« Nous ne sommes pas au niveau le plus bas de la crise »

La journée d'action a été massivement suivie hier. Comprenez-vous le malaise exprimé par les Français ?Je comprends les inquiétudes devant une situation économique qui se dégrade et qui restera difficile pendant probablement un bon moment, avec comme conséquence la hausse du chômage et particulièrement chez les jeunes, dont beaucoup ne sont pas qualifiés, la recrudescence des plans sociaux. Par ailleurs, je note que, dans la journée d'hier, beaucoup de salariés du privé ont pris part au défilé. C'est le fait que la crise touche un nombre croissant de personnes, alors que la journée du 29 janvier avait été principalement celle du secteur public. Le sujet numéro un d'angoisse des Français est l'emploi, alors que c'est le pays d'Europe qui compte le nombre le plus élevé de CDI.Le Premier ministre a indiqué jeudi soir qu'il n'entendait pas changer de cap. Les mesures annoncées lors du sommet social sont-elles suffisantes ?Toutes les mesures qui stimulent l'activité économique sont bonnes, car, au-delà de leur impact direct, elles contribuent à redonner confiance aux acteurs économiques. Le Fonds d'investissement social est une très bonne idée. Car ce que nous prônons chez Adecco France, c'est que la gestion de la crise doit être autant sociale qu'économique. Il y a un sentiment d'injustice des salariés et une demande d'équité et de sens. Par ailleurs, il n'y a plus d'inflation en France. En mars 2008, la question était celle du pouvoir d'achat. Aujourd'hui, l'aspect pouvoir d'achat en tant que tel est beaucoup moins critique qu'il ne l'était il y a un an.Le gouvernement doit annoncer cette semaine des mesures en direction des jeunes. Qu'en attendez-vous ?Le risque le plus important aujourd'hui est l'éloignement des jeunes du marché du travail. Le gouvernement doit envoyer un signal fort pour l'emploi des jeunes. Quand vous avez une expérience professionnelle, vous avez déjà un acquis. C'est l'utilité sociale du travail temporaire en France. Car du travail, il y en a encore. Cette semaine, on recense une baisse de 37 % de l'intérim par rapport à la même période de l'an dernier, soit 250.000 personnes en moins. Dans le même temps, 10 à 12 % des demandes des entreprises ne peuvent être servies.Premier touché par la crise, l'intérim est considéré comme un indicateur avancé de l'évolution du marché de l'emploi. Voyez-vous, comme certains, des signes de reprise économique pour 2010 ?Nous ne voyons pas de reprise économique à court terme. Et nous ne sommes pas au niveau le plus bas de la crise, qui interviendra probablement au cours de l'été. Prétendre qu'il y aura une reprise à la rentrée, c'est faire la preuve d'un optimisme dangereux. Les crises sont cycliques et se produisent en moyenne tous les sept ans. Celle-ci est plus dure que les autres car la crise économique se double d'une crise financière venue des États-Unis.Pôle emploi peine à faire face à l'afflux de demandeurs d'emploi. L'intérim peut-il jouer un rôle en ces temps de crise ?Je comprends très bien que Pôle emploi soit très encombré. Aucun organisme ne peut régler le problème tout seul. Il est clair que nous avons tout à fait un rôle à jouer. Non pas pour le traitement administratif et social des demandeurs d'emploi, mais sur l'accompagnement et la remise à l'emploi. Car l'ADN du groupe Adecco, c'est de trouver du travail aux gens. Nous avons prouvé notre efficacité. L'intérim, ce sont 30.000 personnes très compétentes, mais surtout disséminées sur tout le territoire dans près de 6.000 agences d'emploi. C'est beaucoup plus que Pôle emploi. Je pense que seuls des mécanismes locaux apportent des réponses, comme le contrat de transition professionnelle (CTP), par exemple. Actuellement, nous souffrons de surcapacité. Je trouverais très surprenant qu'on ne fasse pas appel à nos collaborateurs, qui sont disponibles et très compétents, pour renforcer le partenariat public-privé avec le service public de l'emploi.Propos recueillis parIsabelle Moreau
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