Faire évoluer un poste de travail sans risque juridique

SOCIALPour rester compétitive ou améliorer son organisation, une société peut éprouver la nécessité de faire évoluer les postes de travail de ses salariés. Sur un plan juridique, la question est alors de savoir si cette évolution entraîne une modification des contrats de travail, ce qui suppose l'accord de chacun des employés concernés. Des premières réponses se dessinent avec l'arrêt rendu le 12 mai 2010 par la chambre sociale de la Cour de cassation. La haute juridiction rappelle que les nouvelles tâches confiées au salarié ne modifient pas son contrat de travail si elles correspondent à sa qualification. Mais surtout, pour la première fois, elle indique que l'accord du salarié n'est pas requis lorsque les nouvelles tâches ne dépassent pas 30 % du temps de travail de l'employé.Dans l'affaire jugée, une banque recrute, dans les années 1980, deux personnes comme rédactrices au service contentieux. Elles sont chargées des relations avec les débiteurs et auxiliaires de justice ainsi que de préparer les injonctions de payer les assignations et les plans de surendettement. Puis la banque décide de leur imposer de nouvelles tâches : saisir et vérifier des données, et participer à une plate-forme téléphonique. Les deux rédactrices ont alors refusé invoquant une dénaturation de leur fonction. La banque les licencie pour faute grave en janvier 2005. Elle reproche à ces deux salariées d'avoir refusé une modification à hauteur de 30 % de leur temps de travail. Les deux rédactrices ont décidé de contester leur licenciement en saisissant la justice prud'homale afin de demander des indemnités pour rupture abusive de leurs contrats de travail.Le seuil des 30 %Sur ce point, la cour d'appel de Paris ne leur a pas donné gain de cause le 13 janvier 2009. Pour les juges du fond, les nouvelles fonctions des deux rédactrices étaient conformes à leur qualification puisqu'elles continuaient de traiter les dossiers de recouvrement dans le cadre du service contentieux. Et comme les nouvelles tâches confiées aux deux salariées étaient en rapport avec leur activité de rédactrice et ne dépassaient pas 30 % de leur temps de travail, il n'y avait pas une modification de leur contrat de travail, selon la cour d'appel de Paris.Dans son arrêt du 12 mai 2010, la chambre sociale de la Cour de cassation a confirmé l'interprétation en droit des juges du fond. Elle permet ainsi que des nouvelles tâches confiées à un salarié et conformes à la fonction de celui-ci peuvent aller jusqu'au 30 % de son temps de travail sans pour autant modifier le contrat de travail. Dans un monde en perpétuelles mutations, les entreprises disposent, avec le nouvel éclairage de la Cour de cassation, d'une marge de manoeuvre pour faire évoluer les postes de travail de leurs salariés. Elles connaissent aussi les limites à ne pas dépasser pour éviter une modification du contrat de travail, autrement dit ne pas avoir besoin de demander l'accord des employés concernés. Dans son arrêt du 12 mai 2010, la chambre sociale de la Cour de cassation a toutefois cassé l'arrêt de la cour d'appel de Paris sur un autre point. Elle a considéré que le refus des deux rédactrices pouvait constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement. Mais sans permettre pour autant d'aller sur le terrain de la faute grave. Frédéric Hasting
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