L'exception culturelle, un problème pour un accord euro-américain de libre-échange ?

Un pas en avant ? Alors que les Etats-Unis ont fait part de leur intention mercredi de lancer officiellement les négociations en vue d\'un accord de libre-échange américano-européen dans un délai de trois mois, la récente annonce du président français (exclure les normes sanitaires et l\'exception culturelle des pourparlers) va-t-elle permettre de simplifier la donne ? Pas si sûr.Lancer les négociations après un délai de 90 jours\"Nous avons l\'intention de lancer les négociations sur ce nouvel accord après un délai de 90 jours à partir de cette notification\", a écrit mercredi le représentant au Commerce extérieur américain par intérim, Demetrios Marantis, dans un courrier adressé aux chefs de file du Congrès et communiqué à la presse. Ceci permettrait de respecter le calendrier souhaité par la Commission européenne, à savoir, lancer officiellement les discussions \"avant la fin de la présidence irlandaise de l\'Union européenne\" qui s\'achèvera à la fin du mois de juin prochain.De son côté, Bruxelles doit officiellement donner son feu vert. Mais pour Jean-Marc Siroën, professeur d\'Economie à l\'Université Paris-Dauphine, les négociations ont d\'ores et déjà commencé. \"Avec sa déclaration, François Hollande est entré dans la première étape du processus des négociations, à savoir l\'agenda\". La deuxième étape étant la phase de négociations. Exclure la culture et les normes sanitaires de l\'accord, \"une condition sine qua non\"Le chef de l\'Etat français a en effet déclaré vendredi 15 mars qu\'il souhaitait que les normes sanitaires (avec en toile de fond le problème des OGM et le conflit du bœuf aux hormones vieux de près de vingt ans) ainsi que l\'exception culturelle, notamment les services audiovisuels ne fassent pas partie des négociations américaines.Cette déclaration ne doit pas surprendre venant de Paris, puisque, comme le rappelle Guillaume Klossa, fondateur du think tank transpartisan EuropaNova, c\'était même \"la condition préalable pour aboutir à un accord\". \"Autrement, il eut fallu faire des normes plus exigentes\" compte tenu du contexte, assure l\'expert. Encore faut-il que cette position soit soutenue à l\'échelle européenne et qu\'ensuite elle soit acceptée par Washington.Le cas échéant, rien n\'indique toutefois que cela simplifierait les choses. \"Il est parfois plus judicieux d\'aborder tous les problèmes en même temps, autrement, cela peut même compliquer les choses\", estime Inna Mufteeva, économiste chez Natixis. Et Jean-Marc Siroën d\'abonder dans ce sens : \"si les Etats-Unis acceptent, cela ne sera pas sans contre-partie. A l\'arrivée, ce que l\'Union européenne gagnerait, elle le perdrait dans la pénétration du marché américain\". A titre d\'exemple, les produits du terroir tels que le champagne, le foie gras ou encore les préparations à base de lait cru risqueraient de rester bloqués aux frontières du Vieux Continent.Le scénario le plus probable est, selon Jean-Marc Siroën, que les deux parties passent beaucoup de temps à négocier pour finalement ne pas aboutir. De son côté, l\'économiste Bruno Jérôme, maître de conférence à Paris II Panthéon Assas, déplore une sorte de \"malédiction\". Selon lui, ce \"type de solution\" - à savoir, un accord de libre-échange - \"est souvent présenté comme un palliatif dans une situation de crise latente. Or, le paradoxe est que cela serait plus facile en période d\'expansion\".Prouver la création d\'emploiMoins pessimiste, Guillaume Klossa estime qu\'il existe une solution. Selon lui, trois conditions sont nécessaires pour que cet accord voit le jour. Il faut tout d\'abord qu\'il y ait une concertation en amont, ensuite que les deux parties aient conscience qu\'il existe des sujets très sensibles -comme le volet agricole-, et enfin montrer qu\'il y aura une création de richesse effective. Et l\'expert d\'insister sur ce dernier point: il est selon lui indispensable de démontrer que cet accord permettrait de créer de l\'emploi en Europe de manière nette et significative. Une remarque dont Guillaume Klossa n\'a d\'ailleurs pas manqué de faire part à Karel de Gucht, le commissaire européen au Commerce lors de la conférence européenne de Harvard le 2 mars dernier, confie-t-il. Côté américain, la lettre de Demetrios Marantis semble attester de la prise de conscience de l\'importance du sujet. La missive assure en effet que cet accord pourrait être un \"moteur pour la création d\'emploi et de croissance\" de part et d\'autre de l\'Atlantique. Encore faut-il le prouver. Lire aussi: libre-échange: le chemin pour aboutir à un accord américano-européen s\'annonce long 
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