Budget défense : la France désarme massivement

La France désarme massivement... alors que le monde, qui se fait de plus en plus menaçant, notamment en mer de Chine, sans parler de la Syrie, se réarme tout aussi massivement. Ce n'est pas une décision spécifique au nouveau gouvernement Hollande, qui est dans la continuité des derniers budgets de la défense de l'ancienne majorité. Mais une chose est sure, la France désarme au plus mauvais moment... même si cela était attendu. Sur l'actuelle loi de programmation militaire (LPM), le ministère de la Défense aura déjà perdu trois milliards d'euros fin 2012, auxquels il faut désormais rajouter 1,8 milliard, soit la différence entre le projet de budget 2013 et ce qui était prévu dans la LPM.Comment cela se traduit-il? Dans les faits, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, pourtant respecté par l'institution et les industriels de la défense, tente de minimiser cette décrue des crédits budgétaires en faisant valoir que "les ressources totales du budget 2013 sont identiques à celles de 2012". Soit 31,42 milliards d'euros, hors pensions mais avec des recettes exceptionnelles évaluées à 1,27 milliard d'euros en 2013 (cessions des bandes de fréquence des systèmes Rubis et Felin et cessions immobilières). "Pour 2014, les crédits budgétaires restent stables à 30,15 milliards d'euros", écrit-il dans la présentation de son budget. Sauf que voilà, le budget de la défense s'écarte inexorablement de la trajectoire budgétaire définie par la LPM 2009-2014. Fin 2012, le ministère aura déjà perdu "près de 3 milliards d'euros" par rapport à ce qui était déterminé dans la LPM. "En définitive, la mission défense a bénéficié de 125,8 milliards d'euros (contre 128,8 milliards prévus, ndlr), les ressources effectives s'écartant progressivement de la trajectoire initialement prévue", explique le ministère.Près de 5,5 milliards de commandes décaléesLe ministère a d'ailleurs conscience de l'impasse budgétaire. "La stabilisation des ressources exige des économies importantes", estime-t-il. D'autant que la LPM prévoyait 33,2 milliards d'euros pour 2013 (hors pensions). Le ministère va donc économiser 7% sur le fonctionnement courant, respectant strictement la règle prévalant pour l'ensemble des administrations publiques de l'Etat. Il va également rogner sur la masse salariale à hauteur de 0,7%. "Outre la réduction des effectifs, les efforts se concentrent sur une maîtrise des mesures catégorielles et sur un nécessaire ajustement de la pyramide des grades", assure le ministère. Mais ce sont surtout les équipements qui vont trinquer. Près de 5,5 milliards de commandes prévues en 2012 et 2013 ont été décalées, dont près de 4,5 milliards sur les seules opérations d'armement. "Les aménagements retenus permettent de limiter la dépense de l'Etat, notamment en 2013 sans remettre en cause les contrats en cours", affirme le ministère. En outre, ces décisions évitent "d'anticiper les choix qui seront retenus dans le cadre du nouveau libre blanc et de la future LPM".Selon le ministère, qui reste le premier acheteur et investisseur public, les dépenses au profit des équipements sont stabilisées à plus de 16 milliards d'euros, dont 3,4 milliards dédiés à la dissuasion, en dépit de décalages de certaines commandes. Les crédits de paiement prévus pour 2013 au titre de l'entretien programmé des matériels (EPM) -qui regroupe la majeure partie du MCO hors masse salariale, s'élèvent à 2,91­milliards d'euros, en augmentation de près de 225­ millions (soit 8%) par rapport à la LFI 2012. Enfin en 2013, il consacrera 3,3 milliards d'euros à la R&D. La défense augmente de plus de 10% entre 2012 et 2013 les crédits destinés aux études amont afin de préserver les dépenses d'avenir.Quels matériels pour 2013 ?L'année 2013 verra la poursuite de l'équipement des forces avec des matériels neufs tels que le Rafale ou les équipements FÉLIN, et sera marquée par l'arrivée de nouveaux équipements: adaptation du 2e SNLE au missile M51, un aéronef spécialisé dans le recueil du renseignement électromagnétique C160 Gabriel rénové, un centre de commandement, de détection et de contrôle des opérations aériennes aux normes OTAN de Lyon du système SCCOA, un centre de contrôle local d'aérodrome ainsi que 3 radars du système SCCOA et trois systèmes de drones tactiques SDTI.Pour l'engagement des forces, les armées recevront 220 armements air-sol modulaires (AASM), deux avions de patrouille maritime ATL2 (traitement d'obsolescence des consoles et des systèmes de visualisation), 18 missiles EXOCET MM40 bloc 3, 4.036 équipements FÉLIN, 25 torpilles légères MU90, 11 avions Rafale, 4 hélicoptères de combat Tigre, un véhicule à haute mobilité (VHM) et 83 véhicules blindés de combat d'infanterie (VBCI). S'agissant de la projection, de la mobilité et du soutien, les militaires disposeront enfin des premiers avions de transport A400M mais aussi de trois avions de transport CN235, de 5 hélicoptères Cougar rénovés, de 12 hélicoptères NH90 (4 en version navale et 8 en version terrestre), de 72 porteurs polyvalents terrestres (PPT) et de trois systèmes de pose rapide de travures (SPRAT). Enfin, pour les missions de protection et de sauvegarde, un avion FALCON 50 (transformation en surveillance maritime), deux systèmes de défense sol-air FSAF SAMP/T, 20 missiles Aster 15, 23 missiles Aster 30 et 335 missiles rénovés Mistral seront livrés par les industriels.Les avions ravitailleurs commandés fin 2013Très peu de commandes pour 2013 et pour cause, 5,5 milliards d'euros sont décalés. Pour l'avion multirôle de ravitaillement en vol et de transport (Multi-Role Transport Tanker-MRTT ), "le principe d'une acquisition patrimoniale a été retenu. Le passage au stade de réalisation est prévu fin 2013, permettant ainsi d'engager le contrat d'acquisition en vue d'une première livraison fin 2017", explique le ministère de la Défense. Parmi les autres commandes figurent notamment : 3 systèmes de drones tactiques SDTI, 4.400 postes de communication tactiques CONTACT, le premier système intermédiaire de drones MALE, 220 AASM, 20 torpilles lourdes Artémis, lancement de la réalisation du missile de combat terrestre MMP, lancement de l'opération de rénovation de l'ATL2, 5 Cougar rénovés, 3 patrouilleurs et la contractualisation du partenariat public-privé bâtiments de soutien et d'assistance hauturiers (BSAH).7.234 postes supprimés en 2013Au total 7.234 postes vont être supprimés au ministère de la Défense l'an prochain, un chiffre conforme à la "trajectoire" de la LPM. Dans le détail, la mission Défense bénéficie de 38,2 milliards d'euros de crédits budgétaires (y compris les pensions) pour 283.735 emplois d'Etat. "Dans un contexte budgétaire très contraint, la mission Défense a participé à l'effort collectif de maîtrise des dépenses publiques", lit-on dans le document de Bercy. "Conformément à la volonté du président de la République, la trajectoire de la mission Défense (stabilisée entre 2013 et 2015 à 30,15 milliards d'euros hors pensions) est parallèle à celle du budget de l'Etat", est-il souligné.
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