Le bras de fer EDF-Areva sur le combustible nucléaire s'intensifie

La situation est inédite. Faute de contrat pour 2010, l'uranium brûlé dans les centrales nucléaires d'EDF reste depuis début janvier en instance sur les sites de l'électricien au lieu d'être expédié à La Hague (Manche) pour être retraité. Les discussions entre Areva et son principal client EDF sur « l'aval » du cycle (retraitement, recyclage, logistique?) sont au point mort. « Le dossier est en attente d'arbitrage à Bercy », indique Areva, qui espère qu'un accord interviendra dans les jours qui viennent.Rien n'est moins sûr. Pourtant, l'enjeu est d'importance pour le groupe dirigé par Anne Lauvergeon car EDF fournit près de 80 % des volumes traités à La Hague, la plupart des électriciens étrangers n'ayant pas renouvelé leurs contrats. Les discussions entre Areva et EDF durent depuis des mois, voire des années. Le contrat pluriannuel précédent, qui porte sur environ 800 millions d'euros par an pour le seul retraitement à La Hague, expirait fin 2008.Incapables de se mettre d'accord, les deux entreprises détenues majoritairement par l'État avaient déjà dû se tourner vers leurs tutelles. Mi-décembre 2008, un accord-cadre, élaboré sous l'arbitrage de Christine Lagarde et Jean-Louis Borloo, avait été approuvé par les deux groupes pour la période 2008-2040. Ils avaient alors décidé de prolonger les conditions 2008 en 2009, par un avenant, le temps de finaliser l'ensemble du contrat.Mi-2009, EDF a tout remis en cause, explique-t-on chez Areva. EDF, pour sa part, refuse de s'exprimer sur cette question. Non seulement les deux groupes ne seraient pas d'accord sur le prix, mais l'électricien reviendrait même sur son engagement d'augmenter les volumes traités. Dans l'accord- cadre, EDF avait accepté de relever à partir de 2010 de 850 à 1.050 tonnes par an les quantités de combustibles usés retraités à La Hague. « En terme de prix, le différend porte sur des sommes unitaires très faibles », selon une source proche. Le retraitement du combustible coûte environ 1,20 euro par mégawattheure (MWh), à comparer aux 34 euros le MWh facturés aux particuliers selon le tarif réglementé.dossier épineuxAutre dossier qui vient envenimer les relations entre les deux frères ennemis du nucléaire français : le sort de l'usine Eurodif d'Areva au Tricastin (Drôme). Pour les deux dernières années d'activité d'Eurodif, en 2011 et 2012, avant la mise en service de la nouvelle usine d'enrichissement Georges-Besse II (GB II), Areva pensait pouvoir compter sur les commandes d'EDF. Or, l'électricien a pris d'autres dispositions, en traitant avec le russe Tenex et l'européen Urenco. Areva, qui affirme que 500 emplois sont menacés par cette décision, demande, ici aussi, l'arbitrage de Jean-Louis Borloo. « Va-t-on dépendre des Russes pour l'enrichissement de l'uranium ? » s'est interrogée Anne Lauvergeon devant les députés la semaine dernière. « Si le traité européen de Corfou, qui limite les importations russes en la matière à 20 % de nos besoins, n'est pas respecté, il faut arrêter la construction de GB II qui représente 3 milliards d'euros d'investissement », a-t-elle lancé.
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