« Le monde doit éviter les politiques unilatérales »

STRONG>La France va prendre la présidence du G20. C'est important pour la compréhension de la mondialisation par les Français ?Les Français comprennent bien la nécessité d'une meilleure gouvernance du monde. C'est Nicolas Sarkozy et José-Manuel Barroso qui ont convaincu George W. Bush de convoquer un G20 d'urgence en pleine crise fin 2008. Il a fallu la crise la plus grave de notre vie pour aboutir à ce résultat. Le président français a joué un rôle majeur en réaffirmant la primauté du politique pour répondre à ce choc. L'idée que les questions économiques sont trop sérieuses pour rester entre les mains des seuls ministres des Finances a permis de prendre les bonnes décisions, au bon niveau et a peu près au bon moment pour éviter que la crise ne se transforme en dépression type années trente.Que serait un succès de la présidence française du G20 ?L'OCDE travaille déjà avec la France à la préparation de cette nouvelle étape. Il y a d'abord une continuité des réformes en cours à assurer. La France a une responsabilité pour consolider la crédibilité de cette instance informelle comme outil de gouvernance mondiale. Les priorités vont passer de la refonte du système financier à la soutenabilité de la croissance. Le monde affronte de multiples défis, économiques, commerciaux, la rareté des ressources, la sécurité alimentaire, l'énergie, l'environnement. L'enjeu des mois qui viennent est de parvenir à éviter la multiplication des politiques unilatérales et de débattre ensemble des choix, même s'il n'y a pas de convergence sur tout. Il faut trouver des solutions coopératives en maintenant ouvert le commerce. Toutefois, l'horizon du G20 français, c'est novembre 2011... Il y aura sans doute d'autres défis à relever d'ici là.La conscience de l'urgence d'agir ne s'est-elle pas émoussée ?Lorsqu'il y avait le feu à la maison, il fallait appeler les pompiers pour l'éteindre. Aujourd'hui, les défis sont à moyen et long terme. La reprise économique est réelle, mais faible et fragile dans les pays avancés, tandis que les pays émergents sont en plein boom. Il faut assurer la pérennité de la croissance mondiale en sortant du faux dilemme entre relance et consolidation budgétaire : il faut faire les deux en même temps et accélérer les réformes structurelles. Mais dans un environnement plus complexe, car on a déjà pratiquement épuisé toutes les marges de manoeuvre pour sortir de la crise de 2008. Les taux sont pratiquement à zéro et le ratio moyen de dette sur PIB dans l'OCDE va dépasser les 100 % fin 2010. Il faut donc trouver de nouveaux équilibres macroéconomiques, sans casser la reprise naissante et surtout retrouver le chemin de la création d'emplois pour sortir du chômage de masse, notamment celui des jeunes. Si on ne trouve pas rapidement de solution, on risque de fabriquer une génération frustrée qui a fait des études supérieures et n'accède pas à l'emploi.L'Europe est-elle prise au piège entre les États-Unis et la Chine ?Le problème de l'Europe est sa structure institutionnelle. La recherche de l'équilibre entre les intérêts des 17 de l'Eurozone ou des 27 de l'Union est source de tensions. La crise a exacerbé cette tendance de chacun à tirer la couverture à lui.La politique monétaire de la Fed n'est-elle pas un danger ?Les États-Unis ont tout essayé ? plans de relance budgétaire massifs, taux zéro, achats de bons du Trésor. Rien n'y fait, le chômage ne baisse pas. La politique quantitative dite du QE2 est la dernière arme à la disposition de la banque centrale et tire sa légitimité du fait que le reste du monde dépend de la reprise de la croissance aux États-Unis. Mais il est vrai que cette politique fait baisser le dollar.Pourra-t-on éviter une guerre des devises ?Les dirigeants sont conscients qu'il faut à tout prix l'éviter. Quand les ministres des Finances ont dit : « pas de dévaluations compétitives », c'est un signal politique fort. Mais il n'en reste pas moins que nous entrons dans une période délicate, car la politique monétaire américaine a des effets collatéraux face auquel il sera difficile pour l'Europe et les pays émergents de trouver une parade. Propos recueillis par Philippe Mabille(*) Organisation de coopération et de développement économiques.Angel Gurría Secrétaire général de L'OCDE (*)
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