Nucléaire : le chef de l'AIEA en visite en Iran sur fond de tensions avec Israël

Rafael Grossi, le chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), est arrivé ce lundi en Iran pour participer à une conférence sur l'énergie nucléaire. Une visite qui s'inscrit dans un contexte d'inquiétudes autour du programme nucléaire de Téhéran et des tensions accrues avec Israël.
L'AIEA, dirigée par Rafael Grossi, est chargée de vérifier le caractère pacifique du programme nucléaire iranien (photo d'archive).
L'AIEA, dirigée par Rafael Grossi, est chargée de vérifier le caractère pacifique du programme nucléaire iranien (photo d'archive). (Crédits : Eugene Hoshiko)

[Article publié le lundi 6 mai 2024 à 11h17, mis à jour à 15h15] Le chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, sera présent à une conférence sur l'énergie nucléaire, qui aura lieu entre ce lundi et ce mercredi dans la province d'Ispahan, dans le centre de l'Iran. Il « doit assister à la cérémonie d'ouverture de la conférence », selon l'agence de presse officielle iranienne Irna, citant ce dimanche le responsable de la conférence, Javad Karimi Sabet.

Il s'agit du premier déplacement en Iran du responsable de l'agence des Nations unies depuis mars 2023, où il avait notamment rencontré le président Ebrahim Raïssi. Il devrait cette fois négocier « avec les plus hauts responsables politiques et du nucléaire du pays », ont indiqué les agences de presse iraniennes Mehr et Isna. Dont le chef de l'Organisation de l'énergie atomique (OIEA), Mohammad Eslami, toujours selon ces sources. Ce dernier a indiqué la semaine dernière que Rafael Grossi aurait « des réunions » avec des responsables iraniens, sans fournir plus de détails.

Apaiser les relations

Selon l'agence Isna, cette visite serait une occasion pour les deux parties de « partager leurs inquiétudes », concernant notamment les inspecteurs de l'AIEA, là encore sans plus de détails. Pour rappel, l'AIEA est chargée de vérifier le caractère pacifique du programme nucléaire iranien. Or depuis 2021, les inspections ont été fortement réduites, les caméras de surveillance débranchées et l'accréditation d'un groupe d'experts a été retirée. Téhéran restreint ainsi sa coopération tout en poursuivant son escalade nucléaire.

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Dans un discours lors de la conférence ce lundi, Mohammad Eslami a déclaré que « la coopération avec l'Agence dans le cadre du TNP (ndlr : traité sur la non-prolifération des armes nucléaires , conclu en 1968 et signé par un grand nombre de pays) » était « au premier plan des politiques » de Téhéran.

« Nous espérons que l'Agence pourra jouer son rôle en tant qu'une institution internationale indépendante à l'écart des pressions politiques », a-t-il ajouté.

La semaine dernière, il s'était dit « sûr que les négociations (avec Rafael Grossi) dissiperont davantage les incertitudes et que nous pourrons renforcer nos relations avec l'Agence ».

Contexte tendu

Cette visite est en tout cas loin d'être anodine étant donné le contexte géopolitique actuel très tendu entre l'Iran et Israël. Les tensions ont brusquement augmenté le 13 avril dernier, lorsque Téhéran a mené une attaque sans précédent contre l'État hébreux avec 350 drones et missiles. Il l'a justifiée comme un acte de légitime défense après l'attaque meurtrière du 1er avril, attribuée à Israël, et qui a détruit son consulat à Damas en Syrie. Israël n'en est pas resté là et a lancé une attaque de représailles contre l'Iran le 19 avril.

Après ces attaques et ripostes, Rafael Grossi a fait part de son inquiétude et appelé « chacun à une extrême retenue », rappelant le contexte d'escalade croissante au Moyen-Orient, depuis le début de la guerre dévastatrice entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza, il y a sept mois. L'AIEA a toutefois précisé qu'elle n'a constaté « aucun dégât » sur les sites nucléaires iranien après les explosions rapportées dans le centre du pays.

L'ambiguïté de l'Iran sur l'arme atomique

Reste que ce contexte renforce la possibilité d'une attaque contre une installation nucléaire. L'Iran a toujours affirmé que ses activités nucléaires sont pacifiques et nié vouloir fabriquer une bombe atomique. Mais ses agissements laissent à penser le contraire.

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Le pays s'est ainsi progressivement affranchi des limites fixées par l'accord international de 2015, connu sous l'acronyme JCPOA, encadrant ses activités atomiques en échange d'une levée des sanctions internationales auxquelles il était soumis. Un pacte qui a volé en éclats après le retrait des États-Unis, décidé en 2018 par le président d'alors, Donald Trump. Des discussions à Vienne, où est basée l'AIEA, pour le ranimer ont échoué à l'été 2022, et aucun espoir de relance ne se profile à court terme.

Si bien que l'Iran disposerait aujourd'hui de suffisamment de matière pour fabriquer plusieurs bombes atomiques. D'après l'ONU, c'est « le seul pays non doté de l'arme atomique à enrichir l'uranium au niveau de 60% et à accumuler » d'importants stocks, selon le directeur général de l'agence des Nations unies. Un seuil proche des 90% nécessaires pour élaborer une bombe et bien au-delà du plafond autorisé de 3,67%, équivalant à ce qui est utilisé pour la production d'électricité.

Et le pays ne semble pas s'arrêter en si bon chemin. Les autorités iraniennes ont annoncé début février le début des travaux de construction d'un nouveau réacteur nucléaire de recherche à Ispahan, quelques jours après avoir fait état d'un projet de centrale nucléaire dans le sud du pays. Sur le plan du nucléaire, l'Iran ne désarme donc pas.

(Avec AFP)

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Commentaire 1
à écrit le 06/05/2024 à 16:38
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Grossi a déjà visité la centrale nucléaire de Zaporijia. Où est la solution ?

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