« Le secteur bancaire africain connaît une véritable révolution »

Paul derreumaux, Président du groupe Bank of Africa Diplômé de Sciences po après des études d'écono­mie, Paul Derreumaux était universitaire à Lille lorsqu'il répondit, à 30 ans, à une petite annonce du ministère du Plan ivoirien, qui recherche un conseiller. « Devenu africain », il a joué depuis 1982 un rôle central dans la création et le développement de Bank of Africa, aujourd'hui bien placée pour tirer parti du revers de fortune des banques nigérianes (lire ci-dessous).Comment évolue le secteur bancaire africain??Il a connu une véritable révolution depuis 2005, avec le décloisonnement des blocs traditionnels que formaient notamment le Maghreb, l'Afrique francophone et son pendant anglophone. Cette évolution a suivi l'augmentation du capital minimum exigé des banques au Nigeria, passé à près de 200 millions de dollars. Pour rentabiliser ces investissements, les établissements nigérians ont été poussés à se développer à l'étranger. Au même moment, les marocaines Attijariwafa Bank et BMCE Bank ont étendu leur concurrence à l'Afrique subsaharienne. La concurrence est donc rude, avec des stratégies très offensives en matière d'ouvertures d'agences et de lancements de nouveaux produits.L'Afrique serait donc le nouvel eldorado bancaire??C'est en tout cas le continent où la bancarisation est la plus faible, avec des taux de pénétration de moins de 10 % en Afrique francophone, 15 % à 20 % dans les pays anglophones et 35 % au Maghreb. Mais ces chiffres évoluent rapidement. Nous avons ainsi relevé nos objectifs annuels d'ouverture d'agences, de 35 en 2008 à 60 de 2009 à 2012 inclus. Nous aurons ainsi doublé la taille de notre réseau.Quel est le positionnement de Bank of Africa??Nous sommes une banque universelle à l'ambition continentale, dynamique dans ses réalisations, sa croissance et son expansion géographique, mais prudente dans sa politique d'octroi de prêts comme dans sa communication. Nous sommes présents dans deux zones, en Afrique de l'Ouest et en Afrique de l'Est. Nous souhaitons les développer et arriver à les réunir puis, à terme, nous implanter en Afrique australe. Nous nous intéressons ainsi au Rwanda, au Cameroun, au Togo et au Ghana, en fonction des opportunités. Nous sommes donc toujours à la recherche de compétences bancaires, notamment parmi la diaspora africaine en France.Qu'apportez-vous aux clients français que les banques françaises ne peuvent pas leur offrir??Une plus grande disponibilité au risque, notamment grâce au développement d'une pratique de prêts syndiqués qui consiste à regrouper les forces de plusieurs établissements de notre groupe, et d'y associer d'autres banques de la sous-région et des partenaires institutionnels. Ceci nous permet de monter des dossiers importants. Nous avons ainsi monté un dossier de plus de 30 millions d'euros pour France Télécome;lécom au Niger. Nous arrivons sans doute à dégager davantage de synergies entre nos différentes implantations que les banques françaises entre leurs filiales. Nous apportons en même temps une plus grande flexibilité de décision, dans la mesure où toutes nos structures de décision sont en Afrique.Où en est votre projet de société financière basée en France??Nous avons obtenu l'agrément de la Banque de France en avril, et nous somme en train de remplir les conditions suspensives, qui incluent par exemple la mise en place du capital et d'un dispositif anti-blanchiment validé. Cette société, dénommée BOA France, s'occupera du rapatriement de l'épargne des diasporas africaines en France. C'est un marché sur lequel notre implantation dans une dizaine de pays nous donne de solides arguments. Outre les commissions que rapporte cette activité, nous pourrons ainsi élargir notre base de dépôts dans nos filiales nationales, donc augmenter notre capacité de financement.Vos filiales au Bénin et au Niger sont déjà cotées sur la Bourse régionale d'Abidjan, quelles sont les prochaines étapes??Nous allons coter BOA Côte d'Ivoire cette année. Notre objectif est de coter toutes nos filiales, puis le holding d'ici trois ou quatre ans.Le déclin des banques françaises en Afrique est-il inéluctable??À mon avis, oui. Cela ne veut pas dire que toutes vont partir. Ni que celles qui sont parties ne le regretteront pas? Mais c'est inévitable, vu l'absence de priorité qu'elles donnent à ce marché, et vu la puissance des nouveaux acteurs marocains et nigérians, et de ceux qui peuvent venir, sud-africains aujourd'hui, asiatiques demain. Les Indiens sont d'ailleurs déjà implantés en Afrique de l'Est?
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