Il y a des titres qui peuvent ruiner la carrière d'un film, « Sibérie Monamour » en est l'exemple type. Si l'on ne fait pas attention, on croit lire « Sibérie Mon amour ». Et l'on se dit, « c'est parti pour un film naturaliste se réduisant à de belles images »... Or, en y regardant de plus près, on remarque alors que « Monamour » s'écrit en un seul mot... Il s'agit en réalité du nom du hameau où se situe principalement l'action de ce film brut, rêche, dur, très russe, signé Slava Ross... Et pas du tout pour les enfants.Le jeune Lyochka vit à Monamour avec son grand-père, en attendant désespérément le retour de son père qu'il prend pour un héros. Totalement isolés, leur ravitaillement est assuré par l'oncle de Lyochka qui habite une petite ville voisine. Mais un jour, ce dernier est dévoré par des chiens sauvages. Le garçon et son grand-père, très affaiblis, doivent faire face à la rudesse du climat et aux pilleurs. Parallèlement, sur une base militaire pas très loin de Monamour, un officier vétéran des guerres du Caucase s'enfonce dans la dépression.Au premier abord, « Sibérie Monamour » s'impose comme un film désespérant sur la condition humaine, où l'on constate, pour reprendre Plaute, que « l'homme est un loup pour l'homme ». Dans ces immensités perdues de Sibérie, il n'y a pas un être humain pour racheter l'autre, mis à part l'innocent petit garçon et son grand-père. Tous ces hommes et femmes sans le sou ne pensent qu'à tuer, humilier ou escroquer leurs semblables, encore plus pauvres qu'eux.Slava Ross fait montre d'un pessimisme hallucinant sur un genre humain dénué de toute morale et sans la moindre compassion. Et puis soudain, au moment le plus désespéré, l'Homme semble percer sous la bête et une lumière d'espoir apparaît. Une sorte de passage nature-culture. Ce film métaphorique, noir mais beau, remarquablement interprété par une myriade d'acteurs russes, n'en fait pas moins froid dans le dos. J.-C. C.

latribune.fr

19 Avr 2011, 21:32

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