Les SSII françaises sous la pression américaine

Avec plus ou moins de bonheur, les sociétés françaises de services informatiques tentent de s'adapter à leur nouvel environnement. Depuis la crise de 1991, qui s'était traduite en un an par une chute brutale de plus de 6 points de la croissance du secteur, les SSII se sont lancées qui, dans des programmes de restructuration drastiques, qui dans une refonte de leurs métiers ou un recentrage sur certains segments. Les analystes s'attendent pour l'ensemble de 1995 à une croissance de 4 à 5 %, à peu de chose près identique à celle de 1994. Dans ces conditions, on ne peut guère parler de reprise ; et l'incertitude ambiante suscite un certain nombre de questions quant à l'avenir des grandes SSII françaises. Les multiples événements relatifs à des prises de participation qui se sont succédé l'an dernier soulignent la mutation désormais incontournable à laquelle est confronté ce marché. Comme le rappelle Jean-François Perret, directeur général adjoint du cabinet de consultants Pierre Audouin Conseil, « la situation française des SSII est en train de devenir atypique, car elle se caractérise encore aujourd'hui par une forte part de marché tenue par des sociétés à capital français ». Quatre ou cinq des dix premières sociétés de services informatiques installées en France sont déjà américaines mais ce ratio est finalement modeste si on le compare à celui de nos voisins. « En Grande-Bretagne, neuf sociétés sur dix sont étrangères, et en Espagne, il y a longtemps que le secteur est sous domination étrangère », poursuit Jean-François Perret. En France, le grand ménage reste donc à faire. Des contraintes liées à l'actionnariat En dépit des nombreux raids, alliances ou partenariats qui ont déjà eu lieu. L'un des derniers en date, le rachat du français GSI par l'américain ADP (Automatic Data Processing), l'une des plus importantes sociétés de services outre-Atlantique, réunit deux spécialistes de la fiche de paie et de la gestion des ressources humaines. La transaction illustre la tendance actuelle. Par ailleurs, comme l'expliquait récemment Georges Grima, président de SG2, les grandes SSII françaises sont confrontées non seulement à des problèmes d'ordre structurel liés aux conséquences de la crise, mais aussi à des contraintes liées à la nature même de l'actionnariat. De nombreux dirigeants-fondateurs approchent de la retraite et doivent donc passer la main. Ce fut le cas pour GFI racheté par IBM, et plus récemment pour GSI. Faut-il rappeler qu'Axime, le pôle informatique de Paribas, est toujours à vendre, ainsi que Sligos et Stéria, filiales du Crédit Lyonnais. Si l'on y ajoute la Cisi, société de services du CEA-I dont le projet de vente à Sema Group vient d'échouer, ce sont quatre des dix premières SSII françaises qui sont à céder ou à la recherche de nouveaux actionnaires. CGS (Cap Gemini Sogeti) venant quant à lui de trouver une solution à ses problèmes. Dans un contexte où les acteurs français susceptibles d'être intéressés par de telles opportunités ne sont pas légion, il y a fort à parier que la situation va profiter en priorité aux puissantes sociétés américaines. Outre les grands acteurs du service comme IBM, EDS ou Computer Science, la pression des outsiders s'accentue. Paul Hermelin, vice-président de Cap Gemini Sogeti, note pour sa part « une très forte poussée et une nouvelle concurrence en provenance des sociétés d'audit comme Ersnt & Young, Price Waterhouse ou McKinsey ». Le différentiel entre les grandes SSII et celles que Jean-François Perret nomme « PME du service informatique », des sociétés situées sur des créneaux spécifiques (progiciels ou solutions verticales), risque donc de s'accentuer encore davantage dans les deux ou trois années à venir. Gilles MUSI
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.