L'éditorial de Philippe Mabille

Si la politique est l'art du possible, on ne devrait pas trop reprocher à François Fillon de s'être résolu à la stratégie du « coup de rabot » sur les niches fiscales. Face à un corps social en apparence calme, mais prêt à l'ébullition, s'attaquer brutalement à une évaluation au cas par cas de l'efficacité de chacun des quelque 400 dispositifs de réduction ou d'exonération d'impôts ou de charges, présents dans la législation française, était politiquement dangereux. Surtout en pleine réforme des retraites. Réclamer un effort général d'économie de 10 %, équitablement réparti entre tous, paraît ainsi à la fois plus simple et moins contestable. Le gouvernement évitera ainsi de batailler pendant des mois au Parlement contre tous les lobbys qui vont se lever pendant l'automne budgétaire pour défendre leur os. C'est oublier néanmoins que les Français ne sont pas tous égaux devant les niches fiscales. Ceux qui en bénéficient le plus sont les mieux informés, les mieux conseillés et donc souvent les plus aisés. Et ce non-choix est aussi celui de la facilité. François Baroin, le ministre du Budget, n'était d'ailleurs pas favorable à ce coup du « rabot » à l'aveugle et aurait préféré un grand nettoyage d'été dans le maquis des niches. Car à force de ne jamais rien supprimer, ou plutôt de toujours additionner les niches fiscales au gré des alternances politiques, la France finit par condamner l'action publique au saupoudrage et à l'inefficacité. On sait bien pourtant que les bonnes niches sont celles qui sont vraiment utiles à la création d'emploi ou qui créent des incitations positives, par exemple en faveur des économies d'énergie ; le gouvernement devrait donc les préserver, voire les renforcer. Et que les mauvaises niches, les plus nombreuses hélas, sont celles dont le seul but est de permettre aux professionnels de la défiscalisation de fabriquer des bulles, comme c'est le cas dans l'immobilier locatif ou les Dom-Tom. Ce sont celles-là qu'il faudrait avoir le courage de supprimer, en un temps où la situation des finances publiques ne permet plus le gaspillage. [email protected]
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