La leçon grecque

La mise sous surveillance négative des banques grecques et portugaises par l'agence de notation S&P, quelques jours après la dégradation de la note des États grecs et portugais, est un avant goût de ce qui pourrait arriver tôt ou tard aux banques européennes si l'on applique à la lettre les régulations de Bâle 3. Alors que la National Bank of Greece détenait à la fin mars près de 20 milliards d'euros de titres d'État grec, soit un montant équivalent à 2,6 fois ses fonds propres, les destins de l'État grec et de cette banque se trouvent de facto indéfectiblement liés. Un cas loin d'être isolé dans ces États périphériques à déficits budgétaires élevés longtemps financés par leurs banques. Quand au Portugal, Banco BPI détenait à fin mars plus de deux fois ses fonds propres en titres de l'État portugais, en Grèce, l'exposition à la dette souveraine de Hellenic Postbank dépassait quatre fois ses fonds propres, et celle de Agricultural Bank of Greece, huit fois ! Toute restructuration de dette souveraine entraînera ainsi une amputation de même ampleur des fonds propres des banques qui ont acheté des dettes publiques, signifiant que les « stress tests » étaient bel et bien passés à côté du problème. En d'autres termes, résume Gilles de Bourrousse chez Octofinances, « les banques peuvent être emportées par la faillite des États. » Une leçon que les régulateurs qui concoctent les nouvelles règles du jeu feraient bien de méditer. Car pour assurer la liquidité des banques, ils poussent aujourd'hui les intermédiaires financiers à réduire leur exposition aux actifs qui connaissent de fortes variations de prix et peuvent de ce fait se trouver illiquides, et à détenir davantage de titres publics, réputés sans risque et facilement négociables. « Il est clair que cette régulation aurait rendu la crise précédente moins sévère, commente Patrick Artus, chef économiste chez Natixis. Seulement, la prochaine crise ne viendra pas des entreprises, qui ont fait d'importants efforts d'assainissement de leur bilan, mais de la dégradation de la situation financière des États. Une fois de plus, conclut-il, les régulateurs sont en train de traiter la crise précédente, et de créer les conditions de la crise future en encourageant les banques à investir dans le nouvel actif à risque. »
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