérique mettra du temps à égaler celle de l'argentique - une photo numérique contient vingt fois moins d'informations au centimètre carré qu'une photo argentique, souligne Marc Héraud, directeur marketing chez Fuji -, ils croient en revanche beaucoup plus aux multiples avantages qu'offrent les technologies numériques pour le traitement photo. « Stockée, améliorée, modifiée, on pourra jouer avec l'image, faire de la photo-composition, personnaliser ses cartes d'invitation », explique le président de Konica France, Michel Paillot, qui entend bien équiper ses deux cent soixante magasins photo express de dispositifs pour fournir ces nouveaux services. Le groupe Fuji, qui dispose d'un réseau de quatorze grands laboratoires industriels en France, préfère pour sa part amener directement le multimédia chez le particulier en lui proposant un lecteur pour visualiser les photos sur son téléviseur et, à l'automne, un scanner associé à un logiciel de traitement numérique d'image et à un ordinateur multimédia. « Le développement de l'image numérique pourrait entraîner la disparition de toute une profession », remarque un spécialiste. Dans ce contexte, les petits labos de proximité sont condamnés à s'adap- ter. D'autant plus que les laboratoires industriels offrent déjà aux consommateurs, en plus de la pochette standard, une version numérique de leurs clichés sur disquette. L'enjeu est d'importance : les travaux photos représentent 73 % du marché de la photo tandis que la part des ventes de films n'atteint que 23 %. Services multimédia. Conscient de ces bouleversements, le groupement d'indépendants Foci qui compte 480 points de vente en province, dit mener actuellement une réflexion sur l'avancée du service numérique dans son métier. Il prendra sa décision en septembre. De son côté, le président du réseau de distribution Phox (400 points de vente), Daniel Schmit, s'exprime clairement sur le sujet : « Nous devons être présents sur toute la chaîne de l'image. Par conséquent, nous avons commencé, il y a un an, à tester ces services multimédias dans une dizaine de points de vente. » Et de poursuivre : « Plus ce type de réseau à vocation culturelle se développera, plus les spécialistes de l'image que nous sommes auront de chances d'avoir une part du marché. » Déjà, « l'arrivée sur le marché du concept APS constitue une passerelle vers le numérique », souligne un fabricant. Si l'argentique reste la matière première, son nouveau traitement oblige les laboratoires à remplacer leur « minilab » traditionnel (neuf ou d'occasion, l'investissement varie entre 100.000 et 500.000 francs). Pour l'instant, compte tenu des faibles volumes traités (les travaux photos APS ne devraient représenter que 2 % de l'activité d'ici à la fin 96), les grands distributeurs comme la Fnac ou Foci n'ont pas encore franchi le pas, préférant reporter leur décision d'ici à la fin de l'année. Et si c'était le cas, « la modification des équipements ne se ferait que progressivement », précise Toan Nguyen Huu, en charge de la division développement des produits photos de la Fnac. Seul Phox dit, pour le principe, avoir déjà équipé une dizaine de magasins. Chantal Colomer
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